barrage
Sur le piano, ensemble de barres en métal ou en bois servant à renforcer la caisse, ce qui permet d'accroître la tension des cordes. L'invention en est attribuée à Sébastien Érard.Sur le luth, le barrage consiste à renforcer la table d'harmonie, très fragile, par une série de fines lattes de bois.
Barraine (Elsa)
Femme compositeur française (Paris 1910 – Strasbourg 1999).
Elle travaille avec Paul Dukas et obtient en 1929 le premier grand prix de Rome. Elle écrit deux symphonies (1931, 1938), riches, chatoyantes, encore traditionnelles. Poésie ininterrompue, d'après Eluard (1948), marque une évolution vers une expression plus vive et plus audacieuse. Viennent ensuite les Variations pour percussion et piano (1950) et la Nativité (1951). Le Livre des morts tibétain (auquel s'intéressera aussi Pierre Henry) est pour elle une illumination qui porte et inspire sa Musique rituelle pour orgue, tam-tam et xylophone (1968), l'une des œuvres les plus marquantes qu'ait écrites cette « musicienne de l'essentiel » (C. Rostand). Citons aussi la Cantate du vendredi saint (1955). Elsa Barraine a aussi écrit des musiques de film, et le ballet la Chanson du mal-aimé (1950).
En 1969, Elsa Barraine devient titulaire d'une classe d'analyse au Conservatoire de Paris. Dans le cadre de la Fédération musicale populaire, qui regroupe des chorales, et en collaboration avec le compositeur François Vercken, elle suscite des œuvres nouvelles, jouant le rôle de médiatrice entre les chanteurs amateurs et les compositeurs.
Barraqué (Jean)
Compositeur français (Puteaux 1928 – Paris 1973).
Issu d'une famille bourgeoise, il apprit d'abord le piano et travailla au Conservatoire de Paris l'harmonie, le contrepoint et la fugue avec Jean Langlais, puis, de 1948 à 1951, l'analyse avec Olivier Messiaen. Compositeur exclusivement et fièrement sériel, il n'a laissé que six ouvrages auxquels vient s'ajouter son Étude pour bande magnétique (1954), résultat de ses travaux avec Pierre Schaeffer (1951-1954). Mais ses œuvres sont de celles qui marquent une époque. Les deux premières sont la Sonate pour piano (1950-1952) et Séquence pour soprano, ensemble instrumental et percussions (1950-1955). La Sonate, la plus monumentale peut-être depuis la Hammerklavier de Beethoven, est en deux parties, de dimensions à peu près égales, mais dont la première, aux arêtes vives, est surtout rapide, et la seconde, envahie peu à peu de zones de silence, surtout lente. Elle ne fut créée au disque ! qu'en 1957, et on ne l'entendit en concert qu'en 1967. De Séquence, la version initiale date de 1950. Plus tard, Barraqué remplaça les poèmes de Rimbaud et d'Eluard par des poèmes de Nietzsche, et, en 1955 encore, ajouta deux interludes instrumentaux. L'ouvrage fut créé en 1956. La même année, Barraqué découvrit le roman de Hermann Broch la Mort de Virgile (achevé en 1947), et fut d'emblée captivé par cette vaste méditation, si proche de ses préoccupations propres, sur les rapports entre l'art, l'artiste et la société. « Le livre dépeint les dix-huit dernières heures de la vie de Virgile, depuis son arrivée au port de Brindisium (l'actuel Brindisi) jusqu'à sa mort dans l'après-midi du lendemain au palais d'Auguste. Bien que rédigé à la troisième personne, il s'agit d'un monologue du poète. C'est avant tout un bilan de sa vie, du bien-fondé ou non moral de cette vie, du bien-fondé ou non du travail poétique auquel cette vie fut consacrée (Virgile désirait que toute son œuvre fût détruite), mais, comme toute son existence est liée à son époque, ce bilan embrasse la totalité des courants spirituels et souvent mystiques qui parcoururent l'Empire romain en ce dernier siècle avant le Christ, et qui ont fait de Virgile un précurseur du christianisme » (Broch). Barraqué, fasciné notamment par le concept de la méditation à l'orée de la mort, conçut le projet (que sa démesure voulue condamnait d'avance à l'inachèvement) d'une vaste série de compositions, du piano solo à l'opéra, constituant un cycle de commentaires et de paraphrases des quatre parties du roman. La mort prématurée du compositeur, ainsi que la lenteur qu'il apportait à l'acte d'écrire, comme s'il s'agissait à chaque instant d'une question de vie ou de mort, ne lui permirent de mener à bien que …au-delà du hasard pour quatre formations instrumentales et une formation vocale (1958-59, création en 1960) ; Chant après chant pour soprano, piano et 6 percussionnistes (1966) ; le Temps restitué pour soprano, soprano dramatique, chœur mixte à 12 voix et 31 instruments (1956-1968, création en 1968) ; et Concerto pour clarinette, vibraphone et 6 formations instrumentales (1968). De ces quatre partitions, les trois premières utilisent à des titres divers le texte de Broch, alors que la quatrième se rattache au roman de manière indirecte. Toutes unissent la rigueur intellectuelle la plus intransigeante et le romantisme le plus généreux et le plus ardent : c'est ainsi notamment que Barraqué put s'inscrire dans la descendance de Beethoven, maître qu'il révérait par-dessus tout. Tant par ses travaux sur la série qui le conduisirent au système des séries proliférantes (permettant, à partir d'une série initiale, l'engendrement de séries dérivées toutes différentes, mais restant apparentées à l'originale) que par ses recherches formelles, Barraqué ne ménage ni l'interprète ni l'auditeur, mais quelle récompense à l'issue de l'effort ! « La musique c'est le drame, c'est le pathétique, c'est la mort », disait-il. Cet athée solitaire, qui ne vivait que pour la musique, laissa peut-être la musique le détruire. La maladie exécuta ce que lui-même n'osa peut-être pas faire : arrêter sa vie, une vie qui avait été une fusion constante d'exaltation, de désespoir, de crises agressives, de persécution et de fureur. Conscient de sa valeur, il vécut et travailla en marge de la vie musicale. Son bagage ne représente que trois heures et demie de musique, mais peut-être faudra-t-il plusieurs générations pour en mesurer la profondeur et les résonances. Auteur également d'une importante monographie sur Debussy (Paris, 1962) et de Debussy ou la naissance des formes ouvertes, thèse pour le C. N. R. S. (1962), il laissa à sa mort, en état d'inachèvement et sous un aspect à peu près indéchiffrable, Lysanias pour solistes, chœurs et grand orchestre, les Portiques du feu pour 18 voix a cappella et les Hymnes à Plotia I pour quatuor à cordes et II pour piano, cela sans compter divers projets parmi lesquels, pour la scène, l'Homme couché.