Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
I

isorythmie (du grec isos ; « semblable »)

Construction symétrique procédant par juxtaposition de phrases toutes dotées d'un même schéma rythmique : Au clair de la lune contient une isorythmie.

Le terme est employé aujourd'hui principalement pour désigner un procédé de composition élaboré au XIIIe siècle pour les teneurs de motets, et considérablement développé au XIVe siècle (Ars nova), consistant à découper une mélodie (color) en fragments rythmés selon un schéma préétabli, même s'il ne tient pas compte du phrasé initial (talea). Appliquée principalement à l'écriture du ténor, l'isorythmie s'est ensuite projetée sur la contre-teneur, et parfois même, à des degrés divers, sur la totalité des voix de la polyphonie. En tant que procédé systématique, elle cesse d'avoir cours au XVe siècle, mais on la retrouve à des degrés divers dans la carrure qui n'a jamais cessé de régir les mélodies devenues les plus populaires, sans en exempter l'œuvre des grands maîtres.

   Par exemple, 1er kyrie de la Messe de G. de Machaut :

   Color (mélodie liturgique) :

   Talea (formule rythmique) :

   Teneur isorythmique :

Israël

Depuis la création de l'État d'Israël (1948), la musique a bénéficié de l'essor qu'elle a connu dès le début du siècle, puis entre les deux guerres, grâce à la fondation d'académies, d'écoles et d'orchestres, ainsi qu'à l'activité d'une radio également attentive à son expression populaire et artistique. L'arrivée d'immigrants formés dans des disciplines et des cultures différentes et se retrouvant alors face à un héritage commun a provoqué, chez les compositeurs, le désir de donner son identité à la musique israélienne en exaltant une unité qui a résisté à la diversité des temps et des lieux, soit par l'emprunt à l'élément folklorique, soit par l'homogénéité des formes et du langage. Il n'est donc pas surprenant qu'une gamme de styles exceptionnellement étendue traduise cette rencontre du passé et du présent, du chant israélien et des syntaxes enseignées dans les conservatoires de l'Europe et du Nouveau Monde. À une période d'acclimatation reflétant les problèmes posés par cette synthèse, le métier, l'instinct et la ferveur des compositeurs ont apporté des solutions généralement valables mais qui ont rarement atteint à une expression universelle. La plus courante, principalement chez les aînés (Paul Ben Haïm, Erich Walter Sternberg, Artur Gelbrun, Joachim Stutschewsky, Oedöen Partos ou Alexander Boskovich), consiste à s'inspirer des thèmes juifs, qu'ils soient ceux de l'Europe centrale ou orientale, dans une esthétique néoclassique ou néoromantique. L'héritage traditionnel s'y voit tour à tour confronté au langage tonal, aux éléments de modalité, au style polyphonique de la Renaissance ou de l'époque baroque, aux formules harmoniques des impressionnistes et de leurs successeurs, à une instrumentation ou à des formes musicales évoquant l'esprit slave ou oriental. D'autres créateurs, utilisant toutes les ressources de la musique occidentale de leur temps, n'ont pas craint, au contraire, de transposer les éléments mélodiques d'autrefois au cœur des tendances les plus modernes, expressionnisme, technique sérielle, aléatoire et même électro-acoustique. Mordecai Seter avec son ballet Judith et sa symphonie Jérusalem peut être considéré comme un des plus audacieux pionniers de cette esthétique ; mais il faut citer également Ben-Zion Orgad, Yehosha Lakner, Noam Sheriff (Chant des Degrés), Jacob Avni (Collage), Ami Maayani, Abel Ehrlich, Asher Ben Yohanan, Ram Da-Oz et surtout Sergiu Natra, dont Dedications, créé au festival d'Israël en 1972, est l'une des partitions maîtresses de ces dernières décennies. Il en résulte souvent des œuvres hybrides justifiant l'attitude d'autres compositeurs indifférents à toute idée de nationalisme et qui ont adopté le système dodécaphonique ou les moyens électroniques sans références, ni allusions à la liturgie juive. C'est le cas de Roman Haubenstock-Ramati, l'une des personnalités saillantes de l'avant-garde actuelle et qui a tenté une convergence particulièrement attachante de l'esthétique postsérielle et des tendances propres à l'école française contemporaine. Citons aussi Josef Tal, dont les premières partitions se rattachent à l'expressionnisme et qui a été le pionnier de l'électroacoustique en Israël (il a fondé à Jérusalem, en 1961, un centre de musique électronique), Yizchak Sadaï, Herbert Brün et Yaakov Gilbao, ainsi que le musicologue Peter Gradenwitz, dont l'activité comme auteur, compositeur et animateur de la Société internationale pour la musique contemporaine à Tel-Aviv est d'une extrême importance. Dans ce domaine, toutefois, aucune solution vraiment originale ne s'est présentée en marge des recherches auxquelles se livrent les jeunes générations, fût-ce dans l'attitude provocatrice de certains chefs de file (Yehuda Yannai, « supermoderne et hyperindépendant »).

   Ces différentes expressions d'une école musicale, qui ne demande qu'à naître et à s'épanouir, sont cependant encouragées par une politique musicale plus efficace que dans aucun autre pays du monde et qui est parvenue à imposer une conception de la musique elle-même très différente de celle que partagent Orientaux et Occidentaux. Un dixième de la population de Tel-Aviv suit régulièrement les concerts de l'orchestre et les différents festivals organisés depuis vingt-cinq ans, auxquels participent, du reste, plus ou moins bénévolement, les plus grands artistes internationaux.

istesso tempo

Locution italienne utilisée pour indiquer qu'un changement de mesure n'implique aucun changement de tempo : « le même mouvement ».

La valeur absolue des notes ne change pas. On trouve aussi le signe

lorsque l'on passe, par exemple, d'une mesure à 3/4 à une mesure à 6/8.

Istomin (Eugene)

Pianiste américain (New York 1925 – Washington 2003).

Né de parents émigrés aux États-Unis en 1919, il manifeste dès l'enfance des dispositions musicales exceptionnelles. En 1939, il entre au Curtis Institute de Philadelphie dans la classe de Rudolf Serkin et remporte en 1943 le Concours de Philadelphie et le Concours Leventritt, ce qui lui permet de se produire avec l'orchestre de Philadelphie et le Philharmonique de New York, concerts radiodiffusés dans les États-Unis entiers. Malgré la guerre, sa carrière prend son essor. En 1959, il rencontre Pablo Casals, qui joue un rôle décisif dans sa carrière. Pendant six ans, il se produit dans le cadre du Festival de Prades aux côtés de Stern, Serkin, Horszowski et Schneider. Parallèlement à son activité de soliste international, il constitue avec Isaac Stern et Léonard Rose un célèbre trio.