Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
C

contratenor

Mot latin (masculin) traduit en ancien français par contre-teneur (féminin), et qui désigne, antérieurement aux XVIe et XVIIe siècles, une voix de la polyphonie de caractère spécial, introduite au XIVe siècle à titre de complément à la partie de ténor, jusque-là la plus grave.

Souvent placée sous le ténor, mais de même tessiture que lui, d'où croisements fréquents, elle s'est, à l'époque de Dufay, franchement placée à la partie la plus grave, repoussant ainsi le ténor à l'emplacement qu'il a depuis lors conservé, et donnant progressivement naissance à la notion de partie de basse, nom qui finit par supplanter le sien au XVIe siècle. On distinguait parfois le contratenor bassus, le plus fréquent, et le contratenor altus plus élevé (haute-contre). L'exécution du contratenor a probablement été d'abord instrumentale, tandis que celle des parties supérieures était le plus souvent vocale. Ces distinctions se sont effacées aux approches de la Renaissance.

contre-chant

Partie mélodique secondaire, entendue en même temps qu'un chant principal.

Le terme n'est pas limité à un emploi technique particulier, mais s'emploie quand on veut mettre en relief le caractère mélodique propre d'une ligne secondaire.

contre-exposition

En termes de fugue, on appelle contre-exposition une seconde et facultative présentation de l'exposition, faisant suite à la première en ordre inversé (réponse, puis sujet), et généralement réduite à 2 entrées au lieu des 4 entrées au minimum de l'exposition.

contre-sujet

Terme utilisé seulement en ce qui concerne la composition de la fugue.

La première phrase mélodique de cette dernière est dite sujet (c'est, en quelque sorte, le thème). Elle est suivie par une autre phrase dans laquelle les rôles de la tonique et de la dominante sont intervertis, cette deuxième phrase étant dite réponse. À la ligne mélodique de la réponse s'ajoute une troisième phrase qui l'accompagne et pour laquelle le compositeur s'efforce de faire preuve de la plus grande imagination contrapunctique. Cette troisième phrase que l'on entend en même temps que la réponse est dite contre-sujet.

contre-ténor

Néologisme dérivé de l'anglais counter tenor, et sans justification dans la langue française.

Employé sans discernement, il semble désigner indifféremment soit le chanteur falsettiste, soit le ténor haute-contre. Étymologiquement ce terme désignerait une partie vocale chantée « contre » ­ c'est-à-dire près de ­ celle du ténor, autrement dit la partie d'alto féminin ou masculin.

contrebasse

Instrument à cordes et à archet, le plus grave de la famille des violons, correspondant au registre de seize pieds de l'orgue.

Issue du violone ou contrebasse de viole, elle est apparue dans la seconde moitié du XVIe siècle en Allemagne du Sud, et une centaine d'années plus tard en France. Elle avait à l'origine cinq ou six cordes, accordées par quartes, par quintes, ou par tierces et quartes alternées. De nos jours, ses caractéristiques ne sont pas encore totalement stabilisées. Elle reproduit parfois la forme du violoncelle, mais le plus souvent celle de la basse de viole, avec une caisse effilée en ogive. Elle comporte, de l'aigu au grave à partir du sol[1-] : sol, ré, la, mi. Certaines contrebasses ont cinq cordes, la cinquième étant soit l'ut grave, soit l'ut au-dessus du sol[1-]. L'instrument mesure environ 1,95 m de haut, dont une caisse de 1,10 m. Il existe un petit modèle de 1,60 m. L'archet peut être convexe comme celui de la viole, rectiligne ou concave. Sa longueur est d'environ 67 cm. Le registre de la contrebasse est d'environ deux octaves et une sixte, quatre octaves avec les sons harmoniques. On note la musique en clé de fa 4e ligne, les sons réels sonnant à l'octave inférieure des sons écrits.

   Dans le jeu, où la main gauche utilise au moins huit positions, le pouce pouvant servir de sillet mobile, le démancher joue un rôle important en raison de la taille de l'instrument. Le vibrato, le glissando, le trille, l'extension font partie de la technique de la contrebasse, mais la lourdeur de l'archet est défavorable au jeu dans un tempo rapide, ainsi qu'aux sauts d'une corde à l'autre.

   La contrebasse fut d'abord réservée à l'usage de l'église, où elle renforçait le seize pieds de l'orgue. On commença à l'utiliser dans les orchestres de théâtre à la fin du XVIIe siècle. Longtemps, elle ne servit qu'à doubler les violoncelles à l'octave inférieure. Les virtuoses Domenico Dragonetti (1763-1846), puis Giovanni Bottesini (1821-1889) firent la démonstration des possibilités de l'instrument et ne contribuèrent pas peu à son émancipation. Beethoven fut l'un des premiers à confier à la contrebasse une partie plus intéressante (traits du scherzo de la 5e Symphonie, « orage » de la 6e). Berlioz l'utilisa pour des passages mélodiques. Mais un répertoire de musique de chambre, de symphonies concertantes et de concertos se développa également.

   Parmi les compositeurs ayant mis en valeur la contrebasse, citons : au XVIIIe siècle, K. Ditters von Dittersdorf (quintettes avec contrebasse, duo pour alto et contrebasse, symphonies concertantes, concertos), W. Pichl, A. Zimmermann, J. B. Vanhal, I. Holzbauer, Mozart (aria Per questa bella mano), Joseph Haydn, Michael Haydn, F. A. Hoffmeister, J. Sperger ; au XIXe siècle, Bottesini, Schubert dans la Truite, Saint-Saëns dans le Carnaval des animaux, etc. ; au XXe siècle, E. Bigot (Capriccio), E. Bozza (pièces), M. Bitsch (suite pour contrebasse solo), Ch. Chaynes (Lied, scherzando et finale), Koussevitski (concerto, pièces), F. Farkas (Sonatine sur des chants populaires hongrois) et Hindemith (sonate).

   Dans le domaine pédagogique, nous citerons les méthodes de G. Bottesini (1869), J. Kraft (Der Weg zur Griffsicherheit und Technik ; Schule der Bogentechnik), G. Marangoni (Scuola teoretica-practica del contrabasso), N. Marcelli (The Carl Fischer basic method) et F. Simandl (New method for double bass), et les exercices techniques ou études de Baillot, Bottesini, H. E. Kayser, Gasparini, W. Gadzinski et A. Weber. D'autre part, la contrebasse a toujours joué un rôle important dans la musique de jazz.