Mompou (Federico)
Compositeur espagnol (Barcelone 1893 – id. 1987).
Encouragé dans sa vocation dès son enfance, il suivit les leçons du fameux Liceo de sa ville natale avant de se rendre à Paris (1911) où il paracheva sa formation de pianiste et de compositeur (notamment auprès de Marcel Samuel-Rousseau). Rentré à Barcelone durant la Première Guerre mondiale, il revint à Paris en 1921 ayant surtout composé pour le piano selon une devise annonçant bien quelle sera la rareté de l'œuvre : « Recommencer. » De ces années passées en Espagne datent donc les Impressions intimes (1911-1914), les Scènes d'enfants (1915-1918), les Crèches (1914-1917), Suburbis (1916-17), les Cantos mágicos (1917-1919), les Fêtes lointaines (1920), Charmes (d'après Valéry, 1920-21), enfin les Trois Variations (1921), ainsi que les trois premiers éléments du cycle Canço i dansa (I-IV, 1921-1928). Le critique Émile Vuillermoz, découvrant cet ensemble exceptionnel, proclama le génie de Mompou et imposa son nom aux curieux des « années folles ». Mompou ne rentra en Espagne (mais définitivement) qu'en 1941. Une bonne part de sa musique naquit donc à Paris, dans l'orbite d'Erik Satie puis du groupe des Six.
Après son retour à Barcelone, Mompou confia encore au piano huit Canço i dansa, trois Paisajes (1942-1960), Cançon de cuna (berceuse, 1951), Dix Préludes (1927-1951), auxquels devait s'ajouter un onzième (1960), enfin quatre cahiers de quelque vingt pièces chacun de Música callada (« Musiques du silence », 1959-1974). Il écrivit, en outre, Cinq Chansons sur des textes de Paul Valéry (1973) ainsi que plusieurs œuvres chorales (dont un oratorio, Improperios), tendant à renouer avec la tradition grégorienne.
Cette attitude est caractéristique de l'esthétique de Mompou, soucieux de s'exprimer dans un langage hors du temps et des modes, selon la « simplicité » qui apparut comme un idéal à nombre d'artistes au lendemain du symbolisme. Mompou put se dire « primitivista », mais au sens où Gauguin aussi se voulut « primitif » : avec tout l'acquis de la culture occidentale, seule susceptible de nous faire complices de tous les vertiges et de toutes les magies. Une bonne part de l'art de Mompou a été confiée au piano dans ce but : l'instrument familier devait sonner chez lui comme nulle part ailleurs, et faire preuve de délicatesses, de nuances inouïes. Mompou supprima la barre de mesure pour donner à son mélodisme une ductilité absolue et harmonisa la ligne très pure de ses mélodies (pratiquement aucun « ibérisme » en sa musique) avec une générosité toujours naturelle mais cependant surprenante, son souci primordial restant la sonorité, enrichie notamment par des phénomènes de résonance, à la fois sollicités et dominés.
Mondonville (Jean Joseph Cassanéa de)
Violoniste et compositeur français (Narbonne 1711 – Belleville, près de Paris, 1772).
On suppose qu'il fut formé par son père, organiste de la cathédrale de Narbonne. Venu à Paris, il y publia en 1733-34 ses premières œuvres instrumentales (sonates pour violon et basse continue op. 1, sonates en trio op. 2, pièces de clavecin en sonates op. 3). Il fit un bref séjour à Lille, où il composa ses premiers motets, puis revint à Paris. À partir de 1734, il apparut au Concert spirituel, où il joua un rôle de plus en plus important, d'abord comme violoniste, puis comme compositeur. Ses motets, exécutés à partir de 1739, assurèrent sa réputation : Dominus regnavit, Jubilate Deo, Lauda Jerusalem, Venite exultemus, etc. Mais il continua à se produire comme violoniste, souvent en duo avec le flûtiste Blavet, le violoniste Guignon, la soprano Marie Fel. Le Mercure de France publia sur lui des comptes rendus élogieux. En 1752, lors de la Querelle des bouffons, il prit vigoureusement parti pour la musique française et représenta le « coin du roi ». De 1755 à 1762, il fut le directeur du Concert spirituel.
En même temps que compositeur religieux, il se révéla comme compositeur d'opéras et de ballets, et obtint deux succès importants avec le ballet héroïque le Carnaval de Parnasse (1749) et surtout avec l'opéra Titon et l'Aurore (1753), par lequel il affirma, aux côtés de Rameau, les traditions de la tragédie lyrique française. Toutefois son Thésée (1765) fut un échec : on lui reprocha d'avoir utilisé le livret de Quinault déjà mis en musique par Lully. Il composa également trois oratorios : les Israélites au mont Horeb (1758), les Fureurs de Saül et les Titans.
Dans le domaine instrumental, Mondonville réalisa d'intéressantes expériences tendant à élaborer un traitement instrumental de la voix (Concert de violon avec voix sur des textes de Psaumes, 1747). Si ses œuvres instrumentales continuent à être jouées de nos jours, c'est surtout grâce à ses motets, qui poursuivent la tradition versaillaise de Delalande, que Mondonville est passé à la postérité.
monferrine
Danse populaire du Piémont (« de l'État de Monferrato ») née dans la seconde moitié du XVIIIe siècle et introduite en Angleterre au début du XIXe à la fois comme morceau à danser et comme pièce pour piano.
Écrite à 6/8, elle s'apparente à la tarentelle. Muzio Clementi en composa dix-huit : douze parues en 1821 comme opus 49 et six restées inédites (T. WO 15-20), toutes construites par périodes de quatre mesures et toutes sauf deux de structure tripartite A-B-A ou A-B-A'.
Mongrédien (Jean)
Musicologue français (Paris 1932).
Après avoir suivi parallèlement des études de lettres et de musique, il a été lecteur à l'université de Cologne puis professeur à l'Institut français de Londres. Nommé à la Sorbonne (Paris IV) en 1973, il y occupe la chaire d'histoire de la musique française aux XVIIIe et XIXe siècles. Il a publié notamment Jean-François Le Sueur, contribution à l'étude d'un demi-siècle de musique française (1780-1830) [Berne, 2 vol. 1980], Catalogue thématique de l'œuvre complète du compositeur Jean-François Le Sueur (1760-1837) [New York 1980] et la Musique en France des Lumières au Romantisme (1789-1830) [Paris 1986].
Moniuszko (Stanisðaw)
Compositeur polonais (Ubiel, Biélorussie, 1819 – Varsovie 1872).
Il fait ses études d'harmonie et de composition au conservatoire de Varsovie et à Berlin, puis s'installe à Vilno et y enseigne la composition. En 1858, au moment du succès de son opéra Halka, il se rend à Varsovie où il séjournera jusqu'à la fin de sa vie. Il est nommé directeur de l'opéra de cette ville. Il est incontestablement considéré comme le plus grand compositeur polonais d'opéras et de mélodies. Halka, le premier opéra national polonais, le rendit célèbre, et synthétise en quelque sorte les intentions esthétiques et les moyens techniques que des compositeurs comme Elsner, Stefani ou Kamienski avaient commencé à explorer, en particulier dans leurs œuvres basées sur des livrets en langue polonaise.
Si l'influence de l'opéra italien est indéniable, notamment dans les œuvres de jeunesse que sont les opérettes comme Une nuit dans les Apennins et le Nouveau Don Quichotte, Moniuszko ne recherche pas moins un style spécifiquement polonais susceptible de toucher l'âme populaire à travers une réactualisation de ses traditions. C'est donc bien l'essence de la mythologie polonaise qui se trouve impliquée dans les opéras la Comtesse (1858-59), The Raftsman (1858), Paria (1859-1869), ou les cantates Milda (d'après un roman de J. I. Kraszewski) et Nijola.
Plus globalement, Moniuszko n'a cessé de s'adresser, à travers son œuvre, au tempérament musical polonais, notamment dans ses mélodies (12 fascicules d'environ 400 chants qui connurent un vif succès auprès des couches moyennes de la société polonaise). Tandis que Chopin dépasse toute spécificité nationale, Moniuszko peut prétendre représenter, au cœur même de son pays, la Pologne du XIXe siècle. Sa popularité fut telle que soixante-dix mille personnes assistèrent à ses funérailles.