Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
B

Bériot (Charles Auguste de)

Violoniste et compositeur belge (Louvain 1802 – Bruxelles 1870).

Autodidacte, il était déjà en pleine possession de sa technique quand il rencontra Viotti en 1821 ; celui-ci le fit entrer dans la classe de Baillot, au Conservatoire de Paris. Puis une tournée triomphale en Angleterre établit sa renommée. Après la révolution de 1830, Bériot fit de nouvelles tournées avec la cantatrice Maria Malibran qu'il épousa en 1836. Il devint aveugle et paralysé après 1858. Son art élégant, qu'il transmit à ses disciples, notamment Henri Vieuxtemps, à travers son enseignement au conservatoire de Bruxelles (1843-1852), se retrouve dans ses compositions, par exemple ses 9 concertos pour violon. Il a écrit une Méthode de violon en 3 parties (1858) et a collaboré à des ouvrages de son fils Charles Wilfrid (1833-1914) sur l'accompagnement au piano.

Berkeley (sir Lennox)

Compositeur anglais (Boars Hill, Oxford, 1903 – Londres 1989).

Après des études à l'université d'Oxford, il décida de se consacrer à la musique et séjourna, de 1927 à 1932, en France, où il travailla avec Nadia Boulanger, se lia d'amitié avec Francis Poulenc et se convertit au catholicisme. Il chercha aussi conseil auprès de Maurice Ravel et tira de cette formation et (peut-être) de son ascendance françaises un goût marqué pour l'élégance et la clarté, pour la forme et la concision. De 1946 à 1968, il a enseigné la composition à la Royal Academy of Music de Londres. Berkeley est un des compositeurs les plus respectés en Angleterre. Sa réputation s'est d'abord fondée sur des œuvres à effectifs réduits, comme la Sérénade pour cordes op. 12 (1938) ou le Divertimento op. 18 (1943), sa première grande réussite. Il aime l'intimité et a beaucoup composé pour des formations de chambre : son trio pour cor, violon et piano op. 44 (1954), conçu pour Dennis Brain, est particulièrement remarquable, et on lui doit aussi un trio à cordes (1943) et trois quatuors à cordes (1935, 1942 et 1970). Sa musique pour piano est également importante (sonate op. 20, 1943). Comme son contemporain et ami Britten, Berkeley éprouve un vif penchant pour la voix : il a composé plusieurs cycles de mélodies, parmi lesquels les 4 Sonnets de Ronsard op. 40 (1952), les 4 Sonnets de Ronsard op. 62 pour ténor (1963), à la mémoire de Francis Poulenc, et, surtout, les 4 Poèmes de sainte Thérèse d'Avila op. 27 pour contralto et cordes (1947) : cette dernière page, sans doute son chef-d'œuvre, fut destinée à Kathleen Ferrier. Ayant souffert de l'étiquette de miniaturiste, Berkeley a su montrer une autre forme de son talent dans ses concertos ­ pour piano op. 30 (1947), pour 2 pianos op. 34 (1948), pour violon op. 59 (1961) ­ , dans Dialogue pour violoncelle et orchestre op. 79 (1970), ainsi que dans ses quatre symphonies op. 16 (1940), op. 51 (1956-1958), op. 74 (1969) et op. 94 (1976-77). Il a moins réussi dans ses opéras Nelson op. 41 (Londres 1954), A Dinner Engagement op. 45 (Aldeburgh, 1954), Ruth op. 50 (Londres, 1956) et Castaway op. 68 (Aldeburgh, 1967), mais a écrit de belles œuvres religieuses, dont le Stabat Mater op. 28 (1947), la Messe a cappella op. 64 (l964) et le Magnificat op. 71 (1968).

Berlin (école de) , appelée également école de l'allemagne du nord (Norddeutsche Schule)

Expression désignant les musiciens qui, de 1740 à 1786 environ, furent attachés à la cour du roi de Prusse Frédéric II, à Potsdam.

Il s'agit notamment de Johann Gottlieb et Carl Heinrich Graun, Johann Joachim Quantz, Carl Philipp Emanuel Bach, Franz Benda, Johann Friedrich Agricola, Christian Friedrich Carl Fasch, Johann Friedrich Reichardt, Johann Philipp Kirnberger, Christoph Nichelmann. Leurs œuvres reflètent les goûts musicaux de leur souverain, lui-même flûtiste et compositeur, et s'inscrivent dans le courant des lumières (Aufklärung).

   Les deux principales institutions musicales à la cour de Frédéric II étaient l'orchestre et l'opéra. Dans le domaine orchestral, l'apport de C. Ph. E. Bach fut le plus important avec une vingtaine de symphonies marquées par un grand souci d'expression. La musique instrumentale consistait surtout en concertos et en sonates. La musique pour clavier fut illustrée par C. Ph. E. Bach (6 Preussiche Sonaten, 1742, qui influencèrent Haydn, notamment), J. Ph. Kirnberger (fugues pour clavier), C. H. Graun (concertos pour clavier) et Ch. F. C. Fasch, second claveciniste de la cour aux côtés de C. Ph. E. Bach (concertos et sonates pour clavier). Le violon fut représenté par J. G. Graun et par F. Benda (concertos, sonates). Un grand nombre de membres de la famille Benda furent violonistes au service du roi. Quant à la flûte (instrument préféré de Frédéric II), elle trouva en J. J. Quantz l'un de ses plus grands virtuoses en même temps que l'un de ses meilleurs compositeurs. Auteur de 150 sonates et de 300 concertos, il fut le premier musicien important à écrire spécifiquement pour la flûte traversière.

   Dans le domaine lyrique, citons les 33 opéras de C. H. Graun, dont certains furent composés sur des livrets du roi. Les intermèdes d'Agricola, tels que Il Filosofo convinto in amore (1750), furent représentés avec grand succès. En 1759, après la mort de C. H. Graun, Agricola devint directeur musical de l'Opéra royal. J. F. Reichardt écrivit environ une trentaine d'opéras dont Andromeda (1787, 1re représentation à Berlin, 11 janvier 1788). Enfin, les principaux compositeurs de lieder furent C. Ph. E. Bach, Reichardt, Agricola, Nichelmann et Kirnberger.

   À cette époque, Berlin était également célèbre parce que s'y élaboraient les théories musicales. Outre les traités bien connus de J. J. Quantz (flûte) et de C. Ph. E. Bach (clavier), les théoriciens les plus importants furent Nichelmann, Kirnberger et surtout Friedrich Wilhelm Marpurg, qui fut également directeur et fondateur de périodiques.

Berlin (histoire de la vie musicale à)

Au début du XVIIe siècle, Berlin entra dans l'histoire de la musique avec des musiciens tels Johannes Eccard et Nikolaus Zangius, maîtres de chapelle à la cour du prince électeur. La musique protestante fut représentée dans la première moitié du XVIIe siècle par Johann Crüger. Pendant la guerre de Trente Ans, l'activité musicale connut un ralentissement comme dans le reste de l'Allemagne. En 1701, Berlin prit rang de résidence royale. C'est sous le règne de Frédéric II (1740-1786) que la ville devint un foyer musical important, les artistes se partageant entre la capitale de la Prusse et le séjour royal de Potsdam. On y rencontre Johann Joachim Quantz, Carl Philipp Emanuel Bach, les Benda, Carl Heinrich et Johann Gottlieb Graun, Johann Friedrich Reichardt, Christoph Nichelmann, Johann Philipp Kirnberger, Friedrich Wilhelm Marpurg et Carl Friedrich Zelter. Les compositeurs de l'école de Berlin se sont illustrés dans les domaines de la symphonie, de la musique instrumentale, du lied et de l'opéra. En 1742 fut inauguré l'Opéra royal Unter den Linden ou Hofoper (Opéra de la Cour). Berlin était également réputé à cette époque comme centre de théorie musicale.

   Au XIXe siècle et dans la première moitié du XXe régna une activité intense : les orchestres, les sociétés chorales, les académies de musique religieuse, les opéras et les écoles de musique se multiplièrent, en particulier, de 1800 à 1832, sous l'impulsion de Zelter. La musique orchestrale se développa particulièrement dans la seconde moitié du XIXe siècle. De nombreuses formations furent créées : la Musikausübende Gesellschaft, fondée par Johann Philipp Sack en 1752, l'Orchestervereinigung Berliner Musikfreunde, devenue ensuite le Berliner Orchesterverein, le Königliches Hoforchester, devenu ensuite la Staatskapelle, qui compta parmi ses chefs Felix Weingartner et Richard Strauss, et, enfin, l'Orchestre philharmonique de Berlin qui, fondé en 1882, est considéré depuis plusieurs dizaines d'années comme l'un des meilleurs orchestres du monde ; il a eu notamment pour chefs Hans von Bülow (1887-1892), Arthur Nikisch (1897-1922), Wilhelm Furtwängler (1922-1945 et 1947-1954), Sergiu Celibidache (1945-1947) et Herbert von Karajan (depuis 1954). Au XXe siècle, sont venus s'ajouter les orchestres de la radio : Berliner Rundfunk pour Berlin-Est, Nordwestdeutscher Rundfunk et RIAS pour Berlin-Ouest. L'Orchestre RIAS a connu une période de grande notoriété quand Ferenc Fricsay en était le directeur (1948-1954).

   Parmi les sociétés chorales figurent le Chœur philharmonique, le Chœur de la cathédrale Sainte-Hedwige et la célèbre Singakademie, fondée, en 1791, par Christian Fasch et dirigée ensuite par Zelter ; c'est avec le concours de cette formation que Mendelssohn dirigea, en 1828, la Passion selon saint Matthieu de Bach, tombée dans l'oubli depuis près d'un siècle. Les académies de musique religieuse les plus importantes sont l'Akademie für Kirchenmusik, fondée en 1822, la Gesellschaft zur Förderung der kirchlichen Tonkunst et le Caecilienverein.

   Plusieurs grandes scènes d'opéra ont valu à Berlin sa renommée dans le domaine lyrique. Inaugurée en 1742, la Hofoper a vu la création du Freischütz de Weber en 1821 et l'opposition entre les partisans de cette œuvre de style nouveau et ceux du style de Spontini, qui était alors directeur musical du théâtre. Les Joyeuses Commères de Windsor de Nicolai y furent créées en 1849. Baptisée, après 1918, Staatsoper (Opéra d'État), cette scène a eu pour intendants ou directeurs de la musique Richard Strauss, Felix Weingartner, Karl Muck, Max von Schillings, Heinz Tietjen. Les créations de Wozzeck d'Alban Berg (1925), Christophe Colomb de Milhaud (1930), Das Herz de Pfitzner (1931) et Peer Gynt de Egk (1938) s'y sont, entre autres, déroulées. Située dans l'ancien secteur Est, la Staatsoper a eu pour directeurs musicaux, après la guerre, Franz Konwitschny (1955-1961) et Otmar Suitner, de 1964 à 1975.

   Le Deutsches Opernhaus, inauguré en 1912 et appelé après 1918 Städtische Oper (Opéra municipal), a compté parmi ses intendants Carl Ebert et parmi ses directeurs musicaux Bruno Walter et Ferenc Fricsay. Détruit en 1944, lors d'un bombardement aérien, il a repris en 1961 le nom de Deutsche Oper.

   Inaugurée en 1924, la Kroll Oper devint rapidement célèbre par son orientation très particulière ; notamment sous la direction d'Otto Klemperer (1927-1931), ce fut un théâtre de créations (opéras de Hindemith, etc.) et une scène d'avant-garde en ce qui concerne les décors et la mise en scène du répertoire. Une position comparable, dans le domaine de l'interprétation scénique, a été occupée après la dernière guerre par la Komische Oper, qui, ouverte en 1947, a appuyé sa célébrité sur les mises en scène de son intendant Walter Felsenstein.

   Dans le domaine de l'enseignement de la musique, les institutions les plus importantes sont l'université, où ont professé Philipp Spitta et Arnold Schering, la Hochschule für Musik, fondée en 1869, le conservatoire municipal (autrefois Stern'sches Konservatorium), le conservatoire Klindworth-Scharwenka, l'Institut für Musikforschung et la Berliner Kirchenmusikschule.