Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
A

Augustin (saint)

Père de l'Église, évêque d'Hippone (Tagaste, Est algérien, 354 – Hippone, auj. Annaba [Bône], 430).

Il intéresse l'histoire de la musique par la place qu'il accorde à celle-ci dans ses spéculations symboliques (Enarrationes super psalmes) et par son traité De musica. Malgré son titre, les six livres de ce dernier traitent surtout de métrique et de rythmique poétique. Sans doute constituaient-ils la première partie d'un ouvrage inachevé, dont une seconde partie aurait été probablement consacrée à la mélodie. Saint Augustin a été le premier à relier la musique à l'idée d'amour, principalement d'amour de Dieu (cantare amantis est). Son commentaire sur les longues vocalises de l'alleluia (jubilus), considérées comme une expression de joie si intense qu'elle en déborde les possibilités de la parole, est resté justement célèbre. Il a joué un rôle important dans la formation d'une culture chrétienne et, dans tout l'Occident, son influence s'est exercée jusqu'à la Renaissance.

aulos (pluriel : auloi)

Terme général pour désigner un instrument à vent employé par les Grecs et les Romains.

Formé à l'origine d'un roseau, l'aulos fut ensuite fait en bois, en métal ou en ivoire. C'était une sorte de chalumeau commun à plusieurs civilisations antiques : Sumer, Babylone, l'Égypte. Les céramiques grecques, du VIIIe au IVe siècle av. J.-C., représentent de nombreux instruments, très souvent faits de 2 tuyaux ; l'un d'eux, plus grave, servait de basse et l'autre de chant. Le nombre de trous pouvait varier de 4 à 15, selon les époques.

   On observe 2 sortes d'auloi : les auloi à embouchure de flûte, parmi lesquels on trouve le monaulos, ou flûte droite, et la syrinx, ou flûte de Pan, à plusieurs tuyaux, très répandue ; et les auloi à anche double qui ont une tessiture plus grave.

   Certains auloi avaient des fonctions précises : le plus petit, ou parthenos, accompagnait les funérailles ou les sérénades ; le païdikon accompagnait les fêtes et les banquets ; le kitharisteros était joué dans les tragédies ; le teleios accompagnait les « pean » ; enfin, l'hyperteleios, le plus grave, accompagnait les libations aux dieux.

   Les auloi étaient non seulement des instruments orgiastiques, mais aussi des instruments très utilisés dans les grands concours musicaux. Bien que n'ayant pas un son très puissant, ils pouvaient être utilisés pour marquer la cadence des rameurs ou faire défiler les gymnastes ou les soldats, car le son en était pénétrant. Il semble que l'aulos double devait toujours faire entendre deux sons à la fois, car il était impossible à l'aulète de souffler dans un seul tuyau sans souffler dans l'autre. Dans les comédies d'Aristophane, on joue de l'aulos durant les intermèdes. On disait que les dieux de l'Olympe avaient peu de goût pour l'aulos, car il appartenait à Dionysos, aux silènes et aux ménades.

Auriacombe (Louis)

Chef d'orchestre français (Pau 1917 – Toulouse 1982).

De 1930 à 1939, il apprend le violon et le chant à Toulouse, ville à laquelle il demeurera attaché toute sa vie. D'abord violoniste à l'Orchestre radio-symphonique de Toulouse, il apprend la direction d'orchestre à partir de 1951 auprès d'Igor Markevitch, dont il sera l'assistant de 1957 à 1968. En 1953, il fonde l'Orchestre de chambre de Toulouse, composé d'une vingtaine de cordes. Vivaldi et d'autres compositeurs baroques sont l'essentiel du répertoire de son ensemble, qui grave plusieurs disques. Il dirige souvent des orchestres d'étudiants de haut niveau, au Conservatoire de Paris et au Mozarteum de Salzbourg. Il crée aussi des œuvres d'Ohana et, en 1970, donne la première américaine de Ramifications de Ligeti. Gravement malade, il abandonne ses activités en 1971.

Auric (Georges)

Compositeur français (Lodève 1899 – Paris 1983).

Il fait ses études au conservatoire de Montpellier, puis à celui de Paris, où il est l'élève de G. Caussade pour le contrepoint et la fugue, et se lie avec Honegger et Milhaud ; à la Schola cantorum, il suit les cours de composition de V. d'Indy. Il admire Satie, Stravinski et Chabrier. Ce n'est pas par hasard que Cocteau lui dédie, en 1919, le Coq et l'Arlequin, véritable manifeste de l'esprit nouveau placé sous la houlette de Satie : membre du groupe des Six, Auric est sans nul doute le plus authentique représentant de l'esprit contestataire, voire provocateur, qui anime ces musiciens. Plus tard, il accède à de hautes fonctions officielles : président de la S. A. C. E. M. (1954), administrateur général de la réunion des théâtres lyriques nationaux (1962-1968) ; il devient aussi membre de l'Institut, en 1962. Mais il ne se coupe jamais de la création vivante et, avec une inlassable curiosité, sait se tenir au courant des tendances les plus avant-gardistes.

   La peur de se prendre au sérieux engendre le ton désinvolte d'Auric, sa verve, son ironie, qui s'expriment à travers un langage clair, concis. Le compositeur aime travailler en étroite relation avec les autres arts, d'où un goût marqué pour la musique de scène (Malbrough s'en va-t-en guerre de Marcel Achard, 1924 ; le Mariage de M. Le Trouhadec de Jules Romains, 1925 ; les Oiseaux d'Aristophane, 1927 ; Volpone de Ben Jonson, 1927, etc.), les ballets et la musique de film. Étroitement mêlé au second souffle des Ballets russes, il compose pour Diaghilev les Fâcheux (1924), les Matelots (1925), la Pastorale (1926). Plus tard, le Peintre et son modèle (1949), Phèdre (1950), Chemin de lumière (1952) révèlent la seconde manière d'Auric, puissamment vivante et tragique ; ce sont presque des œuvres de théâtre, « car Auric considère et traite les ballets comme des opéras où la danse tient le rôle du chant » (A. Goléa). Dans la musique de film, il voit une occasion de rappro chement avec le grand public, une expérience novatrice, peut-être un moyen de renouer avec l'idée de « musique d'ameublement » chère à Satie. Dans ce domaine, le Sang du poète (1931), écrit pour Cocteau, précède une quarantaine de partitions, dont À nous la liberté (René Clair, 1932), l'Éternel Retour (Cocteau, 1943), la Symphonie pastorale (Delannoy, 1946), la Belle et la Bête (Cocteau, 1946), les Parents terribles (Cocteau, 1946), Orphée (Cocteau, 1950), Moulin-Rouge (Huston, 1953). Parallèlement, dans sa musique instrumentale, il sait retrouver les ressources du contrepoint et manifeste son sens aigu de la construction, en particulier dans la Sonate pour piano en fa majeur (1931) et la Partita pour 2 pianos (1955), conjonction de Satie et de Schönberg, méditation sur l'écriture sérielle. La série tardive des Imaginées (1965-1973) témoigne d'une réflexion sur les possibilités et la signification de la musique pure.