Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
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Ropartz (Joseph Guy Marie)

Compositeur français (Guingamp, Côtes-du-Nord, 1864 – Lanloup, Côtes-du-Nord, 1955).

Il commenca à travailler la musique tout en faisant ses études de droit. Obtenant sa licence à Rennes en 1885, il entra la même année au Conservatoire de Paris dans les classes de Dubois, de Massenet, puis dans celle de Franck, dont l'influence sur toute son œuvre restera fondamentale. Il se lia alors d'amitié avec Albéric Magnard et Vincent d'Indy, et fréquenta Chabrier, Fauré, Dukas, Duparc, Chausson, Messager. Il mena parallèlement des activités musicales et littéraires, publiant notamment les recueils Adagiettos (1888), Modes mineurs (1890), les Muances (1892) et, en collaboration avec L. Tiercelin, le Parnasse breton (1899), ainsi que les Notations artistiques (1891), récit de son voyage de Paris à Stockholm en passant par Bayreuth. En 1894, il devint directeur du conservatoire de Nancy, puis, en 1919, de celui de Strasbourg, ce qui l'amena à repenser les problèmes de l'enseignement musical et à jouer un rôle important dans la diffusion de la musique française contemporaine. En 1929, il se retira dans son manoir de Lanloup.

   Les sources premières de son inspiration musicale furent sa foi religieuse (3 messes, un requiem, psaumes, motets, nombreuses pièces d'orgue), et sa Bretagne natale (les Landes, 1888 ; Dimanche breton, 1893 ; la Chasse du prince Arthur, 1912 ; le drame lyrique le Pays d'après l'Islandaise de Ch. Le Goffic, 1910). Il a également rassemblé des cantiques en langue bretonne (Kanovenno santel). Mais, dans ses œuvres, il préfère souvent recréer des thèmes folkloriques plutôt que de les citer. Par goût et par formation, il a privilégié des œuvres d'écriture complexe et d'architectonique savante (5 symphonies, 6 quatuors à cordes), ce qui a donné à sa musique une réputation d'aridité. Mais il apparaît aussi comme un miniaturiste de talent, en particulier dans ses nombreuses mélodies (les Heures propices, 1927).

   Pénétré de l'esprit franckiste, il a su dégager sa propre personnalité en se montrant éclectique dans ses goûts, comme le prouve notamment son admiration pour Debussy. Après la mort d'Albéric Magnard, il orchestra deux actes de son opéra Guercœur.

Roquin (Louis)

Compositeur français (Aulnay-sous-Bois 1941).

Élève du Conservatoire de Paris de 1962 à 1969 (trompette, harmonie, contrepoint), il a effectué un stage au Groupe de recherches musicales (1969-70) et un autre avec Henri Pousseur, et a étudié avec Pierre Schaeffer (classe de musique fondamentale appliquée à l'audiovisuel) et Jean-Étienne Marie (Schola cantorum). On lui doit notamment Ricercare II, pour 8 pistes magnétiques et instruments (1971) et III (musique électroacoustique et symphonique, 1971), Report, théâtre musical pour bande magnétique, rythmes gestuels, 28 triangles, 3 grosses caisses, cymbales et gong (1971), Machination, pour effectifs variables et formations libres (1973), Cicero, pour ensemble instrumental (1975), Textuel, pour voix (bande magnétique), trombone basse, jeu de cloches-tubes, 7 cloches à vaches, tôle manipulée, cristal-tôle I et II et tôle-percussion (1977), Machination III, pour 2 percussions, flûte, alto, trompette, clarinette, piano, cor, contrebasse à cordes, avec crécelles, fouets et triangles (1979), et De Concert (1985).

Rore (Cypriende)

Musicien flamand (Malines 1515 ou 1516 – Parme 1565).

Le nom de Rore paraît être la transposition latine du néerlandais Dauwens (de Rosée). Ses maîtres ne nous sont pas connus, mis à part Antoine Barbé, chef de chant à Notre-Dame d'Anvers. À peine âgé de dix-neuf ans, il quitte les Pays-Bas pour Venise et devient chantre à Saint-Marc, sous la direction d'un autre Flamand, le célèbre Adrian Willaert. De cette période vénitienne date un Premier Livre de madrigaux (1542).

   En 1547 (sans doute dès 1545), il est attaché à la cour des Este à Ferrare et y rencontre Nicolo Vicentino dont les théories sur les systèmes chromatique et enharmonique de l'Antiquité (L'Antica Musica ridotta a la moderna prattica) auront une influence déterminante sur ses œuvres.

   À la suite d'un séjour prolongé à Anvers en 1558 (où il était venu rendre visite à ses parents), il perd le bénéfice de sa charge de maître de chapelle à Ferrare. Après un court intermède au service du duc de Parme, Octave Farnèse (1561), il est choisi comme maître de chapelle à Saint-Marc de Venise, à la mort de Willaert. Mais il ne retire pas d'une telle charge tous les avantages escomptés et revient en 1564 au service du duc de Parme pour mourir à ce poste un an plus tard.

   De son vivant, de Rore a été considéré comme l'un des plus grands musiciens de son temps, d'abord comme madrigaliste (il a laissé cent quatre-vingt-dix-sept pièces à trois, quatre et cinq voix), mais aussi comme musicien d'église, où il perpétue le style de Josquin Des Prés associé à l'influence de Willaert. Dans les deux cas, son chromatisme exacerbé a fortement aidé « à libérer le chant du vieux système modal » (N. Bridgmann). Aussi bien, ses contemporains lui reconnurent un véritable rôle de chef de file, n'hésitant pas à le saluer du surnom de « Cipriano il divino ».

Rosbaud (Hans)

Chef d'orchestre autrichien (Graz 1895 – Lugano 1962).

Il étudia le piano et la composition à Francfort, et, dès le début de sa carrière de chef, montra un intérêt spécial pour la musique contemporaine. Il fut successivement directeur de l'école de musique de Mayence et chef des concerts de cette ville (1921), directeur de la musique à la radio de Francfort ­ ce qui le fit entrer en contact avec Schönberg, Webern, Berg, Bartók, Stravinski ­, directeur de la musique à Münster (1937-1941), puis à Strasbourg (1941-1944), et chef de la Philharmonie de Munich (1945-1948). De 1948 à sa mort, il dirigea l'orchestre du Südwestfunk de Baden-Baden, ce qui l'associa étroitement au festival de Donaueschingen. Il dirigea à Aix-en-Provence, dans les premières années du festival, les Noces de Figaro et Don Giovanni de Mozart, ainsi que Platée de Rameau. Il créa notamment les Quatre Chants op. 22 de Schönberg en 1933, et, l'année suivante, avec le compositeur au piano, le 2e Concerto de Bartók. Après la guerre, il créa Moïse et Aaron de Schönberg à la radio de Hambourg en 1954, puis à la scène à Zurich en 1957. À Donaueschingen, ainsi qu'aux festivals de la S. I. M. C. (dont il reçut la médaille Schönberg en 1952), il dirigea Boulez ou Stockhausen, et, en 1960, assura la création à Donaueschingen de Chronochromie d'Olivier Messiaen. Musicien précis et objectif, il ne fut pas sans influencer Boulez chef d'orchestre, et excella également dans Haydn et dans Sibelius, compositeur qu'il estimait au même titre que ceux de l'école viennoise.