Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
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Richter (Hans)

Chef allemand d'origine austro-hongroise (Raab, auj. Györ, 1843 – Bayreuth 1916).

Né d'un père maître de chapelle et d'une mère cantatrice, Josephine Csazinsky (créatrice à Vienne du rôle de Vénus de Tannhäuser), il fait partie en 1853 du chœur de la chapelle royale de Vienne et fait ses études au Konvikt Löwenburg. Au conservatoire de Vienne (1860-1865), il apprend la composition (avec Simon Sechter) ainsi que le piano et le cor, instrument qu'il pratique de 1862 à 1866 au sein de l'orchestre du Théâtre de la Porte de Carinthie.

   La rencontre à Lucerne de Wagner, chez qui il séjourne en 1866-67, est déterminante : chargé de la copie de la partition des Maîtres chanteurs pour une prochaine impression, il est nommé sur la recommandation du maître chef de chœurs puis chef d'orchestre adjoint de Hans von Bülow à l'opéra de Munich (1867-1869), avant de diriger les répétitions et la première à Bruxelles de Lohengrin (1870). Et c'est lui qui tient la partie de trompette lors de la première exécution à Tribschen de Siegfried-Idyll. Chef d'orchestre du Théâtre national de Budapest de 1871 à 1875, il est appelé à succéder à Dessoff à la tête de l'orchestre de l'opéra de Vienne en 1875. De 1875 à 1898, il dirige également les fameux Concerts philharmoniques et, de 1880 à 1890, la Gesellschaft der Musikfreunde. Wagner lui confie la direction de la première intégrale du Ring en 1876 à Bayreuth, où il dirigera régulièrement jusqu'en 1912, se retirant sur une magnifique exécution des Maîtres chanteurs.

   À partir de 1877, il prend une part prépondérante dans la vie musicale britannique, y dirigeant les premiers festivals Wagner, et ses propres concerts de 1879 à 1897, devenant directeur musical du festival de Birmingham (1885-1909) et premier chef de l'orchestre Hallé de Manchester (1897-1911), enfin en dirigeant en 1909 au Covent Garden la première intégrale en anglais du Ring. Il vient également à Paris, où il interprète pour sa première visite la Neuvième de Beethoven.

   Fervent wagnérien, Richter fut également un ardent propagandiste de la musique de Brahms et de celle de Bruckner (dont il a créé les symphonies no 1 ­ version viennoise ­, no 3 ­ version 1889 ­, nos 4 et 8), de Dvořák et d'Elgar (qui lui a dédié sa première symphonie). En revanche, il affichait le plus grand mépris pour la musique française.

Richter (Karl)

Organiste et chef de chœur allemand (Plauen 1921 – Munich 1981).

Fils d'un pasteur protestant, il accède à la musique par la religion et fait ses études à la Kreuzschule de Dresde, puis à Leipzig, auprès de Rudolf Mauersberger, Karl Straube, Gunther Ramin, et du professeur Kobler. Chef de chœur à l'église du Christ de Leipzig en 1946, organiste un an plus tard de l'église Saint-Thomas, et, en 1951, de l'église Saint-Marc, il commence à enseigner la même année à l'École supérieure de musique, dont il est nommé professeur en 1956. Fondateur du chœur et de l'orchestre Bach de Munich, il a fait de la capitale bavaroise un second Leipzig voué à la cause de Bach, interprétant et enregistrant la majeure partie de l'œuvre vocale et instrumentale (jusqu'en U. R. S. S., où il dirige en 1968 la Passion selon saint Jean et la Messe en si). Héritier d'une tradition qui s'attache plus au message spirituel qu'aux contingences stylistiques des œuvres, il la sert avec rigueur et objectivité.

Richter (Sviatoslav)

Pianiste soviétique (Jitomir 1915 – Moscou 1997).

Fils d'un compositeur organiste, qui lui donne ses premières leçons de piano, il se destine d'abord à la composition et à la direction d'orchestre. Après avoir été à quinze ans répétiteur à l'opéra d'Odessa, et chef d'orchestre assistant à dix-huit, il donne, l'année suivante, son premier récital de piano et entre, à vingt-deux ans, au conservatoire de Moscou, dans la classe de Heinrich Neuhaus. À l'orée de sa carrière, il crée, en 1942, la Sixième Sonate de Prokofiev, avec qui il va se lier d'amitié, créant par la suite la Septième, puis la Neuvième (qui lui est dédiée), dirigeant exceptionnellement Rostropovitch lors de la création en 1952 de la Symphonie concertante et publiant en 1961 un livre de souvenirs sur le compositeur. Malgré les différents trophées qu'il remporte (Concours de l'Union des Républiques en 1945, prix Staline en 1949), il n'apparaît sur la scène occidentale qu'en 1960, en Finlande, puis aux États-Unis, où il triomphe.

   Depuis lors, grâce à ses tournées régulières et à ses enregistrements, il s'est imposé comme l'un des maîtres du clavier. Musicien d'une vaste culture artistique, Richter enrichit continuellement un répertoire étendu (plus de trente concertos), mettant un point d'honneur à renouveler ses programmes. Délaissant le grand circuit international, il préfère jouer dans quelques lieux privilégiés, comme les festivals d'Aldeburgh et Spolète, ou la Semaine musicale d'Innsbruck et les Fêtes musicales de la grange de Meslay, en Touraine, qu'il fonde en 1964, et qu'il inspire directement depuis. Amateur fervent de chant et de musique de chambre, il a accompagné Élisabeth Schwarzkopf, Dietrich Fischer-Dieskau et Nina Dorliac, sa femme, David Oïstrakh et Mstislav Rostropovitch, etc. Disposant d'une palette sonore infiniment nuancée (réalisée sur des pianos choisis pour leur neutralité) et d'un jeu alliant puissance et pudeur, rigueur et liberté, il crée pour chaque œuvre le rythme intérieur approprié, toujours intensément visionnaire. Il a abordé la mise en scène lyrique en 1983.

Ricordi

Maison d'édition italienne fondée en 1808 par Giovanni Ricordi (Milan 1785 – id. 1853).

Violoniste et chef d'orchestre, par la suite attaché à la Scala comme principal souffleur et copiste, G. Ricordi s'était initié à l'édition auprès de Breitkopf & Härtel à Leipzig. La Casa Editrice Ricordi absorba bientôt plusieurs maisons rivales et prit tant d'importance que les plus célèbres compositeurs italiens du temps ­ Rossini, Bellini, Donizetti et Verdi ­ traitèrent avec elle. On doit aussi à Giovanni Ricordi la création en 1842 de l'influente Gazzetta musicale di Milano, qui vécut soixante ans. La firme renforça encore ses positions sous la direction de son fils Tito (Milan 1811 – id. 1888), qui racheta son concurrent Lucca, éditeur italien de Wagner.

   Giulio (Milan 1840 – id. 1912), fils du précédent, brillant dilettante autant qu'homme d'affaires avisé, ouvrit des succursales à Leipzig et New York tout en développant son catalogue dans deux directions : la musique contemporaine (Boito, Puccini, Ponchielli, etc.) et la musique ancienne. Il était l'ami intime de Verdi. Son fils Tito II (Milan 1865 – id. 1933) lui succéda, mais, en conflit avec les actionnaires de la firme, dut se retirer en 1919. C'était la fin d'une dynastie dont le règne absolu avait duré cent onze ans, mais non celle de son œuvre.

   Le fonds des éditions Ricordi a aujourd'hui largement dépassé 50 000 titres et ne cesse de s'accroître. En dehors des partitions, la maison Ricordi a publié de nombreux ouvrages de critique et de musicologie, plusieurs revues, un Dizionario della musica e dei musicisti (1959), une Enciclopedia della musica (1964) et même des disques.