Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
M

montre

Jeu d'orgue de la famille des principaux, dont tout ou partie de la tuyauterie se trouve placé en façade, ou « en montre ».

Cette disposition en privilégie la puissance sonore sur tous les autres jeux de fond. Les grands instruments disposent, outre une montre de 8 pieds, sonnant à l'unisson de la voix, d'une montre de 16 pieds, sinon même de 32 pieds ; quant au buffet de positif, plus petit, il est doté d'une montre de 4 pieds. L'ensemble des tuyaux ainsi montrés à l'auditoire prend le nom générique de montre. Mais les dispositions prévues par les architectes ou constructeurs de certains buffets d'orgue imposent parfois de placer en façade des tuyaux factices ; on leur donne alors, par dérision, le sobriquet de « chanoines ».

monument
ou édition monumentale

En musicologie, publication d'œuvres musicales dotée d'un apparat critique, se référant aux sources (manuscrit, première édition). Le terme « monument » est apparu dans cette acception au XIXe siècle lors de la redécouverte des « monuments de la culture », et qualifie donc la valeur des œuvres et non le volume de l'édition. Il existe deux types d'éditions monumentales, selon qu'elles se présentent sous forme de collection consacrée à une époque ou à un genre donné (par exemple, Corpus mensurabilis musicae, Denkmäler deutscher Tonkunst, Musica Britannica, etc.), ou sous forme d'édition intégrale des œuvres d'un auteur (par exemple, Neue Bach Ausgabe, Joseph Haydn Werke, New Berlioz Edition, etc.).

Moore (Gerald)

Pianiste anglais (Watford 1899 – Penn, Buckinghamshire, 1987).

Il fut l'élève du pianiste M. Hambourg à l'université de Toronto. Il regagna l'Angleterre en 1919. Une première tournée au Canada préluda à une carrière entièrement consacrée à l'accompagnement des plus grands instrumentistes et chanteurs de son temps : Y. Menuhin, E. Feuermann, E. Schumann, E. Schwarzkopf, H. Hotter, D. Fischer-Dieskau. Il a donné ses lettres de noblesse à une discipline jusque-là méprisée. Par sa compréhension intuitive des textes et la beauté de son legato, il est devenu le partenaire idéal convoité par les plus grands. Son activité de concertiste (interrompue en 1967) s'est doublée et prolongée de cours et de conférences sur l'art de l'accompagnement donnés dans le monde entier. Il en a recueilli l'essentiel en deux ouvrages : The Unashamed Accompanist (Londres, 1943) et Singer and Accompanist : the Performance of 50 Songs (Londres, 1953). Il a également écrit ses mémoires, Am I too loud ? Memoirs of an Accompanist (New York, 1962), et The Schubert Song Cycles (Londres, 1975).

Mooser (R. Aloys)

Musicologue et critique musical suisse (Genève 1876 – id. 1969).

Descendant d'une grande famille de facteurs d'orgues suisses par son père, et de mère russe, il étudie l'orgue avec Otto Barblan à Genève, puis part à Saint-Pétersbourg en 1896. Organiste titulaire de l'Église réformée française durant tout son séjour (1896-1909), il étudie la composition avec Balakirev et l'orchestration avec Rimski-Korsakov, tout en étant critique musical au Journal de Saint-Pétersbourg, périodique français. De retour à Genève en 1909, il est critique musical au quotidien la Suisse (jusqu'en 1962) et crée en 1915 les Auditions du jeudi, consacrées à la musique contemporaine, qu'il anime jusqu'en 1921. Il continue à exprimer son intérêt pour la musique moderne dans la revue musicale indépendante Dissonances, qu'il fonde en 1923 et édite jusqu'en 1946. Dans ce périodique et dans une série de publications (Regards sur la musique contemporaine, 1921-1946 ; Panorama de la musique contemporaine, 1947-1953 ; Aspects de la musique contemporaine, 1953-1957 ; Visage de la musique contemporaine, 1957-1961), il affirme ses opinions sur la musique de son temps, et son témoignage est encore, à l'heure actuelle, très précieux. Opposé, en général, aux expériences dodécaphoniques et sérielles auxquelles il préfère un genre plus traditionnel (A. Honegger, F. Martin), il admet néanmoins l'importance de compositeurs comme Berg et Webern, et reste ouvert à tous les courants. Il a, en outre, grandement contribué à notre connaissance de la diffusion de la musique européenne en Russie au XVIIIe siècle.

Moraguès (Pascal)

Clarinettiste français (Paris 1963).

Titulaire en 1979 d'un premier prix de basson au Conservatoire de Paris, il entre en 1981 à l'Orchestre de Paris, où il est, à dix-huit ans, supersoliste. Parallèlement, il donne des récitals, joue en formation de musique de chambre, fonde un quintette à vents avec ses frères et se produit également avec les Quatuors Ysaÿe, Talich, Fine Arts ainsi qu'avec les pianistes S. Richter, J.-F. Heisser, C. Zacharias, etc.

Morales (Cristobalde)

Compositeur espagnol (Séville v. 1500 – Málaga ou Marchena 1553).

Il fit ses études à Séville (Escobar, Fernandez de Castilleja, Peñalosa, Guerrero) et fut enfant de chœur à la cathédrale. Il fut maître de chapelle à Ávila (1526-1528), puis à Plasencia et Salamanque. Admis comme chanteur à la chapelle pontificale à Rome (1535) et protégé du pape Paul III, il composa des messes et des motets qui lui assurèrent rapidement la célébrité et que les éditeurs se partagèrent entre Venise, Milan, Rome, Anvers, Nuremberg, Augsbourg, Wittenberg et Lyon. Sa cantate Jubilate Deo omnis terra, commande de Paul III pour la trêve conclue entre Charles Quint et François Ier, fut chantée à Nice en 1538, et il écrivit un motet pour le cardinalat d'Hippolyte d'Este, à Rome en 1539. De retour en Espagne (1545), il fut nommé maître de chapelle de la cathédrale de Tolède (1545), puis du duc d'Arcos (1548) et de la cathédrale de Málaga (1551). Cette brillante carrière qui lui avait valu une renommée internationale devait s'achever dans la tristesse des humiliations et de la misère, alors que sa gloire ne cessait de s'étendre jusqu'au Nouveau Monde (une messe de Morales y fut la première polyphonie imprimée).

   Chef de l'école andalouse, humaniste distingué et le plus grand maître de la musique sacrée précédant la génération de Victoria, Morales unit la richesse d'une écriture polyphonique digne de Palestrina à la justesse de l'expression, dans un esprit profondément religieux, même si les thèmes de ses messes sont empruntés à des mélodies profanes (l'Homme armé) et si les textes de ses motets sont d'un ton dramatique dont il peut accuser le relief par des effets harmoniques particulièrement audacieux.