Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
R

reprise

Répétition intégrale d'une partie d'une œuvre musicale.

La reprise est souvent indiquée par une double barre de mesure, dite barre de reprise, précédée de points. Parfois, la reprise n'est pas textuelle, mais laisse place à diverses modifications (variations) qui laissent cependant reconnaissable la forme originale déjà entendue. Elle est dite, dans ce cas, reprise variée.

requiem

Premier mot de l'introït de la messe des morts (Requiem aeternam dona eis, Domine, « donnez-leur, Seigneur, le repos éternel »), et par extension l'ensemble de cette messe elle-même. On dit aussi « messe de requiem ».

   Dans la liturgie, la messe de requiem est l'une des plus complètes de l'ordo, ayant conservé des parties souvent disparues telles que la séquence (Dies Irae, composé au XIIIe siècle par Thomas de Celano, mais dont il existe des modèles dès le IXe siècle) et les versets d'offertoire et de communion. On y joint parfois aussi divers rites mortuaires tels que l'absoute, ou bénédiction du corps, avec ses chants particuliers (Libera me, In paradisum). Elle ne s'est du reste uniformisée que tardivement, vers le XVIe siècle.

   La messe de requiem a souvent été mise en polyphonie depuis le XVe siècle. Dufay (sa messe est perdue), Ockeghem, Certon, R. de Lassus, Palestrina, Victoria, etc. ont écrit des requiem. Celui d'Eustache du Caurroy, édité en 1633, a été longtemps de tradition aux obsèques des rois de France. D'un Requiem en musique mesurée écrit par J. Mauduit pour le service de « bout de l'an » de Ronsard (1586), ne subsiste qu'un fragment, conservé par Mersenne.

   Jusqu'à la fin du XVIe siècle, la messe de requiem en polyphonie ne se distingue que peu des autres pièces empruntées à l'office, et en développe le plus souvent les thèmes liturgiques sans dramatisme particulier. L'entrée en scène de l'orchestre la transforme au XVIIe siècle en matière à composition d'ampleur. Lully traite la séquence Dies Irae en motet à grand chœur. Au XVIIIe siècle, on exécute des « requiem en musique » dont chaque morceau est traité comme un « grand motet », avec symphonies, solos, ensembles, chœurs. En raison de sa longueur, il est rare que le propre y figure en entier : le compositeur fait généralement un choix variable de l'un à l'autre, mais le requiem restera jusqu'à nos jours la seule messe en musique où le propre soit habituellement intégré aux côtés du commun. Les requiem de Gilles, Campra, Mozart, sont les plus célèbres. Le Requiem de Mozart, inachevé, est l'une de ses dernières œuvres. Terminé par son élève Süssmayer, il a donné lieu à bien des légendes.

   Le romantisme a profondément transformé l'esprit du requiem. Le considérant plutôt comme un livret d'oratorio que comme un élément du culte, il en a surtout développé les parties dramatiques, centrées autour des terreurs du Jugement dernier (Berlioz, Verdi). Fauré réagira en 1888 en rendant au requiem ses dimensions de l'office et en remettant en lumière l'idée pacifiante que contient son titre même, ce que reprendra et accentuera en 1947 le Requiem de Maurice Duruflé, synthèse entre l'art de Fauré et celui du grégorien.

   Depuis le concile Vatican II, l'office des morts a perdu beaucoup de son unité, comme en témoignent des œuvres aussi diverses que les requiem de Chion (1973), de Kokkonen (1981) ou encore de Rebotier (1994).

res facta

Jusqu'au XIXe siècle, on désignait parfois ainsi, soit en latin, soit en traduction française « choses faites », toute musique d'église polyphonique exécutée sur parties notées, par opposition au « chant sur le livre », qui désignait diverses ornementations à plusieurs voix, généralement assez sommaires, improvisées par les chantres qui ne suivaient « sur le livre » que la partie principale de plain-chant non orné. On disait aussi « musique rompue », sans doute par confusion entre les mots latins facta et fracta.

reservata (musica)

Expression latine au sens non entièrement élucidé, que l'on rencontre quelquefois dans la seconde moitié du XVIe siècle, surtout en France et en Italie, à propos de musiques polyphoniques particulièrement élaborées.

Certains (Lowinski) ont voulu déduire de cette expression que ces musiques contenaient des règles secrètes d'exécution (chromatismes non écrits entre autres) connues des seuls initiés. Avec beaucoup plus de vraisemblance, il semble que l'expression signifie simplement que cette musique, à partir d'un certain degré de sophistication, cessait d'être accessible au plus grand nombre, et se voyait surtout appréciée dans les milieux spécialisés.

résolution

1. En langage harmonique, détente provoquée par le fait qu'une note dissonante, qui créait tension parce qu'elle ne s'intégrait pas à l'accord où elle se trouvait mêlée, rejoint dans le même accord ou non une position consonante qui fait cesser cette tension. La dissonance est dite alors résolue (on disait autrefois « sauvée »). Une résolution se fait normalement au « plus court chemin », la note dissonante rejoignant par la voie mélodique l'emplacement consonant le plus voisin possible ; s'il n'en est rien, la résolution est dite « exceptionnelle ». La résolution peut être retardée par l'intercalation d'autres notes si celles-ci ne laissent pas oublier la tension initiale.

   Certains accords aujourd'hui consonants (par exemple la 7e naturelle) étaient autrefois considérés comme dissonants, et par là soumis à l'obligation ci-dessus. Mélodiquement parlant, certains degrés étaient également considérés comme formant tension et par là appelant résolution (par exemple de la sensible sur la tonique). Cette obligation subsiste ou disparaît selon la manière dont ils sont aujourd'hui employés et selon qu'ils créent ou non une relative tension.

2. On appelait résolution, principalement au XVIIIe siècle, l'opération consistant à exposer d'un bout à l'autre la solution développée d'un contrepoint obligé présenté graphiquement en abrégé (par exemple, écrire en partition complète toutes les voix d'un canon dont seul était proposé l'antécédent).

résonance

L'orthographe résonnance, parfois employée, est quelque peu archaïque.

1. Pour les physiciens, la résonance, ou vibration par sympathie, est un phénomène selon lequel tout corps élastique susceptible de vibrer sur une fréquence N entre spontanément en vibration, audible ou non, lorsqu'on émet dans son entourage un son ayant soit cette fréquence N, soit une fréquence N' dont N est un harmonique proche. Cette particularité est utilisée par certains instruments (théorbe, palme des ondes Martenot, etc.) dans lesquels on dispose à proximité de la source d'émission du son des cordes dites « sympathiques » (d'où le nom de la « viole d'amour ») soigneusement accordées, mais que l'exécutant ne touche jamais : elles entrent seules en vibration le moment venu en renforçant ou modifiant la sonorité de la corde réellement jouée.

2. Pour les musiciens, la résonance est l'ensemble des phénomènes liés à la présence des harmoniques dans un son musical donné. Elle inclut donc la résonance des physiciens, mais ne se limite pas à elle. L'extension du terme découle principalement de l'usage qu'a fait Rameau, à partir de 1735 (Génération harmonique, postérieure au Traité de l'harmonie de 1722), de l'expression « résonance naturelle des corps sonores », à laquelle il rattache l'ensemble des phénomènes harmoniques qui constituent la base de l'harmonie classique. On appelle accords de résonance les accords qui reproduisent, avec un minimum d'approximations, tout ou partie de l'ensemble formé par une fondamentale accompagnée de ses harmoniques proches, ce qui donne naissance aux consonances naturelles : accords de quinte, accord parfait majeur, accords de 7e, 9e et même 11e naturelle. On appelle harmonie de résonance les systèmes harmoniques fondés sur cette superposition, sans préjudice des multiples extensions qui peuvent être apportées à ce phénomène de base (consonances analogiques, altérations, etc.) et dont l'étude analytique, aujourd'hui sérieusement entreprise, a été trop longtemps tributaire d'anciennes erreurs accumulées de Rameau à nos jours.

3. Ensemble des propriétés acoustiques d'un matériau, particulièrement en ce qui concerne la manière dont il reçoit et transmet les ondes sonores : la « table d'harmonie » d'un violon ou d'un piano est parfois dite « table de résonance ». Ensemble des qualités qui déterminent l'acoustique d'une salle, et particulièrement les phénomènes de réverbération qui amplifient ou prolongent les sons émis : dire qu'une salle a une forte résonance signifie que cette prolongation y est importante. Dire qu'elle a de l'écho n'en est pas un synonyme : la résonance désigne une prolongation sans interruption, l'écho une répétition après interruption, même si les causes sont du même ordre (réflexion du son).