Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
B

Blume (Friedrich)

Musicologue allemand (Schlüchtern, Hesse, 1893 – id. 1975).

Élève de Hugo Riemann et de Hermann Abert, il obtint en 1921 le grade de docteur à l'université de Leipzig. Nommé en 1925 professeur à l'université de Berlin, il fut directeur de l'Institut de musicologie de l'université de Kiel (1934-1958), puis président de la Société internationale de musicologie (1958-1961). Il a également dirigé la commission mixte du Répertoire international des sources musicales (R.I.S.M.) et présidé le Joseph-Haydn-lnstitut de Cologne (1955-1973). Il a édité les œuvres complètes de Michael Praetorius, écrit de nombreuses études sur Bach, Mozart, Haydn et d'autres musiciens, et dirigé plusieurs publications, dont Das Chorwerk et surtout le dictionnaire Die Musik in Geschichte und Gegenwart (14 vol., 1949-1968). Des nombreux articles écrits par lui pour ce dictionnaire, sont parus en volume séparé ceux consacrés à la Musique de la Renaissance, à la Musique baroque, à la Musique classique et à la Musique romantique.

Blüthner (Julius Ferdinand)

Facteur de pianos allemand (Falkenhain, près de Merseburg, 1824 – Leipzig 1910).

Il fonda la firme Blüthner à Leipzig en 1853. Ses instruments font appel au double échappement amélioré et au système des aliquotes où une quatrième corde, qui vibre à l'octave sans être frappée, enrichit la sonorité dans l'aigu.

Boccherini (Luigi)

Compositeur et violoncelliste italien (Lucques 1743 – Madrid 1805).

Il apprit le violoncelle, tout enfant, avec son père et devint un virtuose célèbre dès l'âge de quatorze ans, après s'être produit à Rome. Il fut ensuite engagé par le Théâtre impérial de Vienne, où il fit trois séjours de 1757 à 1764 ; de cette période date sa première œuvre connue, un recueil de six trios à cordes (1760), suivi en 1761 d'un recueil de six quatuors à cordes. En 1764, Luigi et son père rentrèrent à Lucques, où furent écrits une cantate et les deux oratorios Giuseppe riconosciuto et Gioa, re di Giuda. Après la mort de son père (1766), Boccherini s'associa avec le violoniste Filippo Manfredini et entreprit avec lui des tournées qui le menèrent, notamment, à Paris (1767). Il se produisit au Concert spirituel, mais ne fut pas invité à Versailles. Admirant autant sa virtuosité d'instrumentiste que son talent de compositeur, l'ambassadeur d'Espagne à Paris le pressa d'aller à Madrid. Boccherini accepta, mais, à son arrivée dans la capitale espagnole (1769), il fut mal reçu, dit-on, par Brunetti, responsable de la musique à la Cour. En revanche, il trouva un soutien décisif auprès du frère du roi Charles III, l'infant Don Luis, qui lui conserva sa protection jusqu'à sa mort (1785) et avec lequel il s'installa en 1776 à Las Arenas, près de Madrid.

   Au cours de ces années, Boccherini composa une très grande quantité de musique de chambre pour des formations diverses, dont une série de quintettes à cordes s'inspirant parfois de motifs espagnols. L'étonnant Quintettino op. 30 no 6 dit La Musica notturna delle strade di Madrid (1780) reflète parfaitement cette période d'expérimentation euphorique. Ayant sans doute subi l'influence des idées de Jean-Jacques Rousseau lors de son séjour à Paris, Boccherini, italien lui-même, s'intéressait à une musique « locale » au moment même où la musique italienne régnait toute-puissante ! Après avoir entendu à Madrid les quatuors op. 33 (1781), l'ambassadeur de Prusse n'eut de cesse que Boccherini ne fût attaché à son souverain. Le compositeur, à partir de 1786, envoya à Frédéric-Guillaume II, excellent violoncelliste, une quantité considérable de musique, dont 28 quintettes et 16 quatuors. Dans la famille Benavente-Osuna, avec laquelle il s'était lié, Boccherini eut l'occasion d'entendre nombre d'œuvres de Joseph Haydn et côtoya notamment Goya, le poète et dramaturge Moratin et l'écrivain anglais Beckford. Pour cette société éclairée, il composa son unique opéra, la Clementina, retrouvé en 1960.

   La vie de Boccherini de 1787 à 1796 est mal connue. On crut longtemps qu'il s'était rendu en Prusse, à la cour de Potsdam, alors qu'en fait il resta à Madrid, végétant dans une relative obscurité. À la mort de Frédéric-Guillaume II, en 1797, il proposa en vain d'envoyer de la musique à son successeur. Sous le Consulat, le poste de directeur du conservatoire de Paris lui fut offert, mais Boccherini préféra demeurer dans cette Espagne qu'il considérait presque comme sa patrie. Lucien Bonaparte, ambassadeur du Consulat à Madrid à la fin de 1800, attira sa sympathie et reçut la dédicace de deux groupes de six quintettes op. 60 et 62. Après le retour de L. Bonaparte en France, Boccherini ne vécut plus que de la vente de ses œuvres, confiées depuis 1796 à Ignace Pleyel, un éditeur qui payait fort mal. Une suite de deuils précipita la mort du musicien à Madrid. Ses cendres furent ramenées en Italie en 1927 et ensevelies en la basilique Saint-François de Lucques.

   Boccherini fut un des plus grands compositeurs de musique de chambre pour cordes et le plus grand compositeur italien de musique instrumentale de la seconde moitié du XVIIIe siècle. La maîtrise d'écriture et l'aisance formelle de ses très nombreux quatuors et quintettes passèrent pour " inexplicables " chez un héritier du baroque italien, jusqu'au jour où Hugo Riemann soutint que Boccherini avait récolté à Paris les fruits de l'école de Mannheim. Cette hypothèse confirme l'importance du musicien créateur, avec Joseph Haydn, du quatuor à cordes et initiateur du quintette, où il préfère, comme plus tard Schubert, la formule à 2 violoncelles ­ entre le rococo italien et les grands classiques viennois. À la pureté relativement abstraite de ces derniers, Boccherini, pourtant spontanément mélancolique et même dramatique comme Mozart, oppose un souci des couleurs, des trouvailles instrumentales (archet utilisé col legno, etc.) et une exceptionnelle sensibilité aux atmosphères qui font de lui l'héritier de certains traits les plus remarquables de Vivaldi. Le quintette del Fandango fait ouvertement appel au folklore. La Musique nocturne de Madrid résume un art extraordinairement en avance sur son temps : elle naît des bruits incohérents d'instruments en train de s'accorder, évolue vers des fredons populaires et des souvenirs de musiques sacrées et aboutit à une intense péroraison relevant de la plus pure tradition des danses de cour.

   Longtemps, un ravissant menuet extrait du quintette op. 11 no 5 (1771) est resté l'œuvre la plus célèbre de Boccherini, offrant de lui une image gracieuse et fragile. On découvre aujourd'hui qu'il fut un compositeur hardi, engagé, précurseur de ce qu'il devait y avoir de meilleur dans les musiques " nationales " du siècle romantique.