Serkin (Rudolf)
Pianiste américain, d'origine autrichienne (Eger, Bohême, 1903 – New York 1991).
Il fait ses études à Vienne auprès de Richard Robert (piano), de Joseph Marx et de Schönberg (composition), et débute à douze ans, accompagné par l'Orchestre symphonique de Vienne et Oskar Nedbal. La rencontre en 1920 à Berlin du violoniste Adolf Busch est déterminante pour le jeune virtuose, qui découvre en même temps Bach (avec l'orchestre de chambre Busch), la musique de chambre (en duo ou en trio avec Adolf et Hermann Busch) et, surtout, une éthique musicale héritée d'Adolf Busch, qui devient bientôt son beau-père. En dehors des nombreuses tournées qu'ils font ensemble, Serkin vit et travaille à Darmstadt (1922), puis à Bâle, où il enseigne, avant d'émigrer en 1933 en Suisse avec son maître. Il fait d'éclatants débuts américains en 1936 avec l'Orchestre philharmonique de New York, dirigé par Toscanini, et s'y installe trois ans plus tard, la guerre venue. Il est chargé de l'enseignement du piano au Curtis Institute de Philadelphie, qu'il dirigera (1968-1976), et préside aux destinées du festival de musique de Marlboro. Il a donné des cours aux collèges Williams et Oberlin et à l'université de Rochester. Ascète du piano, Serkin a peu à peu dépouillé son jeu des habits de la séduction pour mieux faire entendre le chant profond des œuvres, ciselé par un toucher lumineux et une articulation péremptoire.
Sermisy (Claudinde)
Compositeur français ( ? v. 1495 – Paris 1562).
On ne dispose d'aucune information sur sa jeunesse. On sait qu'il était, en 1508, enfant de chœur à la Sainte-Chapelle et, peu après (av. 1515), chantre à la chapelle royale. Nommé chanoine de Notre-Dame-de-la-Rotonde à Rouen, il échange cette position en 1524 contre une position similaire à Cambron près d'Abbeville. En 1532, il est déjà sous-maître de la chapelle royale et cumule, dès l'année suivante, ce poste avec celui de chanoine de la Sainte-Chapelle. Il conservera ces deux positions vraisemblablement jusqu'à sa mort, bien qu'on lui ait octroyé en 1554 la prébende de Sainte-Catherine de Troyes. Il jouissait d'une très grande réputation et ses contemporains le considéraient comme l'un des grands maîtres de leur époque, à l'égal de Josquin. Il a écrit autant de musique sacrée que profane, de qualité égale, ce qui est remarquable pour un musicien de sa génération. Il semble s'être consacré plus particulièrement à la musique sacrée à la fin de sa vie, la plupart de ses chansons ayant été écrites avant 1536. Il est, dans ce domaine, l'auteur de 12 messes environ (en général à quatre voix), dont une Messe de requiem, d'une soixantaine de motets (de 3 à 6 voix, mais surtout à 4 voix), d'une Passion selon saint Matthieu et de pièces diverses (Magnificat, fragments de messes, etc.). Ses messes sont en majorité des messes parodies. Il s'inspire souvent de ses propres œuvres, motets (Missa « Domini est terra », Missa « Tota pulchra est », etc.) ou chansons, bien qu'il utilise également des œuvres d'autres compositeurs (Missa « Voulant honneur », sur une chanson de Sandrin, par ex.). Sa Passion est une des plus anciennes passions polyphoniques qui nous aient été conservées. Le style polyphonique de ses messes et motets est bien sûr hérité de l'école franco-flamande et en particulier de Josquin (groupement des voix 2 par 2, imitations, etc.), mais il l'allège en faisant intervenir des passages plus homophoniques et en simplifiant ses mélodies, ce qui favorise la clarté du texte et trahit l'influence du style de la chanson sur sa musique sacrée. Ses chansons, en général assez courtes et à 4 voix, ont eu une vogue immédiate. Écrites sur des poèmes de François Ier, Bonaventure des Périers et, surtout, Clément Marot, elles se caractérisent par des phrases aux mélodies bien dessinées et au rythme très varié et ont souvent en commun un début homophonique, une écriture plutôt syllabique et un usage très discret du figuralisme.
Serocki (Kazimierz)
Compositeur polonais (Torun 1922 – Varsovie 1981).
Après des études au conservatoire de Ðód'z et à l'École supérieure de musique de Varsovie avec K. Sikorski, il travailla à Paris, en 1947-48, la composition avec Nadia Boulanger et le piano avec Lazare Lévy. Il se tourna tout d'abord vers le folklorisme et le néoclassicisme, écrivant dans ce style plusieurs œuvres qu'il devait plus ou moins renier par la suite : Triptyque pour orchestre de chambre (1948), Symphonie no 1 (1952), Symphonie no 2 pour soprano, baryton, chœurs et orchestre (1953), Concerto pour trombone (1953). En 1956, il participa à la création de l'Automne de Varsovie, et, peu après, fut un des premiers en Pologne à adopter le sérialisme. De son évolution à cette époque témoignent Musica concertante, pour orchestre (1958) ; Épisodes, pour 50 cordes et 6 percussions (1959) ; et, surtout, Segmenti, pour 12 instruments à vent, 5 instruments à cordes et 4 percussions (1961). Suivirent A piacere, pour piano (1962-63), inspiré du Klavierstück XI de Stockhausen, Fresques symphoniques, pour grand orchestre (1964), Continuum, pour 6 percussionnistes (1966), Forte e piano, pour 2 pianos et orchestre (1967). Parallèlement naquirent plusieurs œuvres vocales, dont Niobe, pour récitant, récitante, chœurs et orchestre (1966) et Poèmes, pour soprano et orchestre de chambre (1968-69). Au cours de sa dernière décennie, Serocki, qui n'aborda jamais l'opéra, n'écrivit que de la musique instrumentale, mettant toujours davantage l'accent sur le paramètre « timbre ». Citons notamment Dramatic Story, pour grand orchestre (1971), Fantasia elegiaca, pour orgue et orchestre (1971-72), et Pianophonie, pour piano, orchestre et live-electronic (1976-1978).
Serov (Alexandre)
Critique musical et compositeur russe (Saint-Pétersbourg 1820 – id. 1871).
Juriste de formation et de métier, il fut autodidacte en musique. Ses rencontres avec Vladimir Stassov, puis avec Glinka (1842) l'incitèrent à se consacrer activement à la musique. Mais ce n'est qu'en 1851 que débuta son activité de critique dans les revues Sovremennik (« le Contemporain ») et Pantheon. Ses premiers articles concernèrent Spontini, Mozart, Beethoven, le chant populaire russe et Glinka, dont il se fit l'exégète. Polémiste de talent, il fut en Russie un pionnier de la critique musicale « engagée ». En 1858, il envoya une violente riposte à Fétis à la suite des articles de ce dernier sur Glinka. Ayant, en 1858-59, entendu en Occident les opéras de Wagner, il s'appliqua activement à son retour en Russie à faire connaître l'art et les principes de ce maître. Il soutint, en leurs débuts, les compositeurs du groupe des Cinq, mais se brouilla avec eux par la suite. En 1867, il fonda la revue Musique et Théâtre, qui ne connut qu'une année d'existence. En tant que compositeur, Serov est passé à la postérité grâce à ses trois opéras, Judith (1862), Rognéda (1865), et la Puissance du mal (1871), qui sont chacun représentatifs d'un courant esthétique propre à l'école nationale russe : l'orientalisme et la dimension épique dans Judith, qui encouragea Moussorgski à commencer son Salammbô ; le haut Moyen Âge russe dans Rognéda, dont l'influence s'est exercée sur Rimski-Korsakov ; la critique sociale dans la Puissance du mal, qui s'inscrit dans la succession de la Roussalka de Dargomyjski. Mais les conceptions musico-dramatiques de Serov, en dépit de son admiration pour Wagner, le rapprochaient surtout du grand opéra français.