Incas (musique des)
Les témoignages qu'on a pu recueillir sur la musique des Incas et ses survivances proviennent des descendants directs de sujets anciennement soumis à la famille royale qui formaient encore, au début du XXe siècle, les quatre cinquièmes de la population du Pérou, de la Bolivie et de l'Équateur. Les flûtes en os et les antaras à six tubes jumelés, permettant les microtons, qu'on a découverts dans les sépultures précolombiennes, se retrouvent chez les peuplades de la Sierra, qui ont mis un point d'honneur à perpétuer la tradition musicale de leurs ancêtres, chants et lignes mélodiques en général sobres et mélancoliques, et dont l'esprit a su résister aux influences espagnole et noire.
Essentiellement monodique, la musique des Incas tournait autour de deux accords parfaits, majeur et mineur, situés à une tierce l'un de l'autre et parfois reliés par une note de passage. À l'intérieur du pentaphone ainsi réalisé, les Incas employaient des intervalles très variés et souvent inattendus (septième mineure ou dixième en deux sauts inégaux).
Les chants de circonstance ou de participation à un rituel, chants d'amour (harawi), d'adieu (cacharpari), de joie (haylli) ou de mélancolie qui se sont transmis oralement de génération en génération, ont conservé, en dépit de modifications inévitables, l'essentiel de ce qu'ils étaient au cœur de la civilisation qui les vit naître.
incipit
Troisième personne du singulier du verbe latin signifiant « commencer », jadis employée pour annoncer le titre d'une lecture ou d'une copie. On l'a conservée en français comme substantif pour désigner les premières paroles d'un texte littéraire ou les premières notes d'un texte musical.
India (Sigismondod')
Compositeur italien (Palerme 1582 – Modène ? 1629).
Il est né de famille noble sicilienne. On sait peu de chose sur les premières années de sa vie, sinon qu'en 1608, il se trouvait à Florence et y fréquentait le milieu de la Camerata, où il rencontra Giulio Caccini et la chanteuse Vittoria Achilei, qui interprétèrent ses œuvres. Chanteur lui-même, India publia en 1609, à Milan, le premier des cinq livres de Musiche à voix seule ou à deux voix avec basse continue. Nommé « maestro della musica di camera » à la cour de Charles-Emmanuel Ier à Turin (1611), il devait occuper ce poste jusqu'en 1623. La bibliothèque de cette ville conserve une musique incomplète pour la pastorale Zalizura. L'année suivante, India partit pour Rome, partageant son temps entre la Ville éternelle et Modène.
Bien qu'auteur de musique religieuse parmi laquelle un livre de motets à 4 voix (Venise, 1627) , Sigismondo d'India est surtout un compositeur d'arias mesurées et de monodies particulièrement expressives et accompagnées (nel Chitarrone, Clavicembalo, Arpa doppia…). Toutes œuvres qui, selon d'aucuns, égaleraient l'art de Monteverdi dans ce domaine ; Cruda Amarilli (texte de Guarini) compte parmi les plus connues. India a également composé des madrigaux à 5 voix parus en huit livres entre 1606 et 1624 , des ballets et des musiques de scène.
indienne (musique)
Élément essentiel d'une civilisation très ancienne, la musique était cultivée en Inde dès les temps préhistoriques, mais les ouvrages relatifs à la théorie musicale qui nous sont parvenus en sanskrit et qui se réfèrent fréquemment à des textes antérieurs, aujourd'hui perdus, ne nous renseignent qu'imparfaitement sur une expression complexe et étrangère aux spéculations mathématiques (tel le Gitälamkara, probablement antérieur au IIIe siècle av. J.-C.).
Hymnes et chants des Veda
Entre le XVe et le Xe siècle av. J.-C., les Veda, destinés à accompagner les rites sacrificiels, comportent des hymnes et des chants liés à une somme de connaissances capable d'étonner tous les peuples de l'Antiquité, ainsi que des psalmodies, notées en accents, en chiffres et en neumes. Ils survécurent à la période bouddhique et même à la conquête musulmane sans que leur origine ait pu être précisée en dehors des références mythologiques. « Intimement associée aux relations essentielles de l'être » (Confucius), la musique indienne ne se présenta jamais comme un divertissement profane, mais comme un moyen de servir les dieux et de s'en rapprocher, en épuisant toutes les possibilités d'une émotion donnée. Dès l'époque de l'Inde védique, les chantres et maîtres des cérémonies sacrées étaient, du reste, formés au temple dans l'étude des épopées, où les hymnes et les danses rituelles se trouvaient associés à la musique. Ces traditions vocales et instrumentales ont été ensuite conservées dans les monastères et, jusqu'à une époque très récente,
n'ont rien oublié des rapports qui leur étaient assignés avec les manifestations de la divinité suprême. Il ne manque pas, aujourd'hui même, de chants exprimant l'hommage du fidèle à cette divinité, parmi les thèmes relatifs aux sentiments de l'homme, aux cérémonies capitales de sa vie et à son respect des héros légendaires. Le kirtana, chant de gloire sur une légende de Krishna, qui s'est développé à l'époque de Chaitanya (1486-1533), en est l'exemple le plus typique avec le Bhajana, chant de louanges dont les pionniers paraissent être Jayadeva (XIIe s.), puis Purandara Dasa (XVIe s.), Vyasa Raja (XVIe s.), Kanaka Dasa (XVIe s.) et la princesse Mirabai (XVIe s.). Ce sont les derniers vestiges d'un temps où la musique vocale l'emportait sur la musique instrumentale et d'un art, populaire ou savant, marqué par une tradition vieille de 6 000 ans.
Au fil des temps
Les premiers centres musicaux ont été, en effet, les temples et les résidences princières, mais, du Ve siècle av. J.-C. au XVe siècle de notre ère, l'histoire n'a retenu que les théoriciens, un Bhoza (1010-1055), un Mammata (1050-1150) ou un Sharngadesa (1210-1247), même si chaque temple ou chaque cour princière entretenait d'éminents artistes ou des maîtres renommés. Il semble qu'à l'origine la fonction de la musique à la cour ait été essentiellement traditionnelle : endormir ou éveiller le prince, « rythmer la cadence des heures par la succession des modes mélodiques », etc. Aussi le purohita (maître de musique) devait-il posséder une connaissance approfondie des modes et des formes qui convenaient dans les circonstances les plus variées et jusque sur le char de combat pour exciter le courage des guerriers et implorer l'aide des dieux.
En dehors de la musique de soliste, voix ou instrument accompagné par un tambour, déjà célèbre par son ornementation et ses subtilités rythmiques, la principale forme d'activité fut ensuite le théâtre musical, faisant appel à des voix capables de s'adapter à toutes les exigences. Le nâtya, où le chant était inséparable de la danse, de la mimique et du décor, était présenté dans des salles prévues à cet effet et qui constituaient l'un des luxes des palais princiers pendant la période bouddhique et jusqu'aux invasions musulmanes. Si la tradition put alors se maintenir au contact d'une civilisation qui rejetait toute forme de musique, ce fut dans des régions éloignées des grands centres ou grâce à quelques souverains plus éclairés, comme Ala ud din, Shäh Jahän ou Akbar, lui-même compositeur de mélodies et qui avait à sa cour le célèbre Tänsen, dont le dernier descendant fut Wazir Khan, maître d'Allaudin Khan.
Après la conquête britannique, les musiciens perdirent rapidement le patronage que les derniers Mogols leur avaient apporté, et la musique indienne, méprisée et ridiculisée, dut attendre les travaux de Raja S. M. Tagore pour sortir de l'ombre. Les théoriciens du début du siècle, Vishnu Digambar Paluskar et Vishnu Narayana Bhatkhande, en créant des systèmes d'écriture et en fixant la forme des ragas, ont été, plus ou moins, à l'origine des collèges de musique indienne, où la grande tradition est représentée par des maîtres du dhrupad, le plus dépouillé et le plus sévère des styles de chant. Citons Nasiruddin Dagar et ses deux fils Moinuddin et Aminuddin, Faiyaz Khan, Abdul Karim Khan, Allaudin Khan (1870-1972) et son fils Ali Akbar Khan (1922), dont certains disciples, formés à Calcutta, à Berkeley ou à Los Angeles, ont déjà une carrière internationale (Sharan Rani ou Nikil Banerjee).