Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
K

Krumpholtz

Famille de musiciens tchèques.

 
Johann Baptist (Jan Krtitel), compositeur, harpiste et facteur d'instruments (Budenice 1742 – Paris 1790). Protégé par le comte Kinsky, il étudia le cor avant de se tourner vers la harpe. Après plusieurs tournées en Europe, il fut membre de la chapelle du prince Esterházy à Esterháza (1773-1776), et y reçut des leçons de composition de Haydn. De là, il se rendit à Metz, où il travailla six mois dans l'atelier du facteur d'instruments Christian Steckler (dont il devait plus tard épouser la fille), puis à Paris (févr. 1777), où il fit paraître ses cinq concertos pour harpe op. 4, 6 et 7, partiellement composés sous la tutelle de Haydn. Il fut le plus grand harpiste de son temps, songea, le premier, à employer les harmoniques et les homophones, et aida de ses conseils et de ses idées les facteurs d'instruments Nadermann et Érard. Les infidélités de sa femme, également virtuose de la harpe, le poussèrent au suicide : il se jeta dans la Seine du haut du Pont-Neuf.

 
Wenzel (Vaclav), violoniste (Budenice v. 1750 – Vienne 1817). Frère du précédent, il devint violoniste à l'opéra de Vienne (1796) et se lia d'amitié avec Beethoven, à qui il donna quelques leçons de violon et qui composa pour lui la sonate pour mandoline et piano WoO 43.

 
Anne-Marie, née Steckler, harpiste (Metz v. 1755 – Londres apr. 1824). Femme et élève de Johann Baptist, elle s'enfuit à Londres, où elle débuta en 1788, et où, entre 1791 et 1795, elle participa régulièrement aux mêmes concerts que Haydn. Son jeu était au moins l'égal de celui de son mari.

Kubelik

Famille de musiciens d'origine tchèque.

 
Jan, violoniste tchèque (Michle, près de Prague, 1880 – Prague 1940). Cet enfant prodige ­ il se produit en concert à huit ans ­ est l'élève d'un grand pédagogue, O. Sevcik, au conservatoire de Prague, de 1892 à 1898. Dès ses débuts fulgurants à Vienne, sa virtuosité lui vaut le titre de « Second Paganini ». Comme son illustre devancier, Kubelik est adulé sans mesure. À bord de son wagon-salon particulier, il parcourt l'Europe avant de conquérir les États-Unis en 1902. En 1901, il sauve l'Orchestre philharmonique tchèque d'une grave crise financière en organisant, en particulier, une tournée en Grande-Bretagne. Exemple de longévité, sa carrière ne prend fin qu'en 1940, après dix concerts d'adieu à Prague. Interprète sans pareil de Paganini, qui fit sa gloire, Kubelik composa des pièces de virtuosité, dont pas moins de six concertos, et se vit dédier nombre de pages de haute technicité, telle la Kubelik-Serenade de F. Drdla. Ses quelques incursions dans des domaines plus convaincants ont prouvé qu'il savait allier à la perfection technique une profonde intuition musicale. Il possédait deux stradivarius, de 1678 et 1715 (l'Empereur), et un guarnerius del' Gesù.

 
Rafael, chef d'orchestre suisse (Bychory 1914). Fils du précédent, il est initié par son père au violon et suit au conservatoire de Prague les cours de J. Feld (violon), O. Sin (composition) et P. Dedecek (direction d'orchestre). Il fait ses débuts avec l'Orchestre philharmonique tchèque qu'il dirige, de 1942 à 1948, après avoir été le directeur musical de l'Opéra de Brno. L'Europe occidentale le découvre en 1948, quand il dirige Don Juan à Édimbourg. Ayant quitté la Tchécoslovaquie, il devient le directeur musical de l'Orchestre symphonique de Chicago (1950-1953), puis du Royal Opera House de Londres (1955-1958). Il est, de 1961 à 1979, le directeur de l'Orchestre de la radio bavaroise qu'il retrouve en 1972 après une tentative peu concluante au Metropolitan Opera de New York. En 1985, il cesse de diriger pour raison de santé, mais retourne en 1990 en Tchécoslovaquie pour y diriger Ma patrie de Smetana. Son œuvre abondante couvre tous les domaines, du lied à l'opéra, de la symphonie au concerto. Ses musiciens de prédilection sont Mahler (il a signé une intégrale de ses symphonies) et Berlioz (avec un attachement particulier pour les Troyens qu'il a dirigés successivement à Brno, Londres et New York). Citons également Dvořák, Janáček, Bruckner, Bartók et Britten, autant de musiciens authentiquement romantiques, qui correspondent idéalement à la nature droite et spontanée de Kubelik. Privilégiant le travail en profondeur des œuvres plutôt que la gestique de direction, il s'attache à recréer et à mettre en évidence la respiration primordiale de chacune d'entre elles.

Kufferath (Maurice)

Critique musical belge (Saint-Josse-ten-Noode 1852 – Bruxelles 1919).

Il était issu d'une famille de musiciens allemands. Ses oncles, Johann Herrmann (1797-1864) et Louis (1811-1882), étaient, le premier, violoniste, le second, pianiste, et tous deux compositeurs. Élève de Mendelssohn, son père, Hubert-Ferdinand (1818-1896), s'était installé à Bruxelles en 1844 pour enseigner le piano et la composition et fut, en 1872, nommé professeur de contrepoint et de fugue au conservatoire. Maurice Kufferath étudia le violoncelle, le droit et l'histoire de l'art. Critique à l'Indépendance belge et au Guide musical (qu'il dirigea de 1890 à 1914), il fut un wagnérien passionné. Nommé en 1900 directeur du théâtre de la Monnaie, il conserva ce poste jusqu'à sa mort, mais résida en Suisse de 1914 à 1918.

Principaux écrits : H. Vieuxtemps, sa vie et son œuvre (Bruxelles, 1882) ; le Théâtre de Richard Wagner de Tannhaüser à Parsifal (6 vol., Paris, Bruxelles, 1891-1898) ; Musiciens et philosophes : Tolstoï ; Schopenhauer, Nietzsche, R. Wagner, Paris, 1899).

Kuhlau (Daniel Frederik)

Compositeur et pianiste danois (Ülzen, Allemagne, 1786 – Lyngbie, près de Copenhague, 1832).

Réfugié au Danemark en 1810 pour éviter la conscription dans les armées napoléoniennes, il s'imposa vite comme compositeur et pianiste. Attaché à la maison royale en 1813, il écrivit, outre de nombreuses sonatines pour piano et des pièces pour flûte et de musique de chambre, 1 concerto pour piano et 8 comédies lyriques, qui connurent un grand succès. Parmi celles-ci, notons Røverborgen (« le Repaire des brigands », 1814), Trylleharpen (1817), Elisa (1820), Lulu (1824), William Shakespeare (1826) et surtout Elverhøj (« le Mont des elfes », 1828), qui reste aujourd'hui encore une des œuvres les plus jouées au Théâtre royal (plus de 900 représentations). Kuhlau représente l'apogée de l'école classique allemande, avec, toutefois, quelques influences romantiques et une remarquable assimilation du style national danois de l'époque qui unit le style de l'école de Leipzig avec le matériau mélodique populaire. Pour la petite histoire, sa rencontre avec Beethoven en 1825 a laissé un canon de ce dernier, intitulé Kühl, nicht lau.