Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
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Peri (Jacopo)

Chanteur et compositeur italien (Rome 1561 – Florence 1633).

Venu très jeune à Florence, il étudie la musique avec Cristofano Malvezzi, puis commence une carrière d'organiste dès 1579 et de chanteur dès 1586. Il est sans doute, pendant cette période, en contact avec la Camarata du comte Bardi, bien qu'aucun document ne permette de l'attester. Il a déjà acquis, à cette époque, une certaine renommée pour ses qualités de chanteur, d'organiste et de compositeur. À partir de 1588, il est au service des Médicis et participe l'année suivante au divertissement de G. Bargagli (La Pellegrina), donné à l'occasion du mariage du duc Ferdinando et de Christine de Lorraine. Dans les années qui suivent, il appartient au cénacle de poètes et musiciens, dominé par E. de Cavalieri, qui se réunissent chez Jacopo Corsi et tentent d'établir un prototype de drame musical conforme à l'idéal antique des humanistes. Il y rencontre le poète Ottavio Rinuccini et de cette époque date une longue collaboration qui devait très tôt porter ses fruits. Leur première œuvre commune est la pastorale Dafne (1598), où Peri met pour la première fois en pratique sa conception du style récitatif. Deux ans plus tard, en 1600 donc, leurs efforts réunis aboutissent à Euridice (premier opéra complet de l'histoire de la musique), à laquelle G. Caccini apporte sa contribution musicale et qui est exécutée lors du mariage d'Henri IV et de Marie de Médicis.

   Peri continue, par la suite, à travailler pour les Médicis, mais en tant que compositeur plus que chanteur. Il entretient également des relations étroites avec la cour de Mantoue et en particulier avec le prince Ferdinando de Gonzague. En 1618, il est nommé camarlingo generale dell'Arte della Lana à Florence. Il ne chante déjà plus, mais continue à composer, quoique modérément, jusqu'à la fin de sa vie. La majeure partie de son œuvre a été perdue, en particulier les nombreux ballets et intermèdes composés pour les cours de Florence et de Mantoue. Sa fréquente collaboration avec M. et G. B. da Gagliano et avec Francesca Caccini a fait croire qu'il était devenu le spécialiste du style récitatif et a éclipsé ses dons musicaux réels. S'il est vrai que son récitatif convient merveilleusement bien à sa fonction narrative, Peri a d'autre part opéré avec Euridice une réforme totale du drame musical, où la musique est subordonnée au texte. Ses mélodies sont très expressives, lyriques même parfois, et il n'hésite pas à user du chromatisme et de l'ornementation pour souligner le sens de la phrase. Il donne enfin aux instruments un rôle de soutien, limité à une improvisation sur la basse continue. Peri développera d'ailleurs ce type d'écriture dans son recueil de chansons et madrigaux, Le Varie Musiche (1609) à 1, 2 et 3 voix avec basse continue. Euridice est l'aboutissement des années de recherche des cénacles florentins, et l'œuvre porte en elle le ferment du nouveau style (stile moderno) 55 55 244 que Monteverdi allait porter à sa perfection.

période (du gr. peri et odos, « chemin autour de »)

1. Par analogie avec l'analyse littéraire, on appelle souvent période, en musique, un groupement de phrases constituant un ensemble sémantique cohérent et séparé du groupement suivant par une respiration ou une ponctuation cadentielle. Pour d'autres, au contraire, la période se situe en deçà de la phrase et en constitue l'un des éléments. La terminologie en cette matière n'a jamais été fixée avec précision.

2. En physique acoustique, on appelle périodique un phénomène constitué par la répétition régulière d'éléments identiques, chacun d'eux constituant une période. Ainsi l'oscillation d'une corde vibrante est par rapport au temps un phénomène périodique.

Perle (George)

Compositeur et musicologue américain (Bayonne, New Jersey, 1915).

Auteur d'une thèse intitulée Serial Composition and Atonality (Berkeley 1962), il a enseigné de 1961 à 1984 au Queen's College de la City University of New York et pratiqué comme compositeur un sérialisme très personnel, obtenant le prix Pulitzer pour son Quintette à vent no 4 (1985). Il a publié en 1977 Twelve-tone Tonality et en 1980 et 1985 respectivement les deux volumes de The Operas of Alban Berg. Spécialiste de ce compositeur, il fut le premier à découvrir la vérité sur le troisième acte de Lulu et le « programme caché » de la Suite lyrique.

Perlemuter (Vlado)

Pianiste français (Kowno, Pologne, 1904 – Neuilly-sur-Seine 2002).

Élève du Conservatoire de Paris, où il obtient un premier prix, il apprend de Moszkowski les bases techniques du piano et de Cortot sa science du phrasé et du toucher. Ravel, qu'il rencontre en 1925 et avec qui il travaillera toute l'œuvre pianistique, lui transmet son amour de la retenue, sa haine de l'effet. Que ce soit Chopin, Fauré, Liszt, Mozart ou Ravel, ses interprétations, avec leurs vertus d'économie des moyens utilisés, de subtilité des rythmes et des nuances, d'équilibre entre conception d'ensemble et minutie du détail, sont sans doute trop secrètes pour susciter l'admiration du plus grand nombre. Tout aussi remarquable, le pédagogue a enseigné à partir de 1950 au Conservatoire de Paris, ainsi que lors de différents cours au Collège royal de musique de Londres, à l'Académie d'été de Dartington, au Canada et au Japon.

Perlman (Itzhak)

Violoniste israélien (Tel Aviv 1945).

Un an après avoir perdu l'usage de ses jambes à la suite d'une attaque de poliomyélite, il commence, à cinq ans, l'étude du violon, et donne à dix ses premiers concerts avec l'orchestre de la radio israélienne. En 1958, grâce à un concours lancé par le producteur Ed Sullivan, il passe à la télévision américaine et gagne une bourse pour continuer ses études à la Juilliard School de New York, avec I. Galamian et D. Delay. Il débute au Carnegie Hall en 1963 (avec le premier concerto de Wieniawski) et remporte l'année suivante le concours Leventritt, ce qui le fait inviter par les grandes formations américaines, le Philharmonique de New York en tête. Après une rentrée triomphale en Israël, il fait ses débuts européens à Londres, en 1968, avec le London Symphonic Orchestra, et rencontre, lors des concerts d'été de musique de chambre du Queen Elizabeth Hall, D. Barenboïm, J. Du Pré, P. Zukerman et V. Ashkenazy, avec qui il noue des liens musicaux et humains privilégiés.

   Une autre amitié, celle d'André Previn, lui ouvre les horizons du jazz : ils enregistrent ensemble plusieurs disques, dont un hommage à S. Joplin. Sur son stradivarius de 1714, Perlman interprète et enregistre les œuvres préférées de ses maîtres, Kreisler, Milstein et, surtout, Heifetz, avec qui il partage un goût immodéré pour les pièces de virtuosité et les concertos fin de siècle, ceux de Korngold et de Conus en particulier. Dans le même esprit, il enregistre en 1982 deux concertos écrits pour lui par R. Starr et E. Kim, des pièces d'un lyrisme sans prétention. Refusant un enseignement officiel et routinier, il dirige volontiers des classes dans les académies d'été américaines, à Aspen, par exemple. Comme Heifetz, Perlman détient le pouvoir de transfigurer le moindre morceau de musique en chef-d'œuvre, grâce à un phrasé d'une grande pureté et à une sonorité rayonnante.