Varnay (Astrid)
Soprano américaine (Stockholm 1918).
Fille de deux chanteurs hongrois renommés, elle étudie le chant aux États-Unis avec sa mère et Hermann Weigert. Une voix puissante et des dons exceptionnels de tragédienne l'ont orientée dès ses débuts en 1941 au Met, dans le rôle de Sieglinde, vers le répertoire wagnérien. À New York (1941-1956) comme à Bayreuth (1951-1968), elle incarne avec une ardeur bouleversante tous les emplois wagnériens (Brünnhilde, Isolde, Senta, Ortrud, Kundry), ainsi que les héroïnes de Strauss (Salomé, Elektra) et de Verdi (lady Macbeth). Nommée en 1970 professeur de chant au conservatoire de Düsseldorf, elle achève sa carrière en abordant avec intelligence les rôles de mezzo-soprano (notamment Clytemnestre).
Varsano (Daniel)
Pianiste français (Paris 1954 – id. 1988).
Installé à Los Angeles à l'âge de quinze ans, il étudie à l'Université de Californie du Sud. Il est ensuite l'élève de Pierre Sancan, de Magda Tagliaferro et de Rosalyn Turreck, et commence à jouer à Paris en 1974. Ses quelque douze années de carrière l'ont vu se produire aussi bien dans le répertoire traditionnel qu'au synthétiseur.
Vatelot (Étienne)
Facteur et restaurateur de violons français (Paris 1925).
Il se forma d'abord dans l'atelier que son père, Marcel Vatelot (1884-1970), avait fondé en 1909, puis auprès d'Amédée Dieudonné à Mirecourt, de nouveau à Paris avec Victor Quénoil et enfin à New York (1949). Il rejoignit alors son père, qui lui transmit la direction de l'atelier en 1959, non sans continuer d'y être actif jusqu'à sa mort. Expert parmi les plus demandés dans le monde, en particulier pour les instruments anciens, Étienne Vatelot a conseillé la plupart des grands solistes, et notamment, lors de leurs premières apparitions en Occident, David Oistrakh, Leonid Kogan et Rostropovitch.
vaudeville
L'origine du terme a prêté à certaines confusions entre « vau (val) de Vire », impliquant une provenance normande du genre, et « voix de ville ». La seconde hypothèse est la plus plausible : il s'agit, en effet, au début du XVIe siècle, de chansons urbaines constituées de petits couplets se chantant sur une même mélodie. La première apparition d'un « vaul de ville » se rencontre dans une « moralité » (jeu de cour) de Nicolas de la Chesnaye, la Condamnation de banquet (1507). Vers le milieu et la fin du siècle, le vaudeville s'étend aux couches supérieures de la société et va se confondre avec l'air de cour, prenant facilement un caractère grivois.
Parmi les premiers compositeurs qui publient des livres de vaudevilles ou d'airs de cour, il faut citer Pierre Certon (1552), suivi par Adrien Le Roy (Livre d'airs de cour mis sur le luth, 1571). Les premiers vaudevilles sont critiqués par du Bellay à cause de leur vulgarité. Quant à leur style musical, à l'inverse de l'écriture savante polyphonique, il adopte l'harmonisation verticale. Au XVIIe siècle, le vaudeville retourne à ses origines populaires, et une distinction entre airs de cour et vaudevilles commence à se préciser, tenant essentiellement au caractère de plus en plus satirique de ces derniers, fréquemment dirigés contre les personnages et les mœurs de la Cour. Un recueil de Ballard, la Clef des chansons (1717), rassemble 300 vaudevilles, dont certains datent « de cent ans et plus ».
Il est à noter que la tradition des vaudevilles se transmet plus oralement que par écrit. Les mélodies sont appelées « timbres ». Au début du XVIIIe siècle, les vaudevilles constituent la base musicale des théâtres populaires des foires de Saint-Germain et de Saint-Laurent. Les interdictions et les restrictions imposées par l'Académie de musique aux spectacles non officiels conduisent à des subterfuges amusants : ainsi les fameuses « pièces par écriteaux » où les acteurs auxquels il est interdit de chanter portent sur la poitrine des pancartes avec des textes satiriques, tandis que les musiciens jouent des airs de vaudevilles connus. Des spectacles de ce genre sont couramment pratiqués par Favart, père de l'opéra-comique français (auquel néanmoins un arrêté, en 1745, interdit de s'exprimer), Lesage, d'Orneval, qui ouvrent la voie à Duni, Philidor, Monsigny. Avec eux, le genre passe dans le domaine professionnel et s'officialise. L'importance historique du vaudeville, tant musicale que scénique, est donc d'avoir permis, au XVIIIe siècle, la naissance et l'évolution de l'opéra-comique.
En 1792, un théâtre du Vaudeville est ouvert à Paris par Piis et Barré. Mais, à partir du XIXe siècle, le vaudeville, tout en restant un genre comique, burlesque et de plus en plus nourri d'intrigues bouffonnes, perd ses attaches musicales folkloriques.
Vaughan Williams (Ralph)
Compositeur anglais (Down Ampney, Gloucestershire, 1872 – Londres 1958).
Artisan principal du renouveau de la musique anglaise au XXe siècle, il étudia au Royal College of Music avec Parry (1890-1892), à Cambridge (1892-1895), puis de nouveau au Royal College of Music avec Stanford (1895-96). Il se rendit ensuite pour quelques mois à Berlin, où il travailla avec Max Bruch. En 1895, il avait rencontré au Royal College of Music Gustav Holst, nouant avec lui une profonde amitié. Il réalisa que l'imitation des modèles étrangers ne le mènerait à rien, et sa personnalité se révéla au contact des chansons populaires de son pays, qu'il étudia et traita à la manière de Bartók et de Kodály en Hongrie, et de la musique élisabéthaine et jacobéenne des XVIe et XVIIe siècles.
Il parvint à maturité relativement tard, mais composa jusqu'à son dernier souffle, abordant à peu près tous les genres, des plus modestes aux plus ambitieux. En outre, il participa étroitement, pendant près de soixante ans, à la vie musicale britannique, témoignant d'un sens de la communauté rare au XXe siècle. Souvent en collaboration avec son ami Cecil Sharp, il réunit en tout plus de 800 chansons populaires (la première, Bushes and Briars, en 1903). Sa première œuvre restée dans la mémoire collective est le chant Linden Lea, pour voix et piano (1901). Suivirent notamment les Songs of Travel, d'après Robert Louis Stevenson (1901-1904), In the Fen Countries (1904) et les 3 Norfolk Rhapsodies, pour orchestre (1905-1906), et Toward the Unknown Region, pour chœur et orchestre, d'après Walt Whitman (1905-1906). De décembre 1907 à février 1908, Vaughan Williams séjourna à Paris, où il étudia avec Ravel (surtout l'orchestration). Sa période d'apprentissage prit fin avec A Sea Symphony, pour soprano, baryton, chœur et orchestre, d'après Whitman (1903-1910), et qui est, en fait, la première de ses 9 symphonies. L'œuvre fut exécutée en 1910. La même année, la Fantaisie sur un thème de Thomas Tallis consacra la célébrité du compositeur. Citons encore un quatuor à cordes en sol mineur (1908-1909), premier fruit des études avec Ravel, le cycle de mélodies On Wenlock Edge, d'après Housman (1908-1909), et une musique de scène pour les Guêpes d'Aristophane (1909).
A London Symphony (1912-1914) et l'opéra Hugh the Drover (1910-1914), qui renouvela le genre de l'opéra-ballade, sont deux œuvres à la fois ambitieuses et d'un bel élan. De la même époque date The Lark Ascending, pour violon et orchestre (1914). Après la guerre, qu'il passa en France et à Salonique, Vaughan Williams enseigna au Royal College of Music et devint directeur du Bach Choir (1920-1928). Naquirent alors de nombreuses œuvres reflétant chez lui certains traits qu'on a pu qualifier de visionnaires, et recouvrant des genres et des modes d'expression fort variés : A Pastoral Symphony (1916-1922), la messe en sol mineur pour chœur a cappella (1920-21), Flos Campi pour alto et petit orchestre (1925), l'oratorio Sancta Civitas (1923-1925), le concerto pour violon et cordes (Concerto accademico, 1924-25), le concerto pour piano (1926-1931 ; rév. 2 pianos, 1946), le Benedicite (1929), et le ballet Job (1927-1930). Il faut encore mentionner 3 opéras : Sir John in Love, d'après Shakespeare (1924-1928, créé en 1929), The Poisened Kiss (1927-1929, créé en 1936), et surtout Riders to the Sea, d'après Synge (1925-1932, créé en 1937). Cette période déboucha sur la Symphonie no 4 en fa mineur (1931-1934, créée en 1935), dont l'âpreté et la violence sont en contraste total avec la douceur modale et le folklore recréé de la Pastoral. Interrogé sur cette œuvre qui surprit, mais dont on avait pu entendre des prémisses dans les épisodes « sataniques » de Job, le compositeur eut cette boutade : « Je ne sais si j'aime ça, mais c'est ce que j'ai voulu dire. »
Suivirent notamment Dona nobis pacem, cantate pour soli, chœurs et orchestre (1936), Five Tudor Portraits, et Serenade to Music (1938), ouvrage pour 16 voix solistes et orchestre d'après Shakespeare écrit pour le jubilé de sir Henry Wood en tant que chef d'orchestre. La lumineuse Symphonie no 5 en ré majeur, créée en 1943 et dédiée « sans permission » (la Finlande et la Grande-Bretagne étaient officiellement en guerre l'une contre l'autre) à Jean Sibelius, transposa sur un plan plus abstrait le message de la Pastoral tout en faisant usage d'éléments pris dans un opéra d'après Bunyan entrepris depuis longtemps, mais qui ne devait être achevé qu'en 1949 et créé en 1951, The Pilgrim's Progress. Dans le sillage de la 5e Symphonie se situent, entre autres, Five Variants of Dives and Lazarus, pour cordes et harpe (1939), le quatuor à cordes en la mineur (1942-1944) et le concerto pour hautbois et cordes (1944).
La Symphonie no 6 en mi mineur (1944-1947, créée en 1948) est souvent considérée comme le chef-d'œuvre de Vaughan Williams. Dramatique et heurtée, elle approfondit le message de la 4e, et son finale (Epilogue), d'un bout à l'autre pianissimo (senza crescendo), est l'image même de la désolation. La Sinfonia antartica (no 7) fut entreprise en 1949, mais avant son achèvement (1952) et sa création (1953) intervinrent notamment An Oxford Elegy, pour récitant, petit chœur et petit orchestre (1947-1949), Fantasia on the Old 104th, pour piano, chœur et orchestre (1949), une Romance, pour harmonica, cordes et piano (1951) et les Three Shakespeare Songs, pour chœur sans accompagnement (1951). En 1953, Vaughan Williams abandonna le poste de premier chef d'orchestre du Leith Hill Festival, qu'il avait occupé depuis 1905 et qui lui avait permis de diriger de mémorables exécutions de Bach, en particulier de la Passion selon saint Matthieu. Dans ses dernières années, il écrivit encore la cantate de Noël Hodie (1953-54), un concerto pour tuba basse (1954), les Ten Blake Songs, pour voix et hautbois (1957), les Four Last Songs (1954-1958), une sonate en la mineur pour piano et violon (1954), et surtout la Symphonie no 8 en ré mineur (1953-1955, créée en 1956), sorte de concerto pour orchestre témoignant de l'intérêt du compositeur, dans ses dernières années, pour les problèmes de sonorité, et la Symphonie no 9 en mi mineur (1956-57, créée en 1958), d'un pessimisme assez amer.
Il coupa radicalement les ponts avec l'Allemagne et l'Italie, mais sans tomber dans le provincialisme. Au contraire, son ampleur de vue, son nationalisme intelligent, ainsi que sa parfaite connaissance et sa juste appréciation de la société britannique de son temps, dont il réussit à se faire accepter tout en s'attachant sur le plan musical à la faire évoluer à tous les niveaux, lui permirent de donner à son pays ce dont il avait le plus besoin : une tradition contemporaine profonde et authentique, et capable par là de se développer à long terme. Il reste, avant Michael Tippett, Peter Maxwell Davies, Brian Ferneyhough ou encore James Dillon, un des plus grands compositeurs qu'ait produit la Grande-Bretagne en notre siècle.