Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
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Monsigny (Pierre Alexandre)

Compositeur français (Fauquembergues 1729 – Paris 1817).

Des circonstances matérielles difficiles ne permirent pas à Monsigny d'exercer le seul métier de musicien. Après des études au collège jésuite de Saint-Omer, il prit en 1749 un emploi chez M. de Saint-Julien, receveur général du clergé en France. On ne sait rien de sa formation musicale, sinon qu'il fut quelques mois l'élève de Gianotti, contrebassiste à l'Opéra et au Concert spirituel. Plus déterminante pour son développement artistique fut la bienveillance du duc d'Orléans, chez qui Monsigny put s'ouvrir aux courants musicaux et dramatiques les plus récents. Son premier opéra, les Aveux indiscrets (1759), le plaça d'emblée au même niveau que Duni et Philidor ­ ce dernier représenta la même année son Blaise le savetier. Monsigny fut cependant moins prolifique que ses pairs, et ne fit jouer que douze opéras-comiques et un ballet héroïque, Aline reine de Golconde (Académie royale de musique, 1766). Il est encore plus remarquable de le voir abandonner la composition à quarante-huit ans, après Félix ou l'Enfant trouvé (1777), sans doute en raison d'une cécité croissante. Après avoir exercé la charge de maître d'hôtel du duc d'Orléans, Monsigny devint en 1785 inspecteur des canaux d'Orléans. La Révolution lui fit perdre ses revenus fixes et Monsigny connut la pauvreté en dépit des fréquentes reprises de ses œuvres et de leur grande diffusion à l'étranger.

   Le rythme de production relativement lent de Monsigny est probablement imputable à ses activités non musicales, car son style mélodique laisse supposer au contraire une inspiration facile et une imagination aux registres très variés. Dans la veine de l'opéra-comique traditionnel, son principal succès fut Rose et Colas (1764), sur un livret de Sedaine ; le naturel des lignes vocales y est relevé par un recours occasionnel à une écriture plus complexe (trio fugué « Mais ils sont en courroux », quintette « Ceci me paraît fort »). Mais l'originalité de Monsigny apparaît surtout dans ses œuvres à caractère sentimental, qui contribuèrent de manière décisive à l'évolution de l'opéra-comique français : le Roi et le Fermier (1762), le Déserteur (1769), la Belle Arsène (1773), Félix (1777), tous sur des textes de Sedaine.

   Une collaboration étroite avec son poète permit à Monsigny de réaliser des expériences d'une grande nouveauté, en particulier dans le domaine de la continuité musicale. Le duo entre Jenny et Richard (le Roi et le Fermier, acte I, sc. 10) est interrompu par des bruits d'orage, se prolonge par un entracte descriptif, lequel introduit à son tour le duo de Rustaut et de Charlot, au début de l'acte II. Le procédé est poussé beaucoup plus loin à la fin du Déserteur (acte III, sc. 11 à 15), où la musique nous fait passer de la prison d'Alexis à une place publique, et emporte dans un même mouvement la catastrophe et le dénouement de la pièce.

montage

Technique utilisée dans l'enregistrement sonore sur magnétophone. Elle consiste, comme au cinéma avec la pellicule photographique, à choisir et à raccorder entre elles les meilleures « prises » d'une exécution musicale pour établir une bande définitive correspondant à l'interprétation idéale de l'artiste ou de la formation enregistrée. Sur une bande magnétique défilant à 38 cm/s, une noire d'un morceau marqué andante (60 à la noire) occupe 38 cm de bande, et une double croche dans le même mouvement occupe donc 9,5 cm. C'est dire à quel point est grande la latitude d'intervention du technicien pour couper ou retoucher dans la matière sonore inscrite sur la bande. Ainsi, l'art du montage s'étant développé, on en est venu à pouvoir isoler une seule note inexacte pour la remplacer par la même, bien exécutée, empruntée à une autre prise ; ou à « nettoyer » la bande d'imperfections, de bruits parasites, etc.

   Une question se pose, cependant : la bande ainsi montée est-elle représentative de la réalité musicale d'une exécution, et ne risque-t-on pas, de la sorte, d'aboutir à une sorte de perfection abstraite et glacée, sans rapport avec la communication « à chaud » qui est le propre de l'exécution en concert ? Poussé trop loin, en effet, le montage d'épisodes et de fragments enregistrés en des moments différents mène à la création d'une sorte d'« art fictif » qui perd tout rapport avec la réalité, avec pour conséquence le désappointement de certains mélomanes discophiles lorsqu'ils se retrouvent en contact avec la musique vivante au concert ; il risque aussi de contribuer à créer de fausses valeurs artistiques d'interprètes qui donnent ainsi mieux qu'ils ne sont capables de le faire dans la continuité d'une exécution. C'est pourquoi certains musiciens préfèrent enregistrer par longues séquences, et n'en appeler au montage que pour quelques « raccords » indispensables. De même, bien des amateurs de disques, suivis en cela par les éditeurs, préfèrent aujourd'hui revenir aux prises « sur le vif », au cours de concerts publics, lesquelles, malgré leurs imperfections techniques éventuelles, sont bien davantage un témoignage de l'art des interprètes ainsi photographiés en « instantané ».

   À l'actif du montage, cependant, il faut retenir la possibilité qu'ont un directeur artistique et un ingénieur du son dotés de sensibilité musicale et de respect de l'artiste qu'ils enregistrent d'en donner un portrait sinon idéal, du moins correspondant au mieux à son art d'interprète.

Montagnana (Domenico)

Luthier vénitien (Lendinara v. 1690 – Venise 1750).

Sa vie est assez mal connue, en particulier ses années de formation. Il semblerait qu'il ait été, en fait, l'élève puis l'assistant de Matteo Goffriller, avant de travailler indépendamment à Crémone vers 1711-12, puis de s'établir définitivement à Venise en 1721. Peu de ses instruments sont signés et leur ressemblance avec certains stradivarius rend leur identification encore plus difficile. Ses altos sont encore des instruments de référence à l'heure actuelle et ses violoncelles lui valurent une renommée qui n'a pas faibli aujourd'hui. Il est considéré, avec Stradivarius et Amati, comme l'un des plus grands luthiers de cette époque.