quarte
Intervalle produit, dans la gamme diatonique, entre deux notes distantes de 4 degrés, départ et arrivée inclus.
Employé absolument, le terme désigne la quarte « juste », c'est-à-dire répondant théoriquement à la définition acoustique du rapport 4/3 correspondant aux harmoniques nos 3 et 4, différence logarithmique entre l'octave et la quinte, abstraction faite des très légères différences d'intonation introduites par les divers tempéraments. Selon les degrés où elle se présente ou les altérations dont elle est affectée, la quarte peut être juste ou déformée ; la quarte déformée (on disait jadis « fausse quarte ») peut être soit augmentée (intervalle de triton, soit 3 tons entiers, ex. fa-si), soit diminuée (1 ton entre 2 demi-tons, ex. fa dièse/si bémol). La quarte déformée est considérée comme créant une tension qui demande résolution.
L'intervalle de quarte (juste) partage avec la quinte le privilège d'être, après l'octave, la première des relations consonantiques établies par la nature dans le phénomène de la résonance : d'où son importance structurelle et sa présence d'une constance presque absolue dans la quasi-totalité des systèmes atteignant l'ambitus nécessaire, et cela à peu près dans tous les langages musicaux connus.
quartolet
Groupe de 4 notes dont la valeur est égale à celle de 3 notes de même espèce rythmique :
quatre pieds
On désigne ainsi, à l'orgue, tout jeu dont le tuyau donnant la note la plus grave (ut2) mesure approximativement quatre pieds de hauteur. Les jeux de quatre pieds (on écrit aussi 4') sonnent à l'octave supérieure de la voix humaine et contribuent à enrichir en les éclaircissant les jeux de huit pieds qui sonnent, eux, à l'unisson de la voix. Les jeux de quatre pieds les plus fréquemment rencontrés sont, dans la famille des principaux, le principal 4', dit aussi prestant 4' ; dans la famille des flûtes, la flûte 4' ; et dans la famille des trompettes, le clairon 4'. Le prestant est le jeu de référence pour l'accord de l'orgue. Par extension, on emploie la même expression de quatre pieds au clavecin, pour les jeux donnant l'octave supérieure de la normale.
quatuor à cordes
Le genre du quatuor à cordes tel que le mirent sur pied, indépendamment l'un de l'autre, mais à peu près à la même date (v. 1760-1770), Haydn et Boccherini, implique des ouvrages sans basse continue, pour 4 instruments à cordes solistes de la même famille (2 violons, alto et violoncelle), traitant ces 4 instruments avec une dignité égale et obéissant, du moins à l'époque, aux principes de ce que plus tard on devait appeler la forme sonate. Les éléments de cette définition n'apparurent pas tous avec la même force au même moment, ni au même degré dans les mêmes œuvres, et c'est Haydn, bien plus que Boccherini, qui devait les maîtriser tous, mais aucun n'est en soi secondaire.
Constitué généralement dans le troisième quart du XVIIIe siècle, le quatuor à cordes apparut alors comme un genre tout à fait nouveau, aux origines très diverses mais relativement récentes, pas plus anciennes que l'époque (1720 environ) où les différents genres instrumentaux de la musique baroque s'étaient enfin clairement différenciés les uns des autres. Le nouveau genre du quatuor à cordes naquit peu à peu à partir d'éléments bien précis de différents genres de la fin du baroque, et en synthétisant ces éléments en une nouvelle unité : ceci sans négliger les actions personnelles et décisives, dans ce contexte, de Haydn et de Boccherini.
Le quatuor à cordes prit ses racines en Italie, ainsi qu'en France et surtout en Autriche et en Bohême. Il les prit dans la sinfonia a quattro (à cause du nombre de voix, mais il y avait plusieurs instruments par voix, ou partie) et dans la sonata a quattro italiennes, plus encore dans le concerto et le concertino a quattro (dans la mesure où là on tendait vers un seul instrument par partie) : il y eut une évolution directe du concertino a quattro au quatuor concertant (où les 4 instruments sont tour à tour traités en solistes par rapport aux 3 autres) tel que le pratiquèrent, à Paris, un Boccherini et surtout un Cambini et un Viotti, et il faut citer ici, parmi les ancêtres du quatuor à cordes, les Six Quatuors (Paris, 1736) ou les Nouveaux Quatuors en six suites (Paris, 1738) de Telemann ou encore les Six Sonates en quatuors ou conversations galantes et amusantes entre une flûte traversière, un violon, une basse de viole et la basse continue (Paris, 1743) de Louis-Gabriel Guillemain.
Le quatuor à cordes prit aussi ses racines dans l'école de Mannheim, dans la mesure où ses membres distinguèrent de plus en plus nettement œuvres d'orchestre et œuvres de chambre, tout en accordant dans les deux catégories le même soin à la conduite des voix. Les œuvres des deux types furent éditées à Paris, les secondes un peu plus tard que les premières (à partir du début des années 1760), avec, d'une part, des titres comme Sei sinfonie a più stromenti ou Six Symphonies à quatre parties (op. 3 et op. 4 de J. Stamitz, v. 1757), d'autre part, des titres comme Six Symphonies ou quatuors dialogués. Ces quatuors dialogués furent le plus souvent à Paris, jusqu'à l'arrivée de Boccherini, des œuvres avec flûte et non des quatuors à cordes, mais l'idée de « dialogue », de « conversation » entre des solistes est à retenir. Le quatuor à cordes prit enfin ses racines dans le divertimento autrichien, dont relèvent les 10 premiers « quatuors » (no 0, op. 1 nos 1-4 et 6, op. 2 nos 1, 2, 4 et 6) de Haydn.
L'apparition d'une musique de chambre avec un seul instrument par partie et sans le soutien de la basse continue (à noter cependant que des éditeurs comme Hummel n'hésitèrent pas à doter d'une basse chiffrée des quatuors de Haydn postérieurs à l'opus 9) fut un des phénomènes les plus importants du début de la seconde moitié du XVIIIe siècle. À cause, notamment, du ton de confidence intime qui devait devenir le sien, le quatuor à cordes devint peu à peu synonyme de musique de chambre en soi et acquit un prestige qu'il n'a pas perdu de nos jours. Or ce prestige repose essentiellement sur les débuts de l'histoire du genre, sur la période d'un peu plus d'un demi-siècle séparant l'opus 20 de Haydn (1772) des derniers quatuors de Beethoven et de Schubert (1826). Ce n'est pas le fait du hasard. Qu'au développement du style classique et de ses structures globales dynamiques fondées sur un phénomène de dissonance par rapport à un accord parfait de trois notes ait correspondu celui d'un genre faisant appel à 4 instruments de même famille, propres à toutes les audaces d'écriture et dont l'un pouvait toujours servir de voix dissonante, est dans l'ordre des choses, tout comme l'est la concordance de la maîtrise du « style sonate » par Haydn et par Beethoven et de la position en flèche, au sein de leur musique de chambre, voire de leur production tout entière, du genre quatuor à cordes.
C'est à Vienne qu'il faut rechercher l'origine du style « quatuor à cordes » de Haydn. Le divertimento a quattro autrichien évolua, en particulier à partir de 1760, et bien qu'auparavant des exécutions à un seul instrument par partie aient été concevables, voire prévues, d'un style souvent « orchestral » à un style « de chambre » au niveau de l'écriture : évolution concrétisée par les différences chez Haydn entre, d'une part, les quatuors no 0 op. 1 et op. 2 et, d'autre part, les quatuors à partir de l'opus 9, et qu'on retrouve, avec ses ambiguïtés, chez des compositeurs comme Franz Xaver Richter, Florian Gassmann ou Jan Krtitel Vanhal. Le style « de chambre » (le style « soliste ») se définit notamment par davantage d'indépendance pour chaque partie, par une dynamique plus différenciée, par des rythmes plus variés, par des dissonances plus audacieuses, par plus de complication dans le phrasé, par une exploration plus systématique des registres très aigus ou très graves, sans oublier l'identification de la ligne de basse avec le seul violoncelle (à l'exclusion non seulement de l'ancien continuo, mais aussi de la contrebasse). Son établissement fut à l'origine d'une extraordinaire floraison de quatuors à cordes, illustrée non seulement par ceux de Haydn à partir de l'opus 9, puis par ceux de Mozart, mais par ceux d'Albrechtsberger, d'Ordonez, de Michael Haydn, de Vanhal, de Luigi Tomasini, de Dittersdorf ou d'Ignaz Pleyel.