Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
M

Mascioni

Famille de facteurs d'orgues italiens, dont la manufacture, fondée en 1829, est établie à Cuvio, près de Varese.

Les Mascioni se sont spécialisés, depuis les années 30, dans les grands instruments à traction électrique qu'ils ont construits principalement en Italie. Leur plus grande réalisation est celle de l'orgue de la cathédrale de Milan, construit avec Tamburini (5 claviers, 182 jeux ; 1938). Parmi leurs principaux instruments, il faut citer ceux de l'Institut pontifical de musique sacrée à Rome (5 claviers, 110 jeux ; 1931) et de l'abbaye de Montecassino (3 claviers, 80 jeux ; 1956).

Mason (Daniel-Gregory)

Compositeur américain (Brookline 1873 – Greenwich, Connecticut, 1953).

Petit-fils de Lowell Mason, il fit ses études à Harvard, puis à Boston (Chadwick) et New York (Goetschius), enfin à Paris (Vincent d'Indy). Professeur à l'université Columbia (New York) de 1910 à 1940, il est l'une des personnalités les plus saillantes de sa génération. Très attiré par le folklore (il a écrit un quatuor sur des thèmes populaires noirs), il affirmait que la musique américaine doit être éclectique et cosmopolite et que le compositeur doit suivre uniquement son instinct, sans se soucier de nationalisme. Il a écrit quelques œuvres orchestrales, dont 3 Symphonies, mais surtout de la musique de chambre (quatuors, « sketches sentimentaux » pour trio avec piano, sonates diverses pour violon, clarinette) et instrumentale (pièces pour piano).

Mason (Lowell)

Pédagogue et compositeur américain (Medfield, Massachusetts, 1792 – Orange, New Jersey, 1872).

S'inspirant des méthodes de Pestalozzi, il parvint à rendre l'enseignement de la musique obligatoire dans les écoles de Boston et fut chargé de diriger les cours. Il exerça, à ce titre, une influence considérable sur le développement de la musique vocale. Président de la Haendel and Haydn Society de Boston, il y fonda l'Académie de musique (1833) et organisa des réunions régulières de compositeurs et interprètes. Nommé docteur en musique ­ et le premier à se voir décerner ce grade ­ en 1835, il entreprit un voyage d'études en Europe (1837), dont il publia les conclusions dans Musical Letters from abroad (1853 ; rééd. 1967). Il a publié pendant près de quarante ans des recueils dans lesquels ses propres compositions voisinent avec des adaptations, en cantiques, de thèmes de Mozart, Beethoven, Schubert ou Cherubini (Select melodies de Gardiner). Son œuvre, modeste, comporte principalement des thèmes religieux (hymnes ou cantiques).

masque

Genre théâtral, populaire en Angleterre aux XVIe et XVIIe siècles, qui a subi au cours de son évolution les influences italienne (intermedio) et française (ballet de cour).

À partir des spectacles anglais du Moyen Âge (disguisings, mummings), le masque va devenir un divertissement de cour très complet, composé de poésie, de musique vocale et instrumentale et de décors souvent fort coûteux, agrémentés de machines scéniques. Les sujets traités sont allégoriques ou mythologiques. Comme dans le ballet de cour en France, les membres de la famille royale et de la haute noblesse participent régulièrement aux masques. Mais ils sont également représentés en dehors de la Cour comme, par exemple, le Comus de Milton créé au château de Ludlow en 1634 et pour lequel Henry Lawes a composé 5 airs.

   Au début du XVIIe siècle, deux noms sont associés particulièrement à l'évolution du masque : le poète Ben Jonson et le décorateur Inigo Jones. Puis vient le tour de sir W. Davenant et de James Shirley, l'auteur de deux masques célèbres : The Triumph of Peace (1634), musique de William Lawes, et Cupid and Death (1653), dont la partition de Mathew Locke et Christopher Gibbons est la seule qui soit conservée en entier. Après la Restauration, le masque se trouve de nouveau incorporé dans des pièces de théâtre (Dryden, Congreve), selon la tradition élisabéthaine. Ainsi Purcell compose quelques-unes de ses meilleures musiques pour ce type de spectacle, dont The Fairy Queen (1692), avec un masque à la fin de chaque acte, et The Tempest (1695), qui peuvent servir d'exemples. Enfin, au XVIIIe siècle, le titre de « masque » est parfois conservé pour lutter contre l'invasion de l'opéra italien en Angleterre. C'est le terme employé par W. Randall pour son édition de la pastorale de Haendel, Acis and Galathea/A Mask.

Massard (Robert)

Baryton français (Pau 1925).

Il a fait ses débuts à l'Opéra de Paris en 1952 (rôle du grand prêtre dans Samson et Dalila), et s'est imposé, notamment, en France et à l'étranger dans Gluck (rôles de Thoas, puis d'Oreste dans Iphigénie en Tauride) et dans Berlioz (rôle de Fieramosca dans Benvenuto Cellini). Grand interprète, également, de Verdi et de Rossini, il est professeur de chant au conservatoire de Région de Bordeaux.

Massé (Victor)

Compositeur français (Lorient 1822 – Paris 1884).

Prix de Rome en 1844, il présenta à son retour de la villa Médicis son premier opéra-comique, la Chambre gothique (1849). Il connut son premier grand succès avec Galatée (1852), et, en 1853, produisit son chef-d'œuvre, les Noces de Jeannette, un acte rustique et charmant qui devait se maintenir au répertoire jusqu'à nos jours. Il entra à l'Opéra avec la Mule de Pedro (1863), et connut son dernier triomphe à la Gaîté-Lyrique en 1876 avec Paul et Virginie. Une nuit de Cléopâtre ne fut représenté qu'après sa mort, en 1885. Il enseigna la composition au Conservatoire de 1866 à 1876.

   Son style gracieux et son écriture solide lui permirent de prolonger dignement la tradition de l'opéra-comique français, tout en annonçant discrètement une évolution rassurante du genre. On lui doit aussi de nombreuses mélodies, dont 3 recueils pleins de saveur : Chants bretons, Chants du soir, et Chants d'autrefois.

Massenet (Jules)

Compositeur français (Montaud 1842 – Paris 1912).

Dernier-né d'une famille de douze enfants, Massenet, qui haïssait son prénom au point de n'en tolérer que l'initiale, reçut d'abord une éducation de pianiste couronnée par un premier prix en 1859. Admis au Conservatoire en 1853, il dut interrompre ses études pendant l'année scolaire 1854-55 lorsque ses parents quittèrent Paris pour s'installer à Chambéry. Il se produisit plusieurs fois en concert comme pianiste, en 1858, notamment à Angers et à Tournai. Cependant, pour subvenir à ses besoins, il dut accompagner des chanteurs et tenir le triangle à l'orchestre du Gymnase, puis les timbales au Café Charles et au Théâtre-Lyrique. Élève de Reber (harmonie), de Savard (contrepoint), puis d'Ambroise Thomas (composition), il obtint en 1863 un premier prix de fugue en même temps que le premier grand prix de Rome pour sa cantate David Rizzio ; l'opinion de Berlioz aurait, semble-t-il, favorablement pesé dans le résultat du concours. Dès 1861, Massenet composa et fit éditer une Grande Fantaisie de concert sur le « Pardon de Ploërmel » de Meyerbeer, morceau qui fut détruit sur sa demande en 1900.

   Massenet séjourna à la villa Médicis pendant deux années et rédigea alors sans entrain les envois qu'il était tenu de faire : une Grande Ouverture de concert, un Requiem et des fragments lyriques, qui devinrent l'oratorio Marie-Magdeleine. Il entreprit également un opéra d'après Victor Hugo, Esmeralda. C'est à Rome qu'il fit la connaissance d'une élève de Liszt, Mlle de Sainte-Marie, qu'il épousa à son retour en France. Il profita de sa pension de lauréat pour visiter l'Italie ; il en rapporta l'inspiration des Scènes napolitaines (1864). Dès 1866, plusieurs de ses œuvres furent exécutées à Paris : outre l'Ouverture, il faut citer Pompeia, dont des fragments réapparurent dans la musique de scène des Érinnyes, et deux Fantaisies pour orchestre.

   Bénéficiant d'une nouvelle disposition qui attribuait aux lauréats de l'Institut le droit de se voir représenter un ouvrage en 1 acte sur la scène de l'Opéra-Comique, Massenet composa en quelques semaines la Grand-Tante, qui connut un petit succès en avril 1867. La partition d'orchestre en a été détruite, comme celle de Don César de Bazan, dans l'incendie de l'Opéra-Comique en 1887, mais n'a pas été reconstituée. La partition piano-chant permet néanmoins de se faire une idée de la maîtrise étonnante dont témoigne cette première tentative. Écrit pour un concours où il obtint la troisième place, l'opéra la Coupe du roi de Thulé ne nous est pas parvenu, mais la musique en a été réutilisée en partie dans d'autres ouvrages.

   Plusieurs projets d'opéra allaient voir le jour à cette époque : Manfred en 1869, resté à l'état d'ébauche, et Méduse, achevé, semble-t-il, en 1870. Malgré sa rencontre avec l'éditeur Hartmann qui allait l'encourager désormais, la situation matérielle de Massenet restait précaire : la fin de sa pension, en 1868, l'obligea à donner des leçons et à reprendre une place de timbalier au Théâtre de la porte Saint-Martin. Ralentie par le siège de Paris (il s'enrôla dans l'infanterie), puis par l'époque troublée de la Commune, son activité toujours intense reprit dès le printemps de 1871, et, s'il n'était pas satisfait de sa symphonie écrite pendant le siège, il poursuivit avec les Scènes pittoresques (1871) et les Scènes dramatiques (1873) la série de ses suites pour orchestre. Quelques semaines lui suffirent pour composer un opéra-comique en 4 actes, Don César de Bazan, représenté sans succès en novembre 1872. Cette œuvre d'un intérêt médiocre fut révisée et réorchestrée par Massenet en 1888. De cette période datent également l'Ouverture pour Phèdre et la musique de scène pour les Érinnyes, dont la valeur fut reconnue immédiatement ; mais ce fut l'exécution à l'Odéon en avril 1873 de l'oratorio Marie-Magdeleine qui assit la véritable notoriété du compositeur. Cet ouvrage de jeunesse n'est pas seulement remarquable par l'inspiration personnelle dont il témoigne, mais parce qu'il fallut peut-être attendre Manon pour que Massenet retrouvât ce langage qui lui appartient en propre. Composé en 1874, Ève, mystère en 3 parties, connut un succès aussi vif, mais, à part quelques pages, cette partition ne présentait pas de progrès notables. Parallèlement, le musicien avait concentré ses efforts sur un grand opéra en 5 actes, le Roi de Lahore, qui l'occupa de 1872 à 1877, et dont la création triomphale au palais Garnier en avril 1877 lui vaudra d'être nommé l'année suivante, à trente-six ans, professeur de composition au Conservatoire puis d'entrer à l'Institut devant Camille Saint-Saëns. Admiré par Tchaïkovski pour la clarté de son écriture, cet opéra est à l'origine la réputation dont a joui son auteur tant en France qu'à l'étranger.

   Œuvrettes de circonstance destinées à des cercles, l'Adorable Bel-Boul (1874), puis Bérangère et Anatole (1876) ont été détruites par le compositeur qui tenait à conserver sa réputation de « musicien sérieux ». Si la Vierge (1878), légende sacrée en 4 scènes, méritait mieux que le froid accueil qui lui fut réservé en 1880, Hérodiade, représenté en 1881 au théâtre de la Monnaie de Bruxelles, renouvela le triomphe du Roi de Lahore, mais cet ouvrage plus personnel marquait une étape autrement importante dans l'évolution du musicien de théâtre. Hérodiade fut repris à Paris en 1884, mais en italien, au Théâtre-Italien.

   Après les Scènes de féerie, Massenet composa, sous le titre de Scènes alsaciennes, sa septième et dernière suite d'orchestre, la plus connue. Désormais, il allait s'occuper presque exclusivement d'opéra, mais il continua à produire régulièrement des mélodies qui, en se répandant dans les salons, faisaient beaucoup pour asseoir sa notoriété et constituaient une source appréciable de revenus. Toutes ne sont pas d'un égal intérêt, parce que Massenet avait besoin, dans sa musique, des contrastes offerts par les situations dramatiques. Certaines, pourtant, sont d'incontestables réussites. Sur les 285 qu'il a laissées, un certain nombre sont rassemblées en cycles : Poème d'avril (1866), Poème du souvenir (1868), Poème pastoral (1874), Poème d'octobre (1876), Poème d'amour (1879), Poème d'hiver (1882), Poème d'un soir (1895) ; 25 ont été dotées par le compositeur d'un accompagnement orchestral.

   Après avoir délaissé au moins trois projets d'opéras : Robert de France (1880), les Girondins (1881), Montalte (1883), Massenet eut lui-même l'idée de demander une Manon à Meilhac, et, pour éviter toute modification, il apporta la partition gravée à la première répétition. Les coupures que l'on fait subir ordinairement à cet ouvrage, et qui en brisent l'équilibre en en déformant l'esprit, prouvent rétrospectivement que l'auteur était conscient d'avoir construit une œuvre exemplaire, d'une rare cohérence dans la diversité des procédés utilisés. Vers cette époque, il avait demandé à Zola l'exclusivité de la Faute de l'Abbé Mouret, mais ce projet n'eut pas de suite. Avec le Cid (1884-85), Massenet démontra une nouvelle fois son aptitude à changer de ton et à conserver les formes du grand opéra en les vidant de leurs poncifs. Werther (1885-1887), dont le projet remontait à 1878, lui offrit cependant un cadre plus intime dans lequel il retrouva la meilleure part de son invention. Créé à Vienne en 1892, en allemand, Werther fut donné à Paris en 1893 avec un succès très relatif. Le chromatisme de ce nouvel ouvrage pouvait faire penser que Massenet, qui s'était rendu à Bayreuth en 1886, avait subi l'influence du maître des lieux ; il faut cependant préciser qu'il y avait alors près de trente ans que Massenet était un admirateur averti de Wagner. Le modèle wagnérien était beaucoup plus net ­ trop peut-être ­ dans Esclarmonde (1887-88), dont les représentations dans le cadre de l'Exposition universelle connurent un succès considérable qui rejaillit sur Sibyl Sanderson, pour laquelle Massenet avait écrit le rôle principal ; par rapport aux ouvrages précédents, on remarque un élargissement du souffle et de la ligne mélodique, mais l'action dramatique ne conserve pas la même intensité jusqu'au bout.

   Avec le Mage (1889 ; créé 1891), Massenet revint au grand opéra sur un livret de Jean Richepin ; l'accueil fut bon, mais l'œuvre ne fit pas carrière. La même année vit la composition d'Amadis, opéra légendaire, qui, pour diverses raisons, ne fut représenté qu'après sa mort. Retouché en 1910, Amadis allait être créé en 1922 à Monte-Carlo. Si l'œuvre est inégale, elle a le privilège de comporter dans son prologue des audaces d'écriture telles que Massenet n'en osa jamais, associant archaïsme et modernité.

   En écrivant le Portrait de Manon (1892-93), Massenet revenait aux demi-teintes de l'opéra-comique, mêlant habilement le sourire à la nostalgie. Mais, simultanément, il était occupé par un projet plus ambitieux : Thaïs d'après Anatole France. Destinée à l'Opéra-Comique, Thaïs fut créée à l'Opéra en 1894 ; cette circonstance faussa d'abord l'appréciation d'une œuvre d'un caractère plutôt intime qui allie le sacré et la sensualité, la gravité et le comique, d'une manière surprenante, sans doute, mais parfaitement originale. La Navarraise, écrite en quelques semaines de l'été 1893, est si résolument tragique de ton qu'on a voulu y voir une concession, ou une conversion au vérisme qui triomphait alors en Italie ; en réalité, l'influence a joué de part et d'autre. De 1893 à 1901, Massenet revint à plusieurs reprises sur Grisélidis, dont il rédigea plusieurs versions. Comme dans Thaïs, il tenta une fusion des styles, cette œuvre délicate, intimiste, mériterait d'être mieux connue. Comme s'il voulait faire l'inventaire des ressources de son inspiration, Massenet aborda avec Cendrillon (1894-95, 1re repr., 1899) le domaine du conte de fée et y montra un véritable génie du métier qui fait d'autant plus regretter l'insuffisance de son librettiste.

   À la mort d'Ambroise Thomas, Massenet, à qui l'on offrait la direction du Conservatoire, refusa cette fonction, et, de plus en plus accaparé par sa carrière et les déplacements qu'elle imposait, donna sa démission de professeur de composition. Aussi divers que furent ses élèves, tous s'accordaient à reconnaître le sens pédagogique de ce professeur-né, mais surtout, au-delà des différences individuelles qu'il n'a pas étouffées, ils ont témoigné par leurs œuvres de la solidité de l'enseignement qu'ils ont reçu. Parmi eux, il faut citer Alfred Bruneau, Gabriel Pierné, Xavier Leroux, Gustave Charpentier, Henri Rabaud, Charles Kœchlin, Florent Schmitt, tous lauréats du prix de Rome, et, également, Ernest Chausson, Guy Ropartz ou Reynaldo Hahn qui n'ont pas tenté ce concours.

   Le premier fruit de la disponibilité complète dont allait jouir désormais Massenet fut Sapho, œuvre à laquelle il consacra l'été 1896. Créée à l'Opéra-Comique dès novembre 1897 en prévision de la fin prochaine d'Alphonse Daudet, Sapho, augmentée du tableau des Lettres, fit l'objet d'une nouvelle création en 1909. L'année 1897 vit également la composition d'un recueil de 12 pièces pour piano à 4 mains : Année passée, et d'une Fantaisie pour violoncelle et orchestre. On ne sait quelle circonstance incita Massenet, dont l'esprit n'était pas précisément religieux, à adapter lui-même des textes de la Vulgate pour un oratorio, Terre promise, auquel il travailla entre 1897 et 1899. La fable du Jongleur de Notre-Dame, en revanche, correspondait mieux à ses convictions intimes ; à travers cet ouvrage et au-delà de la poétique propre de l'auteur, on perçoit le regain d'intérêt qui se manifestait alors pour le chant grégorien et la musique médiévale. Contemporain du Jongleur, le Concerto pour piano, créé en 1902, réutilise vraisemblablement des esquisses anciennes dans son finale, mais l'adagio est très représentatif de cette couleur harmonique automnale si caractéristique des œuvres de la dernière manière de Massenet. À la même époque, il entreprit lui-même Roma, inaugurant une période « antique » qui vit se succéder Ariane (1905 ; créé, 1906), Bacchus (1908 ; créé, 1909), Roma (1902-1910, créé, 1912) et Cléopâtre (1911-12 ; créé, 1914). Ces ouvrages, dont la facture reste irréprochable et où l'inspiration fait moins défaut qu'on ne le croit généralement, n'ont connu qu'un succès très limité.

   Avec Chérubin (1903, créé en 1905), Massenet aborda la comédie pure dans un registre qui se souvient des Noces de Figaro et préfigure le Chevalier à la rose. Thérèse (1905-1906 ; créé, 1907), épisode de la Révolution, aussi intense que Chérubin était léger, offre une preuve supplémentaire de sa capacité à se renouveler. Panurge (1911 ; créé, 1913), « haulte farce musicale » n'a, en revanche, laissé aucune trace, tandis que Don Quichotte (1909), créé en 1910 par Chaliapine, compte parmi les quatre ou cinq œuvres les plus régulièrement jouées de Massenet, peut-être parce que le livret, qui ne doit rien à Cervantes, en est mieux structuré, tant il est vrai que ce sont les faiblesses de certains arguments dramatiques qui sont responsables de l'indigence qu'on a souvent reprochée au musicien. Fort de sa capacité à découvrir une solution musico-dramatique à n'importe quelle situation, Massenet ne s'est pas assez soucié de leur qualité intrinsèque. Ainsi ce compositeur, qui a su trouver dès l'abord un langage lyrique original et que son inquiétude presque maladive a poussé vers la recherche d'une simplicité qui seule garantissait une large compréhension et une exécution aussi fidèle que possible, a-t-il été souvent victime de ce métier qu'il possédait à fond et dans lequel, plus encore peut-être que dans sa sensibilité, il a puisé ce qu'il faut bien appeler son génie.