Dictionnaire de la Musique 2005Éd. 2005
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Mendelssohn-Bartholdy (Félix) (suite)

À tous égards, un musicien à part

L'homme, exceptionnellement doué, d'une mémoire remarquable, hypersensible, brillant, charmeur, aimant la vie, d'une vaste culture et travailleur acharné, a toujours su allier son goût de la fantaisie et de la liberté avec des règles de vie bourgeoise qui ne semblaient pas lui peser. On le découvre grâce au volumineux courrier échangé avec ses amis (Magnus, Klingemann, Moscheles, etc.) et bien que sa femme Cécile, avant de mourir en 1853, détruisît leur correspondance intime. S'il a fui autant qu'il a pu l'atmosphère empoisonnée du Berlin musical de l'époque et si Paris l'a déçu, il fut partout adulé de son temps, comme compositeur, comme chef d'orchestre, comme pianiste. Ses interprétations des concertos de Beethoven et surtout de Bach et de Mozart ont suscité des commentaires qui sont venus jusqu'à nous. Au pupitre, il électrisait les musiciens d'orchestre auxquels il communiquait l'amour d'œuvres de ses contemporains, mais aussi du passé, oubliées ou méconnues : ce fut à lui essentiellement que l'Allemagne devait de redécouvrir J.-S. Bach, dont il fit revivre l'œuvre. Mais il créa aussi des œuvres nouvelles de ses amis, notamment de Schumann ­ grâce à qui il put donner, après la mort du compositeur, la première audition de la 9e Symphonie de Schubert (22 mars 1839). Cette curiosité, cette ouverture d'esprit alliées à l'amour du passé, au goût du classicisme et du travail bien fait, se retrouvent dans sa propre musique, que son insatisfaction lui faisait éternellement remettre sur le métier ; dans ses vingt années de production on trouve à tout moment la marque du génie à côté d'œuvres médiocres, au demeurant souvent de circonstance. Sa réputation en a injustement souffert : il est encore courant de considérer Mendelssohn comme un musicien mineur, à qui on ne pardonne peut-être pas la facilité matérielle de son existence à toutes les époques. La discutable appellation française des Lieder ohne Worte (« romances sans paroles ») traduit bien la mièvrerie prêtée du même coup à toute sa musique. Pourtant, à côté d'œuvres aussi connues que le Songe d'une nuit d'été, le Concerto pour violon en mi mineur ou ses Symphonies italienne et écossaise, bien d'autres pages sont du plus haut niveau, et certaines annoncent Brahms. Nul doute que le temps viendra où des œuvres comme l'Octuor op. 20, les Quatuors op. 12, 13, 40, 80, le Quintette op. 87, les Variations concertantes pour violoncelle et piano op. 17, une vingtaine de lieder, etc., retrouveront la place qu'elles méritent dans la faveur du public. L'inspiration profondément originale, l'aisance de la technique, le raffinement de l'écriture (et de l'orchestration), la variété de la production font incontestablement de Mendelssohn l'un des grands compositeurs romantiques, dont la culture germanique a su puiser en Italie et surtout en Angleterre (sa seconde patrie) des adjuvants précieux.

Mendès (Catulle)

Écrivain et critique français (Bordeaux 1841 – Saint-Germain-en-Laye 1909).

Poète et romancier, animateur du premier Parnasse, critique dramatique et musical au Journal, cet écrivain exerça une influence due davantage à son dynamisme et à sa verve qu'à un talent original. Époux de Judith Gautier, il fut, lui aussi, un défenseur ardent de l'œuvre de Wagner. Il a écrit des livrets pour Chabrier (Gwendoline), Massenet (Ariane, Bacchus), Messager (Isoline), Debussy (Rodrigue et Chimène), Reynaldo Hahn (la Carmélite).

ménéstrandise

À Paris, aux XVIIe et XVIIIe siècles, corporation de ménétriers bénéficiant grâce à un privilège officiel de l'exclusivité des « musiques à faire danser ». Selon d'autres sources, puissante corporation qui voulait faire verser par les organistes également la redevance exigée des bateleurs. Dans le Deuxième Livre de pièces de clavecin de Couperin (1716-1717), le onzième ordre comprend cinq morceaux satiriques intitulés globalement les Fastes de la grande et ancienne Ménéstrandise (Couperin écrivit Mxnxstrxndxsx).

Mengelberg (Willem)

Chef d'orchestre hollandais (Utrecht 1871 – Sent, Engadine, 1951).

Il étudia à Utrecht avec R. Hol et M. W. Petri, puis au conservatoire de Cologne avec Wüllner, I. Seiss et G. Jensen.Il débuta en 1890 comme pianiste à Utrecht. Directeur de la musique à Lucerne de 1891 à 1895, il fut, de 1895 à 1945, chef de l'orchestre du Concertgebouw d'Amsterdam, qui acquit avec lui une renommée mondiale. À partir de 1897, il conduisit le chœur du Toonkunst Vereniging d'Amsterdam, notamment lors des exécutions annuelles de la Passion selon saint Matthieu. Avec l'orchestre du Concertgebouw et le chœur du Toonkunst, il fit des tournées en Italie, en Russie, en Norvège, en Angleterre et en France. De 1907 à 1920, il fut directeur de la Museumgesellschaft et, à partir de 1908, du Cäcilienverein de Francfort. Il fit de nombreuses tournées, notamment en Amérique, où il dirigea régulièrement la philharmonie de New York de 1921 à 1929. Entre 1911 et 1914, il se rendit à plusieurs reprises à Londres, où il conduisit le London Symphony Orchestra et la Royal Philharmonic Society. En 1934, il fut nommé professeur à l'université d'Utrecht. En 1945, à cause de sa conduite pendant la guerre, il dut se retirer en Suisse, où il resta jusqu'à sa mort.

   Chef d'orchestre doté d'une forte personnalité, il possédait une compréhension profonde de chaque instrument, maîtrisait l'orchestre de manière superbe et obtenait de lui la perfection technique, la plénitude de la sonorité, la vigueur, l'impulsion vitale et la couleur, en même temps que la souplesse. Ses interprétations se caractérisaient par leur ardeur, leur éloquence, leur intensité expressive. Sa conception des œuvres était parfois discutable, il prenait quelquefois certaines libertés, mais l'originalité de son tempérament fascinait.

   C'était un interprète privilégié de Mahler, dont il était l'ami, de Richard Strauss, qui lui dédia son Heldenleben (Une vie de héros), de Tchaïkovski et même de certains musiciens français comme Debussy. Il a dirigé à Amsterdam un festival consacré à Mahler en 1920, un festival de musique française en 1922, un festival Richard-Strauss en 1924 et des festivals de musique néerlandaise en 1902, 1912 et 1935.