Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Berain (Jean)

Peintre français (Saint-Mihiel 1639  – Paris 1711).

Il commence sa carrière féconde dès 1659 en publiant des dessins pour des Arquebuzières qui rappellent le style nerveux de Callot. À partir de 1670, il est employé par le roi (gravures d'après les ornements de la galerie d'Apollon au Louvre). En 1674, il devient dessinateur de la chambre et du cabinet du roi. Jusqu'à sa mort, il multiplie les dessins pour les habits, meubles et pièces d'argenterie royaux, pour les décors de fêtes, d'opéras, les carrousels, les illuminations, les pompes funèbres et même pour les sculptures des vaisseaux du roi. Il travaille aussi pour les seigneurs, notamment à Sceaux et à Chantilly, donne des dessins, réalisés par une équipe de collaborateurs, pour plus de 250 tapisseries (Beauvais), pour des lambris et des plafonds (Paris, hôtel de Mailly, 1687), publie plusieurs recueils de gravures entre 1680 et 1700. Reprenant le thème traditionnel des grotesques, il en fait l'essentiel de ses décorations en les peuplant de légères figures mythologiques, placées symétriquement dans des architectures aériennes. Créateur d'un style original, il aura des continuateurs dont le plus important sera Claude III Audran, qui reprendra ce qu'il y a de plus fantaisiste dans son art (singeries).

Bérard (Christian)

Peintre français (Paris 1902  – id. 1949).

Élève, en 1920, de l'Académie Ranson, il se rend en 1922 en Italie, exécute en 1923 des copies au Louvre, passe en 1924 à l'Académie Julian et prend part en 1926 à l'exposition dite " du Néo-Humanisme ". En 1925, il rencontre Cocteau, avec qui il se lie d'une longue amitié et qui le dirige vers le théâtre (1930 : la Nuit, la Voix humaine ; 1932 : Cotillon, Mozartiana) et la mode (collaboration à Vogue à partir de 1933). Désormais, Bérard poursuit son œuvre sous ce double signe du théâtre et de la mode. Dans quelques huiles, parfois excellentes (portraits de Cocteau, New York, M. O. M. A. ; de René Crevel, Paris, M. N. A. M. ; Plages de 1934), et surtout dans ses lavis et ses gouaches, il s'est fait le chroniqueur de la fête, de l'éphémère. C'est sur la scène, domaine de l'illusion, qu'il a donné le meilleur de son œuvre (la Machine infernale de Cocteau, 1934 ; l'École des femmes de Molière, 1936 ; les Forains [ballet de Roland Petit] ; la Folle de Chaillot de Giraudoux, 1945 ; Dom Juan de Molière, 1947). Une exposition complète de son œuvre a été organisée en 1987 à Spolète (Palazzo Racani Arroni).

Béraud (Jean)

Peintre français (Saint-Pétersbourg 1849  – Paris 1936).

Fils d'un sculpteur, Béraud, après des études de droit, entre en 1870 dans l'atelier de Léon Bonnat. Dès 1873, il expose au Salon. En 1885, il fait partie des membres de la Société des pastellistes français où il présente la Rieuse (1885). De 1890 à 1929, il participe aux Salons de la Société nationale des beaux-arts en tant que fondateur et vice-président. Iconographe — comme le sont G. de Nittis, B. Lemeunier ou L. Béraud — des mœurs bourgeoises sous la IIIe République (le Café, 1889, Paris, musée Carnavalet), il peint, avec une précision scrupuleuse nuancée d'humour, des anecdotes politiques (la Salle Graffard, 1884) et des scènes de la vie parisienne (les Coulisses de l'Opéra, 1889, Paris, musée Carnavalet ; la Partie de billard, 1909, musée de Tours). Dans ses compositions religieuses, il transpose les personnages évangéliques en contemporains, suivant en cela l'exemple des maîtres de la Renaissance et cherchant à réaliser une synthèse entre son idéal moral et son goût de la satire sociale (Marie-Madeleine dans la maison du pharisien, 1891, Paris, Orsay ; Descente de Croix, 1892).

   Fréquentant les salons mondains parisiens, notamment ceux de la comtesse Potocka et de la comtesse d'Agoult, il obtient un grand nombre de commandes de portraits (Prince d'Orléans ; le Prince Troubetskoï ; Portrait de Monsieur Stewart, v. 1885, Paris, musée des Arts décoratifs). En 1936, une exposition rétrospective de son œuvre fut organisée à Paris lors du Salon de la S. N. B. A.

Berchem (Nicolaes)

Peintre néerlandais (Haarlem 1620  – Amsterdam 1683).

Fils d'un peintre de natures mortes, Pieter Claesz, il se forma auprès de Jan Van Goyen, Nicolaes Moyaert, Pieter Grebber et Jan Wils, mais ces artistes ne semblent pas l'avoir influencé. En 1642, il entre dans la gilde des peintres de Haarlem. Les œuvres de son concitoyen Pieter Van Laer, rentré à Haarlem en 1639 après un voyage en Italie, semblent alors retenir toute son attention. En effet, le thème du paysage méridional, où l'accent est mis sur les bergers et leurs troupeaux, a été introduit par Van Laer v. 1630 et constitue le motif principal du répertoire de Berchem (Paysage avec Laban et Rachel, 1643, Munich, Alte Pin.). L'artiste visita l'Italie une première fois entre l'hiver 1642 et 1645. Au cours de cette période, Berchem groupe ses bergères et ses animaux autour d'un bouquet d'arbres qui limite le tableau sur l'un de ses côtés ; sa manière, encore un peu maladroite, évoque celle de Van Laer. Vers 1650, le peintre a exécuté quelques scènes bibliques et mythologiques remarquables, qui rappellent les tableaux historiques de Salomon de Bray et de Caesar Van Everdingen. Ce n'est qu'après 1650 que le talent de paysagiste de Berchem commence à s'affirmer, peut-être sous l'influence d'un second voyage en Italie, qui aurait eu lieu dans les années 1653-1656 (Paysage aux grands arbres, 1658, Louvre). Ce qui est sûr, c'est que les œuvres de Jan Both et de Jan Asselijn, exactement contemporains, l'influencent d'une manière précise. Esprit particulièrement inventif et universel, Berchem n'a rien d'un éclectique. En utilisant une série de motifs — collines, eaux, arbres, bergers, animaux —, il atteint à une diversité dans la composition, le style et l'atmosphère (Paysage avec des animaux, 1656, Rijksmuseum). En une seule année, il exécute parfois des toiles qui diffèrent profondément les unes des autres. Pourtant, un dynamisme nerveux, manifesté dans les œuvres ultérieures, fait penser à Adam Pijnacker. Mais Berchem sait toujours trouver l'équilibre entre un mouvement inventif et une composition maîtrisée jusque dans les détails. On connaît plus de 800 tableaux de sa main ainsi que des séries de gravures avec bergers et animaux et un grand nombre de dessins. Son œuvre, qui semble annoncer le style rococo (Concert sur une place publique, musée de Rouen), a exercé une grande influence, en particulier sur la scène pastorale française du XVIIIe s. (Paysage à la tour, 1656, Rijksmuseum). Il fut considéré comme l'un des maîtres les plus estimés du XVIIe s. hollandais jusqu'à la fin du XIXe s., mais son œuvre, qui connut un discrédit pendant la période impressionniste (l'Anglais John Constable conseillait aux collectionneurs de brûler leurs tableaux de Berchem), bénéficie de nos jours d'un regain de faveur. Berchem est représenté dans la plupart des grands musées, au Rijksmuseum, au Louvre, à Dresde (Gg), à l'Ermitage, à Londres (N. G.), à Munich (Alte Pin.).