Friedmann (Gloria)
Artiste français d'origine allemande (Kronach, Franconie, 1950).
Autodidacte installée en France depuis 1977, elle commence à travailler la photographie au début des années 80, se mettant elle-même en scène dans des lieux désaffectés. À partir de 1982 apparaissent ses préoccupations vis-à-vis de la nature, notamment à la montagne qui exprime le spirituel opposé à l'agitation du monde humain. Elle travaille des matériaux sans fioriture et de tonalités suggestives dans des sortes de tableaux-reliefs (Glacier, 1982, tôle ondulée et bouteilles sous toile Nylon). Puis elle se tourne vers la sculpture, opposant au changement permanent de la nature des formes délibérées et des surfaces unies (Mer de glace, verre Securit et aluminium, 1985, musée de Grenoble). Elle utilise aussi la présence physique d'un seul matériau, enlevant ainsi le pittoresque et simplifiant les formes (Plateau de Langres, 1985, Dijon, coll. le Consortium ; Eau froide, 1987). En même temps, elle commence ses œuvres en extérieur, dépendant du site et qui représentent une véritable expérience sensible et existentielle à la nature. Elle s'intègre à la nature en choisissant des formes minimales et des matériaux naturels (Au fond de la forêt, 1986, bois), répond au paysage (Meteora, 1986, maquette de bois peint) et essaie de rétablir la distance nécessaire à la contemplation (Ex Aeterno Tempore, 1987). Son travail sur les stèles reprend les mêmes préoccupations. Outre la forme porteuse d'image, elle fait coexister des matières et des significations les plus hétérogènes pour donner une vision globale du monde (In Aeternum, 1987 ; Lascaux, 1989). Elle a eu plusieurs expositions personnelles, au M. N. A. M. de Paris (1980), au Consortium de Dijon (1982), au musée de Grenoble (1987), au Centre culturel français de Cologne (1989).
Friedrich (Caspar David)
Peintre allemand (Greifswald 1774 – Dresde 1840).
Après avoir fait ses études de 1794 à 1798 à l'Académie des beaux-arts de Copenhague, où il connaît les œuvres d'Abildgaard, Friedrich s'installe à Dresde en 1798. Il y fréquente le poète Ludwig Tieck et les peintres Carus, Runge, Kersting et Dahl. Avec ses grands dessins à la sépia, d'une technique précise, représentant surtout des sites de l'île de Rügen, il remporte ses premiers succès (musée de Hambourg ; Albertina ; musée de Weimar). Ses profondes réflexions sur la nature, une observation scrupuleuse de la réalité lui permettent de trouver son originalité propre dans le domaine de la peinture. Il retourne à différentes reprises dans sa région natale, où il se lie avec Runge, en 1801, 1802 et 1806, et crée à ce contact un style de paysage — toujours composé — qui lui est personnel (Brume, 1806, Vienne, K. M. ; Dolmen dans la neige, Dresde, Gg). Dans la Croix sur la montagne, dit Retable de Tetschen (1807-1808, id.), il recourt au paysage pour traduire son émotion religieuse. Le Moine au bord de la mer (1809, Berlin, Charlottenburg) est l'expression la plus parfaite de sa conception transcendante du paysage. L'Abbaye dans un bois (1809, id.) et le Matin dans le Riesengebirge (1811, id.) comptent parmi les œuvres les plus marquantes de cette période. De nouveaux voyages sur les bords de la Baltique en 1809, puis en 1810 dans le Riesengebirge et dans le Harz en 1811 enrichissent son répertoire de motifs (l'Arc-en-ciel, 1808, Essen, Folkwang Museum ; le Paysage du Riesengebirge, Moscou, musée Pouchkine).
Par la suite, sa recherche de l'universalité limite l'expression de sa fantaisie et de son langage formel. Mais on constate une nouvelle évolution à la suite de deux voyages sur les bords de la Baltique en 1815 et 1818 (la Croix sur le rivage, id. ; Navires au port, Potsdam, Sans-Souci). Il s'inspire plus étroitement de la nature et choisit des motifs idylliques ; son coloris s'intensifie. À partir de 1820, il exécute, en même temps que des paysages de bord de mer, quelques compositions de haute montagne, tels le Watzmann (1824, musées de Berlin) et Haute Montagne (détruit ; autref. à Berlin, N. G.). Friedrich a également peint des vues de la Mer polaire, dont une seule (la Mer de glace, 1823, Hambourg, Kunsthalle) nous est parvenue. À partir de 1825, les paysages mélancoliques reprennent une importance dominante dans sa production. Son écriture devient plus souple et son coloris saturé. En 1835, il eut une attaque d'apoplexie à la suite de laquelle il ne produisit plus que des dessins.
Chez Friedrich, la conception de la nature n'est soumise ni à la description littérale ni à l'idéalisation de la réalité vivante. Les motifs naturalistes sont considérés comme les hiéroglyphes d'une révélation divine. Un certain nombre d'éléments (la ruine, l'arbre, la roche brisée) transfigurent le paysage et lui donnent une portée symbolique. Ils relèvent peu du répertoire traditionnel. La prédilection de l'artiste pour les scènes de lever ou de tombée du jour, de forêts envahies par la brume montre une fascination pour les thèmes du dévoilement et de la révélation. Les formes qui émergent de ruines fictives dans les brumes épaisses manifestent une réalité autre : l'avènement d'une humanité nouvelle au milieu des débris d'un univers ancien. Le paysage offre souvent un premier plan plongé dans les ténèbres : des figures de dos, fréquentes dans les tableaux de Friedrich, contribuent à inclure le spectateur dans l'univers du tableau : promeneur un instant arrêté dans son errance, il contemple et cherche une nouvelle image du monde (le Voyageur devant la mer de nuages, 1818, Hambourg, Kunsthalle ; Deux Hommes regardant la lune, Dresde, Gg ; Sur le voilier, 1818, Ermitage). La tension permanente entre réalisme et poésie semble parfois faire éclater l'image même (la Mer de glace, l'Arc-en-ciel).
Les paysages de Friedrich, d'une haute spiritualité et d'une si riche sensibilité, furent appréciés du public dès les débuts du XIXe s. ; le Retable de Tetschen, cependant, et le Moine au bord de la mer rencontrèrent une vive opposition. La notoriété du peintre atteignit son apogée en 1810, lorsque la maison de Prusse fit l'acquisition de certaines de ses œuvres. En 1816, il fut nommé membre de l'Académie de Dresde, et en 1824 professeur extraordinaire. En 1834, il reçut la visite du sculpteur français David d'Angers. Cependant, à l'exception de Carus, Blechen et Dahl, Friedrich eut peu d'influence sur ses contemporains. Sa conception symbolique de l'art ne pouvait s'accorder avec le prosaïsme de l'époque Biedermeier. Redécouvert au début du XXe s., il apparaît aujourd'hui comme le plus grand paysagiste allemand du XIXe s. Il est représenté dans la plupart des musées allemands, surtout à Berlin, Dresde et Hambourg, ainsi qu'à Brême, Essen, Karlsruhe, Hanovre, Leipzig (les Âges de la vie, 1835), Kiel, Cologne et Munich. On peut aussi voir certaines de ses œuvres à Vienne, à Leningrad, à Moscou, à Winterthur, à Oslo, à Prague ainsi qu'à la N. G. de Londres et au Louvre (l'Arbre aux corbeaux).