Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Seghers (Hercules Pietersz) (suite)

L'œuvre gravé

Quelque 183 épreuves seulement, provenant de 54 cuivres différents, nous sont parvenues. Seghers, qui n'avait pas d'imprimeur, ne tirait en effet que peu d'épreuves d'un même cuivre, en apportant des modifications à chaque tirage. C'est donc une faible production pour une assez longue carrière ; sans doute faut-il déplorer de nombreuses pertes. Les sujets des gravures conservées sont un peu plus variés que ceux des peintures : tempête, études de bateaux, d'arbres, de cheval cabré, nature morte de livres, un crâne, vues de ruines, vue urbaine et des paysages sylvestres de montagne ou de plaine. Tous ces thèmes se retrouvent chez les contemporains de l'artiste, mais celui-ci les traite avec une audace qui le conduit aux limites du " paysagisme abstrait ". Plus encore que les paysages peints, les paysages gravés vont d'un extrême à l'autre, des vallées de montagnes fantastiques (les plus nombreuses) aux vues réalistes de plaines et de villages. Cependant, en variant les techniques de tirage, Seghers parvient à faire de tel paysage sylvestre, traité de façon naturaliste, un site fantastique ; d'une épreuve à l'autre, les Ruines de l'abbaye de Rijnsburg passent d'une description fidèle à une image féerique. Dans le Paysage de montagne avec agrès de navire, le caractère inhumain des énormes rochers qui dominent un petit village situé au fond d'une vallée encaissée est accentué par le réseau que dessinent des agrès de navire, restes d'une autre composition que l'artiste n'a que partiellement effacée. Des rochers escarpés, des arbres morts, un village isolé, parfois à peine discernable, constituent l'un de ses thèmes de prédilection, et il en tire des estampes de grand format, notamment Vallée de montagne avec quatre arbres, Paysage aux champs clôturés, Paysage rocheux avec cascades. Un même sentiment menaçant, oppressant, se dégage de 2 Tempêtes en mer, figurant des voiliers qui luttent en vain contre les éléments déchaînés.

   En dehors des paysages, Seghers a exécuté diverses études d'arbres, dans un site naturel (le Grand Arbre) ou sur un fond neutre, abstrait (les Deux Arbres, l'Arbre moussu). La première estampe présente de nombreux points communs avec les autres paysages, mais il émane des épreuves colorées des Deux Arbres et de l'Arbre moussu une poésie raffinée, proche de l'art asiatique et sans équivalent dans l'art européen. Les Trois Livres sont une des eaux-fortes les plus singulières que nous ait laissées Hercules Pietersz Seghers, qui parvient, là encore, en jouant uniquement sur les proportions et la disposition de trois livres, à créer une tension dramatique. Les techniques de tirage utilisées par Seghers jouent un rôle essentiel pour chaque épreuve et lui permettent d'obtenir des variations presque sans fin à partir d'un même cuivre : tirage en vert, jaune, bleu ou blanc sur toile ou sur papier teinté à la gouache ou à l'aquarelle et rehaussé, après l'impression, pour accentuer certains détails. Ici aussi, l'originalité de l'artiste réside dans une utilisation très personnelle de méthodes traditionnelles (vernis de protection, pointe sèche, cuivre inégalement essuyé, gravure au sucre). Pour le Fond de vallée, la gravure dont on possède le plus grand nombre d'épreuves, des tirages existent en vert, bleu ou noir sur papier et sur toile colorés de jaune, de gris, de vert, de brun ou de bleu plus ou moins intenses, avec des accents d'autres couleurs rajoutés après coup. Les effets de polychromie de ces gravures semblent avoir particulièrement retenu l'intérêt de Seghers, qui finit par en faire de véritables peintures, surtout lorsqu'elles sont vernies, comme telle épreuve de la Grande Ruine de l'abbaye de Rijnsburg, tirée en jaune sur papier peint en noir, avec des rehauts de vert dans le ciel et de rouge sur les pierres.

   Les 2 principales collections de gravures de Seghers se trouvent au Rijksmuseum (cabinet des Estampes) et à Paris (B. N., cabinet des Estampes). En dehors de Johannes Ruyscher, les estampes de Seghers n'ont influencé aucun artiste du XVIIe s. De même en peinture, seul Frans de Momper a vraiment subi l'emprise de ses paysages. Cependant, il convient de ne pas oublier la dette de Rembrandt et de Philips Koninck, qui ont certainement été très impressionnés par les peintures de leur aîné.

Segna di Bonaventura

Peintre italien (actif à Sienne, documenté de 1298 à 1326).

Il est peut-être le neveu de Duccio, dont il fut certainement l'élève et le disciple, reprenant sa manière, avec cependant moins d'inspiration et de finesse. Pour établir le catalogue de ses œuvres, dont le trop grand nombre d'attributions est sujet à caution, la critique s'est fondée sur 4 œuvres signées : une Madone avec des anges et des saints (Castiglione Fiorentino, collégiale), un polyptyque avec la Vierge et l'Enfant et des Saints (partagé entre le Metropolitan Museum et la coll. Perkins, à Assise), un Crucifix (Moscou, musée Pouchkine) et les fragments (4 panneaux avec des Saints) d'un polyptyque (n. 40, Sienne, P. N.). L'artiste ne semble pas être l'auteur de la belle Maestà avec les scènes de la vie du Christ de la cathédrale de Massa Marittima, qu'on lui a également attribuée.

Segui (Antonio)

Peintre argentin (Córdoba 1934).

Il commence des études artistiques et juridiques, part pour l'Europe en 1952, visite l'Italie, la Suisse, puis l'Afrique du Nord, et poursuit ses études de peinture en France et en Espagne, retourne en Amérique du Sud de 1957 à 1961, avant de se fixer en France en 1963. Révélé au public français lors de sa participation à la Biennale de Paris, il s'est depuis maintes fois manifesté, tant sur le continent américain qu'en Europe. Dans la tradition espagnole, son art a d'abord été marqué par un caractère d'anxiété, une truculence pathétique, un aspect caricatural que n'altère pas une technique classique, se plaisant un moment à retrouver le climat des œuvres anciennes : Felicitas Estado n° 12 (1962). L'introduction de sigles, de signes et de lettres s'accompagne bientôt du découpage de la surface et de l'éclaircissement de la palette. Des expositions à Paris à la gal. Claude Bernard et à la gal. Jeanne Bucher, des participations à des manifestations de caractère international (Biennale de Venise, 1964 ; Pittsburgh International, 1964), ont permis de suivre une évolution qui a conduit l'artiste à abandonner la peinture de chevalet pour aborder la fragmentation de la surface, puis les 3 dimensions du théâtre de marionnettes.

   Segui a pratiqué le fusain et le pastel sur toile, livrant en 1972-73 la série des Éléphants et en 1977 un ensemble de paysages désolés et rigides où se fait sentir l'absence de toute vie. Il installe volontiers ses figures dans des sites urbanisés, où elles évoluent, anonymes, et bien souvent interchangeables (Cuando Volvi de Brasil, 1984).