Giotto
ou Giotto di Bondone (suite)
L'influence de Giotto en Italie
À sa mort, Giotto laissait l'art italien dans une situation fort différente de celle où il l'avait trouvé. Le célèbre jugement de Cennini selon lequel Giotto aurait fait passer " l'art de peindre du grec au latin " en le conduisant au " moderne " est à prendre au pied de la lettre, dans la mesure où le passage de la culture figurative italienne du monde médiéval-byzantin (" grec ") à celui du gothique occidental (" latin ") fut favorisé, plus que par tout autre facteur singulier, par la connaissance des œuvres de Giotto.
C'est ce qui s'est produit, nous l'avons signalé, à Rome, en Ombrie (passage des artistes de la génération du Maître de San Francesco à celle du Maestro di Cesi et du Maestro del Farneto), en Romagne (Giuliano da Rimini, Giovanni da Rimini, Pietro da Rimini) et également, quoique de manière plus complexe, dans l'Italie du Nord (Maestro dei Fissiraga à Lodi, Maestro delle Santa Faustina e Liberata et Maestro di Sant' Abbondio à Côme). C'est évidemment ce qui s'est surtout produit en Toscane, où l'on ne peut expliquer le passage à Sienne de la culture de Duccio à celle des frères Lorenzetti sans rappeler le séjour de ces deux derniers à Florence et leur rapport avec Giotto et les personnalités exceptionnelles de son atelier. En d'autres villes de Toscane (S. Gimignano, Pise, Arezzo), le langage giottesque fut apporté par des artistes moins importants, mais qui eurent, de Memmo di Filippuccio à Buonamico Buffalmaco, la chance de bien connaître les œuvres de Giotto. Ce renouvellement ne touche pas seulement la peinture, puisque, en ce qui concerne la sculpture, qui avait pourtant connu la révolution précoce de Nicola Pisano et d'Arnolfo di Cambio, se fait jour, dès le début du XIVe s., une évolution. À l'influence du pathétisme passionné de Giovanni Pisano se substitue, pour les artistes les plus modernes, une curiosité nouvelle pour une interprétation plus classiquement mesurée et plus solide du " gothique " : c'est le cas du Siennois Tino di Camaino et surtout du grand Andrea Pisano, qui, selon la tradition, exécuta d'après les dessins de Giotto lui-même les bas-reliefs du campanile de Florence (v. 1335-1343).