Léonard de Vinci (suite)
Léonard en France
À la mort de son protecteur (17 mars 1516), Vinci accepte l'hospitalité que lui offre François Ier au manoir de Clos-Lucé, près d'Amboise. C'est là qu'en octobre 1517 vint le visiter le cardinal d'Aragon, en voyage en Europe avec son secrétaire Antonio de Beatis, qui note dans son Journal avoir vu chez le peintre " une infinité de livres et tous en langue vulgaire ", et 3 tableaux : la Joconde, la Vierge, l'Enfant Jésus et sainte Anne et un Saint Jean-Baptiste, unanimement reconnu comme dernière œuvre certaine de l'artiste (Louvre). La " petite histoire " veut qu'il se soit éteint dans les bras de François Ier le 2 mai 1519. Inhumé dans le cloître de l'église de Cloux, ses cendres furent dispersées pendant les guerres de Religion, et sa sépulture a disparu.
Léonard, théoricien et dessinateur
Le nombre restreint des peintures réalisées par Léonard de Vinci, le fait que certaines soient inachevées témoignent de la difficulté rencontrée par l'artiste à donner un accomplissement satisfaisant à ses formulations théoriques, complexes et originales. Léonard se proposait en fait de rédiger un Traité de la peinture ; bien qu'il n'ait jamais tracé un plan organique de ce travail, il a confié à ses manuscrits des propos suffisamment détaillés pour que les grandes lignes de sa pensée puissent être tirées au clair et, dans une certaine mesure, systématisées. C'est ce qu'on essaya de faire peu de temps après sa mort, en recopiant, dans un ordre plus ou moins logique, beaucoup de ses notes ayant trait à la peinture : grâce à cet ouvrage de compilation (bibliothèque du Vatican, Codex Urbinas Latinus, 1270), un grand nombre des réflexions de Léonard, dont les originaux se sont par la suite dispersés et perdus, sont parvenues jusqu'à nous. D'autres passages, parsemés parmi des annotations de tout genre, se trouvent dans les autographes qui subsistent, notamment les ensembles de Paris (Institut), Londres (British Museum et V. A. M.), Milan (Ambrosienne) et Madrid (B. N.). Le principe de base de la théorie léonardesque est que la peinture doit viser à devenir un instrument de connaissance, qui réunit les avantages de l'enquête spéculative à ceux de la vérification visuelle et de sa représentation : une forme nouvelle et plus efficace de philosophie. De ce fait, on peut dire que l'entière activité expérimentale du maître, recouvrant tous les domaines du savoir, a été effectuée en vue de cette fin ultime. Devant les problèmes spécifiquement picturaux, Léonard bénéficia ainsi d'une sensibilité plus aiguisée et d'une optique plus vaste que tous ses contemporains ; ses observations sur la phénoménologie de la lumière, les interactions spatiales, la perspective aérienne n'ont été réellement comprises que quelques siècles plus tard. L'artiste a été le premier à accompagner de dessins toutes ses réflexions et démonstrations, de sorte que, dans ses manuscrits, écriture et illustration graphique sont parfaitement complémentaires. Le corpus de ses dessins est, par conséquent, énorme (l'ensemble le plus considérable étant conservé dans les coll. royales britanniques à Windsor Castle) et, par son caractère expérimental, difficile à classer stylistiquement et chronologiquement. On reconnaît en général un passage progressif du tracé fluide, volant, léger, dont témoigne la composition représentant Santa Maria della Neve (Offices), datée de 1473, vers des contours vaporeux, modulés par la lumière, tels qu'on les voit, par exemple, dans le célèbre Autoportrait (Venise, Accademia) ou dans le Portrait d'Isabelle d'Este (Louvre), datant de la maturité de l'artiste. À la fin de sa vie, Léonard réalisa dans des dessins, notamment dans 2 représentations du Déluge (Windsor), cet idéal d'une peinture-philosophie qui capte et explique la réalité extérieure et intérieure des phénomènes terrestres, auquel il avait consacré avec passion toutes ses recherches.