Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Richter (Hans)

Peintre allemand (Berlin  1888  –Muralto, près de Locarno, 1976).

Il étudie à l'Académie des Beaux-Arts de Berlin (1908) et à l'Académie de Weimar (1909). La rencontre, en 1913, de Marinetti le confirme dans sa vocation, qui sera, dès lors, celle d'un chercheur. Plastiquement, Richter est touché par le Cubisme, qui lui permet d'exécuter des œuvres d'une force indiscutable : Violoncelle (1914), Orchestre (1915). Mais, par tempérament, il se sent attiré par l'Expressionnisme, qui lui inspire une série de Portraits visionnaires (1917, Paris, M. N. A. M.), où s'affirment les vertus propres au hasard et à la spontanéité (Automne, 1917, Zurich, Kunsthaus). Alors que la revue Die Aktion lui consacre un numéro spécial, il rejoint les dadaïstes à Zurich et commence son évolution vers une peinture à tendance abstraite (Tête dada, 1918), qui repose sur la décomposition du mouvement. Il pratique une série de recherches pour trouver tous les rapports élémentaires concevables, de la ligne et de la surface, en déclinant les éléments les plus simples. C'est en 1919 qu'il réalise son premier " rouleau ", nom donné à une suite de dessins développant le même thème poursuivi à travers ses modifications dans le temps (Prélude, 1919, New Haven, Yale University, Art Gal. ; Fugue, 1920, New York, M. O. M. A.). Ses premiers films abstraits (Rythme 21) suivent ces expériences. Richter est de retour en 1920 à Berlin, où il adhère au Novembergruppe et à De Stijl, et publie la revue G avec Lissitsky. À partir de 1928, il produit d'innombrables films documentaires et de publicité ainsi que des courts métrages de caractère expérimental. Parallèlement, il écrit plusieurs livres théoriques sans dissocier les problèmes cinématographiques de ceux qui sont propres à la peinture (Film and Progress, en 1939-40 ; Dada Kunst und Anti-Kunst, en 1964). Il se réfugie en 1940 aux États-Unis et réalise en 1944 un long métrage, Dreams that Money can buy, avec Duchamp, Max Ernst, Calder, Man Ray et Fernand Léger, puis Dadascope en collaboration avec Arp, Duchamp, Raoul Hausmann, Hülsenbeck, Schwitters et Tzara. Il continue à peindre des toiles où dominent les éléments géométriques (Contrepoint en gris et rouge, 1942 ; Constellation en gris, noir et blanc, 1956), puis recherche les effets de flous obtenus par l'étalement des couleurs au couteau (Moto-rythme 7, 1960 ; Oiseau bleu, 1963). Son œuvre picturale, peu connue en Europe, a cependant fait l'objet de plusieurs expositions : à la gal. des Deux Îles à Paris (1952), à Bâle, Washington, Zurich, Hanovre et au Stedelijk Museum d'Amsterdam (1955).

Rico Ortega (Martín)

Peintre espagnol (Madrid 1833  – Venise 1908).

Rico Ortega fut l'élève du romantique Pérez Villaamil, et ses premiers tableaux reflètent la découverte des sierras castillanes, alors ignorées des peintres (Sierra de Guadarrama, 1858, Prado). À partir de 1862, il fit un long séjour en France et en Suisse, fréquenta les peintres de Barbizon, et surtout Daubigny, rencontra Fortuny, peignant, dans un style assoupli, des vues d'Île-de-France et parfois de Bretagne (Bords de la Seine, musée de Saint-Sébastien ; Lavandières bretonnes, musée de Séville). Il visita également Londres, où il copia Turner et Ruisdael.

   Revenu en Espagne en 1870, il évolua, sous l'influence de Fortuny, qu'il accompagna à Grenade, vers une manière plus colorée, chatoyante et minutieuse à la fois, la Cueillette des oranges à Grenade (Baltimore, Walters Art Gallery) ; ce style vaudra à ses vues de Venise, où il résida pendant une grande partie de sa vieillesse, un succès commercial considérable, Vue de Venise (Madrid, Casón). Cet homme sensible et cultivé, qui a laissé d'agréables mémoires (Recuerdos de mi vida), demeure un des paysagistes les plus délicats de la fin du XIXe s., un " Daubigny ensoleillé ", comme l'avaient baptisé les critiques parisiens.

Ridinger (Johann Elias)

Peintre, dessinateur et graveur allemand (Ulm 1698  – Augsbourg 1767).

Après un bref apprentissage chez C. Resch à Ulm, il se rend v. 1710 à Augsbourg chez J. Falch, peintre de délicates natures mortes de plantes et d'animaux, où il acquiert le goût de la technique et des détails minutieux. À partir de 1719, il séjourne trois ans chez le comte Metternich à Ratisbonne, où il participe à des chasses à courre et visite l'école d'équitation. De retour à Augsbourg, il se perfectionne à l'Académie auprès de Rugendas. Il fonde son atelier de gravure en 1723. Si ses peintures sont rares, ses très nombreuses estampes au burin et à l'eau-forte font bientôt de lui l'une des principales figures de la gravure d'Augsbourg, avec Rugendas et Nilson. Il devient directeur de l'Académie en 1759. Son œuvre gravé (env. 1 600 pièces pour la plupart réunies en recueils) représente presque exclusivement des scènes de chasse dans des paysages de la Forêt-Noire minutieusement décrits, des combats d'animaux et des chevaux de manège, auxquels il adjoint de longs textes didactiques ou moralisants. L'art de Ridinger, caractéristique du style ornemental du Rococo, de la culture encyclopédique de l'Aufklärung, est aussi nourri de la leçon des maîtres anciens et modernes : ses dessins présentent des réminiscences de Cranach et de Potter, alors qu'on rencontre des motifs de Rubens et de Roos dans ses gravures. À sa mort, ses fils Martin Elias et Johann Jakob continuèrent à éditer ses œuvres qui furent appréciées très avant dans le XIXe s. par les amateurs d'estampes, les amoureux de la chasse et les naturalistes.

Riesener (Henri François)

Peintre français (Paris 1767  – id. 1828).

Fils du célèbre ébéniste Jean-Henri Riesener, élève de Vincent, puis de David, il a peint, dans le style de ce dernier, des portraits, conservés notamment au Louvre, au musée Carnavalet (Paris) [Talma, Madame Dugazon], à Versailles ainsi que dans divers musées de province (Madame Riesener et sa sœur, Orléans). De 1815 à 1823, il alla en Russie, où il devint à la cour des tsars le portraitiste en vogue qu'il avait été à celle de Napoléon. On lui doit également des miniatures. Riesener était l'oncle d'Eugène Delacroix, qu'il fit entrer dans l'atelier de Guérin.

 
Son fils Léon (Paris 1808 – id. 1878) fut son élève ainsi que celui de Gros. Il peignit des natures mortes, des paysages (Louvre) et surtout des nus féminins (Vénus et l'Amour, 1838, musée de Lyon ; Léda, 1840, musée de Rouen ; Bacchante, 1855, Louvre ; Angélique, 1858, id.). Il fut aussi chargé de grands cycles décoratifs à la bibliothèque du Luxembourg (1840-1843), à la chapelle de l'hospice de Charenton (1843-1849) et à l'église Saint-Eustache (1854-1857). Grand admirateur de son cousin Delacroix, il peut être considéré comme le trait d'union entre le colorisme de ce dernier et les recherches sur la lumière des impressionnistes. Ami de Fantin-Latour et de Berthe Morisot, il fut reconnu par les impressionnistes comme l'un de leurs précurseurs ; c'est ainsi que Degas acheta en 1879, à sa vente après décès, 75 de ses dessins.