dessin (suite)
Le fusain
Il est sans doute l'un des procédés les plus anciens du dessin. Jusqu'au XVe s., le dessin a été considéré avant tout comme une étape préparatoire de la création artistique. Le fusain (charbon de saule ou de tilleul), s'effaçant facilement et permettant les corrections, fut employé dès l'Antiquité par les artistes soit pour réaliser l'esquisse de compositions murales à la détrempe ou à la fresque — " Quand l'enduit est sec, prends ton charbon et commence à dessiner, compose et prends bien toutes tes mesures pour diviser l'espace " (Cennino Cennini) —, soit comme procédé d'étude sur des panneaux de buis ou de figuier recouverts d'une préparation (craie ou poudre d'os mêlées de colle de peau). Ce n'est que vers le milieu du XVIe s. qu'on entreprit des recherches pour fixer le fusain sur son support — celui-ci étant le plus souvent du papier — en le trempant dans l'huile avant usage. On en vint par la suite à immerger le dessin lui-même dans un bain d'eau additionnée de gomme arabique et, enfin, à pulvériser une solution de gomme sur le dessin ; certains dessins de l'école bolonaise du XVIIe s., fixés selon ces méthodes, se sont bien conservés.
Mais ce n'est qu'au XIXe s. que le fusain devient une technique de dessin définitif grâce à des artistes comme Delacroix, Corot, Millet et plus tard Seurat et Odilon Redon.
Les pointes de métal
Les pointes en or, en cuivre, en argent ou en plomb, déjà connues des Romains, ont été le seul procédé en usage jusqu'au début du XVIe s. pour des dessins précis et achevés. Cette technique, qui utilise la propriété d'oxydation au contact de l'air de la trace laissée par la pointe de métal, nécessite une préparation préalable du support, papier ou parchemin, à base de colle et de poudre d'os. Le trait fin, de couleur brune (argent et or) ou grise (plomb), était généralement associé à des rehauts blancs, souvent sur du papier de couleur vive. Ce procédé, qui exigeait une grande sûreté de main (le trait indélébile ne permettant pas les corrections), fut illustré tant par les artistes florentins (Vinci, Verrocchio) que par de grands maîtres allemands (Dürer), mais abandonné dès le début du XVIe s. au profit de procédés moins astreignants, comme la pierre d'Italie et la sanguine (tous deux d'origine minérale).
La pierre d'Italie, ou pierre noire
Apparue dans les dessins de Pollaiolo, Ghirlandaio et Signorelli, la pierre d'Italie (schiste argileux à grain serré) fut largement employée par tous les grands artistes du XVIe s. en Italie (Raphaël, Vinci, Michel-Ange, Titien, Tintoret). Les artistes du Nord — Néerlandais et Flamands — ne l'utilisèrent qu'au XVIIe s. (Ruisdael, Hobbema, Rubens, Van Dyck).
La sanguine
Connue dès l'Antiquité, elle permettait d'introduire une notation colorée dans le dessin, en particulier pour rehausser les chairs, et c'est en ce sens qu'elle fut employée par Fouquet au XVe s. dans ses portraits et, au XVIIIe s., dans la technique dite " des trois crayons ".
Ce fut en fait à Florence qu'apparut le dessin à la sanguine proprement dit, c'est-à-dire le dessin utilisant seul ce matériau à la fois pour délimiter les contours et noter les volumes et les ombres ; les dessins de Léonard de Vinci datant des années 1470-1480 en sont un prestigieux exemple. Ce procédé eut un immense succès durant les XVIe, XVIIe et XVIIIe s., tant en Italie qu'en France et dans les pays du Nord, avec sans doute une faveur particulière en France au XVIIIe s., au temps de Watteau et de Boucher. À l'exception de Renoir, les artistes du XIXe s. l'employèrent peu.
L'encre
Parallèlement à tous ces procédés, le dessin à l'encre et à la plume (instrument de prédilection des Orientaux), ou au pinceau, n'a cessé d'être employé depuis l'Antiquité jusqu'à nos jours. Au Moyen Âge, des dessins à la plume accompagnaient souvent des textes calligraphiés (Psautier d'Utrecht, IXe s., Utrecht, bibl. de l'Université) ou permettaient de fixer des modèles (Album de Villard de Honnecourt, Paris, B. N.). Rapidement, on associa, au contour purement linéaire obtenu à l'aide de la plume d'oie (ou du pinceau fin), les lavis, exécutés au pinceau, lavis de bistre (brun), d'encre de Chine (noir) et, au XIXe s., de sépia (ton brun plus froid que le bistre), qui permettaient le rendu des ombres et, en jouant sur le ton du papier laissé en réserve, de la lumière. De plus, l'artiste avait la possibilité d'utiliser des rehauts blancs (gouache le plus souvent). Tous les grands artistes, de Vinci, Raphaël, Michel-Ange à Matisse et Picasso, en passant par Rembrandt, Poussin et Delacroix, employèrent ces techniques.
Pastel, craie, crayon graphite ou mine de plomb sont d'origine plus récente.
Le pastel
Il fut employé tôt en France par Fouquet, Jean et François Clouet, les Dumonstier, puis au XVIe s. en Italie (Baroche), mais sa faveur la plus grande date du XVIIIe s. avec des portraitistes comme Rosalba Carriera, La Tour et Perronneau ; pour le XIXe s., il faut citer Degas, Toulouse-Lautrec, Odilon Redon.
Le graphite
L'utilisation du graphite anglais, d'origine minérale et qui doit son nom au reflet métallique du trait qu'il laisse sur le papier, fut popularisée au XVIIe s. par les Flamands et les Néerlandais (D. Teniers, Cuyp).
Ce graphite fut remplacé au XIXe s. par le graphite artificiel, inventé par le chimiste français Nicolas Jacques Conté (1755-1805) et employé par David, puis Ingres, et devint dès lors la technique la plus répandue utilisée pour les études et les croquis par Delacroix, Corot, Degas.