Moroni (Giovanni Battista)
Peintre italien (Albino, Bergame, v. 1528 – Bergame 1578).
Sa vie est mal connue, et l'on peut seulement supposer qu'il fit un voyage à Trente, à Parme et à Venise. Formé à Brescia dans l'atelier de Moretto, Moroni ne se départit jamais totalement de cette influence dans ses peintures religieuses, largement répandues dans les églises bergamasques. Ses compositions équilibrées, ses figures assez rigides, une certaine sécheresse d'expression expliquent l'insuccès de cette œuvre sacrée, où, cependant, il témoigne souvent d'un sentiment de la réalité qui permet de le classer parmi les meilleurs représentants du naturalisme poétique lombard (Cène, 1568, Romano Lombardo, église S. Maria Assunta). Comme portraitiste, au contraire, Moroni connut le plus grand renom (Titien lui-même n'hésitait pas à conseiller aux gouverneurs vénitiens résidant à Bergame de se faire représenter par lui). Il substitue à la grandeur des portraits de Moretto un accent intime et narratif qui confère à son œuvre un charme particulier. Ses premiers portraits en pied, sur fonds de ruine ou de paysage (Portrait d'un gentilhomme, Milan, Ambrosienne ; G. G. Grumelli en rose, 1560, Bergame, Palazzo Moroni ; le Cavalier blessé, Londres, N. G.), dérivent évidemment du maître. À partir de 1561, il vit à Albino jusqu'à sa mort. Son œuvre apparaît comme un lien stylistique entre Bergame, où travaille Lotto, et Brescia, champ d'action de Savoldo, Romanino et Moretto. Il travaille à Trente pendant les deux premières sessions du Concile. De Lotto, Moroni retient la finesse de l'interprétation psychologique. À l'époque de sa maturité, il arrive à une fusion du fond et du sujet, réalisant une atmosphère picturale singulièrement harmonieuse. Certaines œuvres empruntent à Titien la composition ample des portraits d'apparat. Le Mariage mystique de sainte Catherine (Almenno, San Bartolomeo) s'inscrit également dans la suite du tableau d'autel de Titien et rappelle aussi la manière de Moretto.
Dans ses dernières œuvres, il caractérise la personnalité intime de son modèle avec une perspicacité qui le met au niveau des portraitistes hollandais du XVIIe s. Sa production, immense, est bien connue, souvent datée. Il est ainsi particulièrement bien représenté à l'Accad. Carrara de Bergame (plus de 15 portraits, dont ceux d'Isotto Brembatti Grumelli et de Paolo Vidoni Cedrelli, 1576), à la N. G. de Londres, à la Brera et dans des collections de Bergame. Son chef-d'œuvre est sans doute le fameux Tailleur de la N. G. de Londres. Notons enfin un aspect peu connu de Moroni : son intérêt pour la peinture ancienne, qui s'est concrétisé dans des copies d'après une Madone de Giovanni Bellini (Bergame, coll. part.) et d'après la Calomnie d'Apelle, perdue, de Mantegna (musée de Nîmes).
Morrice (James Wilson)
Peintre canadien (Montréal 1864 – Tunis 1924).
Fils d'un riche marchand de Montréal, il abandonne ses études de droit à l'université de Toronto, se rend à Paris en 1889 et s'inscrit à l'Académie Julian. Il prend conseil d'Harpignies, subit l'influence de Whistler, rencontré en 1897, et admire Puvis de Chavannes, Renoir et les postimpressionnistes. Il se lie également avec des artistes américains, M. Prendergast et Ch. Conder, plus tard W. Glackens et R. Henri (1895). Grand voyageur, Morrice revient fréquemment à Montréal pour de courts séjours et peint en Normandie, en Bretagne, à Venise (1896-97), en Belgique et en Angleterre. En 1911-12, il fait un séjour à Tanger avec Henri Matisse, rencontré en 1908 ou 1909, et par la suite visite Cuba, la Jamaïque, la Martinique, Trinidad, la Corse et finalement l'Algérie, où il travaille avec Marquet (1922), et la Tunisie.
L'art de James Wilson Morrice se distingue par l'aspect rêveur et enveloppé de ses compositions, qui le rapproche des Nabis (Jeune Femme vénitienne, Ottawa, N. G. ; Foire de campagne, v. 1905, Fredericton, New Brunswick, Beaverbrook Art Gal.). Sa peinture est exécutée avec un grand souci d'harmonie et de mise en page dépouillée (le Ferry, Québec, v. 1909, Ottawa, N. G. of Art), même apr. 1910, quand, par la couleur et la lumière, il subit l'influence du Fauvisme et rappelle davantage Marquet que Matisse (Plage à Trinidad, v. 1927, Ottawa, N. G.). Morrice vécut surtout à Paris mais il est étroitement associé à l'évolution de l'art canadien du début du XXe s. Il est représenté dans les musées de Montréal, Ottawa, Québec, Toronto, Hamilton, Winnipeg, à la Beaverbrook Art Gal. de Fredericton, à la Tate Gal. de Londres et à Paris (M. A. M. de la Ville de Paris).
Morris (Robert)
Artiste américain (Kansas City 1931).
De 1948 à 1955, il fait simultanément des études d'ingénieur et d'art (University de Kansas City, puis California School of Fine Arts) avant de s'orienter vers l'art. Il pratique alors (1955-1970) le théâtre expérimental, le court métrage, la peinture (qu'il abandonne après deux expositions, en 1957 et 1958). Il quitte San Francisco pour New York en 1961, poursuivant ses multiples activités (chorégraphie, happenings, histoire de l'art, enseignement, etc.). Après deux expositions de sculpture en 1964 et 1965, il participe à la manifestation inaugurale du Minimal Art, " Primary Structures ", au Jewish Museum de New York en 1966. Il fait également paraître dans Artforum deux articles théoriques fondamentaux, " Notes on Sculpture ". Morris est préoccupé par la perception du volume et son identité (Sans titre, 1965, met en scène trois volumes identiques qui sont " lus " différemment en fonction de leur position), l'interaction entre la forme-sculpture et l'espace (une autre pièce de 1965 est faite de miroirs qui restituent la continuité du lieu d'exposition). Simultanément, il réalise quelques pièces de Land Art et organise des expositions commutables dont les modalités changent tous les jours. Par la suite, Morris utilise le feutre et le plomb — matériaux à la fois lourds, denses et fragiles, et de couleur inerte. Les pièces, généralement de grande taille, analysent les modalités de perception simultanée de l'échelle et du poids (Felt Piece, 1974). Ses œuvres sont présentes dans la plupart des musées d'art contemporain dans le monde ; le Whitney Museum de New York (1970), la Tate Gal. de Londres (1971), lui ont consacré des expositions monographiques, et il était présent dans " Art Minimal I " au C. A. P. C. de Bordeaux (1985) ainsi que dans l'exposition d'Art minimal de la coll. Panza au M. A. M. de la Ville de Paris en 1990.