Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
E

Esquivel (Antonio María)

Peintre espagnol (Séville 1806  – Madrid 1857).

Après des études à l'école des Beaux-Arts de Séville et un début de carrière protégé par le consul britannique Williams, il s'installa à Madrid en 1831 et ne rentra à Séville qu'en 1838-1840 pour soigner un grave risque de cécité et participer à la création du Liceo Sevillano (1838), à l'image du Liceo Artístico y Literario de Madrid, fondé en 1837. Guéri, il reprit sa carrière, fut nommé peintre de Chambre d'Isabelle II en 1843, académicien en 1847 et publia en 1848 un Tratado de Anatomia Pictórica fondé sur son enseignement académique. Soutenue par son talent de dessinateur, cette spécialité le conduisit d'ailleurs à peindre quelques nus (Jeune fille enlevant son bas, 1842, Meadows Museum, Dallas).

   Il fut surtout portraitiste, plein de charme dans les portraits d'enfants (Rafaela Flores Calderón, Madrid, Casón), précis mais un peu froid dans les portraits officiels (Portrait équestre du Général Prim, Madrid, Museo Romántico) et très habile dans deux grands portraits collectifs des intellectuels madrilènes (Lecture de Ventura de la Vega au Teatro del Principe et Lecture de Zorilla dans l'atelier du peintre, Prado). À côté de peintures religieuses, traitées dans le souvenir de Murillo, il illustra aussi les thèmes costumbristes de sa ville natale (Josefa Vargas, 1850, Séville, coll. D'Albe, ou la Charité, 1848, Séville, Hospital de la Caridad). Il écrivit également de nombreuses critiques dans les journaux madrilènes. Son œuvre en fait un des peintres majeurs du XIXe s. espagnol.

essence

Liquide volatil, extrait de certains végétaux ou du pétrole, utilisé comme diluant des peintures à l'huile.

   Les essences naturelles, ou d'origine végétale, étaient connues sous le nom d'" huiles essentielles ". Leur usage remonte, semble-t-il, à Van Eyck. Elles résultent de la distillation directe de certaines plantes (lavande mâle [essence d'aspic], romarin) ou de la distillation, à température inférieure à 180 °C, des oléorésines obtenues par gemmage de diverses variétés de pins (essence de térébenthine). La térébenthine de Venise est extraite du baume de mélèze.

   Les essences minérales proviennent du pétrole ou du naphte. Elles étaient connues dès l'Antiquité, mais leur essor industriel date du milieu du XIXe s. (éther de pétrole, white spirit, pétrole lampant). On prépare aujourd'hui synthétiquement (essences artificielles) un grand nombre de constituants des essences.

   On appelle parfois " peinture à l'essence " une technique où la peinture à l'huile est très fortement diluée à l'essence, ce qui peut donner des effets de gouache ou d'aquarelle. Degas et Toulouse-Lautrec employèrent parfois ce procédé.

estampage

Procédé de reproduction, surtout utilisé en Chine, où il fut connu dès le début de notre ère, et qui s'applique à des motifs, caractères ou dessins, gravés en creux, généralement dans la pierre.

   La méthode la plus répandue consiste à étendre sur l'œuvre à reproduire une feuille de papier légèrement humectée d'une solution d'agar-agar pour augmenter sa plasticité, en la tamponnant de manière qu'elle pénètre légèrement dans les creux, en laissant le papier en place après évaporation. L'opération se fait aussi au moyen d'un tampon d'étoffe fine ou d'un maillet recouvert de cuir souple, si bien que les parties réservées en creux apparaissent en blanc sur fond noir.

   Les estampages peuvent être appréciés au même titre que les originaux (dont ils sont souvent le seul vestige) en fonction de leur ancienneté et de la qualité de leur exécution.

   De nos jours, certains artistes occidentaux, tel Hajdu (mort en 1996), utilisent ce procédé.

estampe

Image imprimée après avoir été gravée ou dessinée sur un quelconque support : métal, bois, pierre lithographique.

   L'estampe occupe une si grande place dans la culture occidentale que l'on peut envisager son évolution de plusieurs points de vue : historique, politique, technique, artistique.

   Elle est intimement liée aussi à l'histoire du livre moderne, qui a absorbé une grande partie de son activité, exploité ses possibilités, influencé son développement. On peut distinguer les rubriques suivantes : illustration du livre ; moyens d'expression des artistes ; publication d'œuvres (reproduction ou interprétation) ; estampes d'ornement, publiées généralement en cahiers et d'une importance capitale pour la diffusion des " motifs " du XVIe au XVIIIe s. ; estampes à caractère scientifique (recueils d'anatomie [Fabrica de Vésale], d'ornithologie [Audubon], de topographie, d'archéologie et d'architecture [Dupérac, Piranèse, I. Silvestre]) ; imagerie populaire des cartes à jouer, des placards, des feuilles volantes du colportage (imageries d'Orléans, d'Épinal). Ces divers domaines s'interpénètrent, mais chacun a son propre développement, ses techniques d'élection, ses historiens particuliers. En art, l'estampe joue essentiellement deux rôles : reproduire une œuvre pour aider à sa connaissance, offrir un mode d'expression nouveau.

   Dans le premier cas, la multiplicité des exemplaires est primordiale ; dans le second, la spécificité des techniques : il s'agit alors de l'estampe originale, dont la définition étroite exige que la planche soit entièrement préparée par l'artiste. La gravure dite " de reproduction " fut d'une importance inappréciable dans le développement international de l'art et demeure précieuse encore aujourd'hui non seulement par la beauté de certaines feuilles, mais aussi parce que quelques-unes d'entre elles nous conservent le souvenir de peintures perdues.

Les types de gravure

On distingue trois types principaux de gravure : la gravure en relief, ou taille d'épargne (les parties restées intactes de la planche, en général de bois, retiennent l'encre, qui est ensuite déposée sur le papier) ; la gravure en creux, ou taille-douce (les sillons, gravés dans la planche de métal, retiennent l'encre ; sous la presse, le papier pénètre dans ces sillons et absorbe l'encre ; le trait est alors en relief sur la feuille) ; les procédés à plat, comme la lithographie, qui ne sont pas, à proprement parler, des gravures : ils sont fondés sur la non-adhérence de l'encre grasse et de l'eau (l'encre est sur la surface de la planche, et l'épreuve, sauf exception, n'a pas de relief).

L'estampe en Europe

L'art d'imprimer des estampes, qui existait en Extrême-Orient dès avant le Xe s., est apparu en Europe aux environs de 1400 ou peut-être même de 1350, sans qu'on soit sûr de son lieu d'origine. Les premiers centres semblent avoir été en Allemagne, dans le domaine bourguignon et en Italie. Le bois gravé a précédé la taille-douce. On pense que l'estampe, du moins l'estampe sur papier, qui n'a peut-être fait que suivre l'impression sur tissu, est apparue comme moyen d'information populaire et à des fins de propagande religieuse. L'estampe serait donc née de l'imagerie. Le bois gravé, qui avait presque disparu de l'estampe d'art et même du livre vers 1800, a repris son rôle à la fin du siècle dernier.

Le XVe siècle

Imprimer une estampe à partir d'une gravure en creux est un procédé proprement occidental. Il est probablement apparu dans le nord de l'Europe ; la technique des graveurs flamands fut longtemps supérieure à celle des italiens. C'est dans les pays du Rhin, des Pays-Bas jusqu'à Bâle, que l'art paraît s'être développé, depuis le Maître des Cartes à jouer, qui, v. 1440, produisait des planches d'un grand intérêt, et le Maître de 1446, ainsi nommé d'après la date de l'une de ses œuvres (Flagellation). Le Maître E. S. fait preuve de progrès technique, tandis que son contemporain, le Maître du Cabinet d'Amsterdam (ou Maître du Livre de raison) [Hausbuch Meister], artiste brillant et original, est le premier à se servir de la pointe sèche. Martin Schongauer, véritable successeur du Maître E. S., fut peut-être son élève. Schongauer améliora beaucoup la technique de l'estampe en creux ; sa maîtrise du burin est remarquable, et l'impression en est régulière et parfaite. Ses tailles sont plus systématiques et plus variées que celles de ses prédécesseurs. Il introduit en outre une noblesse de style nouvelle et un sens de l'espace où s'annoncent les effets de la Renaissance. Ses gravures ont joui d'une autorité européenne. Le développement du burin en Italie fut plus lent, et la production moins abondante. Le principal centre au XVe s. en était Florence, où se pratiquaient deux manières : la " manière fine ", très influencée par l'art des nielles, sinon issue d'eux, et probablement employée par des orfèvres ; la " manière large ", influencée par le dessin à la plume et pratiquée peut-être par des peintres. On peut rattacher à cette manière la seule gravure connue de Pollaiolo (Bataille des nus) et les célèbres gravures de Mantegna. La plupart des gravures florentines furent exécutées dans l'entourage de Botticelli. Après que cette école se fut éteinte (Robetta), la gravure, pour un siècle, disparut presque entièrement de Florence.