Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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paravent

Meuble composé de plusieurs feuilles réunies par des charnières, le paravent est avant tout un ouvrage de menuisier et de tapissier : les feuilles sont faites d'un châssis de bois que le tapissier recouvre d'étoffe. Lorsqu'il fait son apparition, sans doute à la fin du XVIe s., les feuilles sont tendues de serge ou de drap agrémenté de galons de soie, d'or ou d'argent. Associé au préalable, semble-t-il, à la vie religieuse en tant que fond d'autel, il entre dans les appartements au début du XVIIe s., très vite destiné à jouer un rôle dans la vie privée de la société. Il protège des vents coulis, permet d'aménager des sortes d'alcôves et, par sa mobilité même et la diversité de son format et du nombre de ses feuilles, devient un élément essentiel du mobilier. Il est alors assorti à la tenture des murs — tapisserie, tissus plus ou moins riches parfois disposés en bandes, cuir gaufré — et à la garniture des sièges. Les différents inventaires de Versailles à l'époque de Louis XIV font état de près de 437 feuilles de paravents — c'est ainsi que ceux-ci étaient inventoriés —, couvertes de toutes sortes d'étoffes, de tapisseries de la Savonnerie, et même ornées de peintures : fables des Métamorphoses d'Ovide, allégories, grisailles... Il faut ajouter à cela des paravents en laque, étoffe et papier de la Chine, dont la vogue commence dès 1660.

   Au XVIIIe s., la mode des paravents est plus grande que jamais. Les meilleurs peintres de l'époque fournissent des modèles pour leur ornementation, quand ils ne les exécutent pas eux-mêmes : Claude III Audran, Watteau, Desportes, Oudry, Boucher. Ces artistes, qui tout en faisant ce que nous appelons maintenant de la peinture de chevalet, œuvraient également dans les arts qui pour être " décoratifs " n'en étaient pas moins essentiels et représentatifs du siècle : boiseries, tapisseries. Il s'agissait alors de créer l'" environnement " de l'époque, et tous y participaient.

   Le bois occupe alors une place plus importante, suivant l'évolution des sièges, dont le cadre du dossier et de l'assise s'individualise, se couvre de sculptures de couleur, d'or. À côté des toiles et panneaux peints, les matériaux les plus précieux sont utilisés : velours, soieries, toiles imprimées, laques d'Extrême-Orient, vernis Martin, tapisseries des Gobelins, de Beauvais, de la Savonnerie, et, après 1680, lés de papiers peints, lorsque ceux-ci acquièrent leurs lettres de noblesse avec Jean-Baptiste Réveillon.

   Avec la réduction des appartements au XIXe s. et le perfectionnement des moyens de chauffage, le paravent tend à disparaître. Il réapparaît dans la seconde moitié du siècle avec le goût de la " curiosité " et de l'entassement et, autour de 1900, au sein des peintres Nabis. Mettant au service de techniques décoratives leurs théories picturales qui s'appuient " ... sur une conception purement esthétique et décorative, sur des principes techniques de coloration et de composition... ", ces peintres envisagent le paravent soit à la manière des Japonais — feuilles de papier peint à la main, à la colle ou au lavis (K.-X. Roussel), lithographies permettant la reproduction en série (tel le paravent de Bonnard réalisé vers 1899 en 110 exemplaires, dont l'un est conservé au musée d'Orsay) —, soit sous forme de panneaux peints à l'huile (Maurice Denis) ou tendus de lés de tapisserie (Paul Ranson). Il s'agit là de réalisations de peintres, le châssis disparaît totalement sous la surface décorée (Émile Bernard, les Quatre Saisons, 1891). Rares sont les paravents " Art nouveau " où le bois participe au décor : il faut chercher dans l'entourage de Samuel Bing, ancien marchand d'objets d'Extrême-Orient acquis à l'Art nouveau, auquel il consacre son nouveau magasin, ouvert en 1895 ; il faut chercher aussi dans l'œuvre d'hommes tels que Georges de Feure, dont le musée des Arts décoratifs à Paris possède un paravent en bois sculpté et doré tendu de soie brodée et hors de France, en Tchécoslovaquie dans l'œuvre d'Alfons Mucha, en Autriche avec Joseph Hoffmann, en Italie avec Carlo Bugatti, en Espagne avec Antonio Gaudi..

   Après 1910, le goût des paravents se rencontre à la fois dans les rangs de ceux pour qui l'orientalisme reste vivant et dans les rangs de ceux qui cherchent à renouer avec la tradition nationale. Ces paravents sont alors des objets de luxe, souvent en laque : à décor géométrique et animé dans la technique japonaise par Eileen Gray ; polychrome peinte sur parchemin par André Mare (coll. part.) ; gravée sur bois par Armand-Albert Rateau (Paris, musée des Arts décoratifs) ; à décor géométrique et incrusté de coquille d'œuf par Jean Dunand, d'après ses propres cartons ou ceux d'artistes comme Robert Mallet-Stevens. Certains sont tendus d'étoffe imprimée, et les décors sont signés Raoul Dufy, André E. Marty, ou encore utilisent des panneaux articulés avec Eileen Gray : il s'agit plutôt alors de sortes de claustra.

   D'autres enfin sont des œuvres de peintres (Giacomo Balla, Sans titre, 1932, Casa Balla), principalement parmi les surréalistes, Yves Tanguy et Man Ray. Pratiquement ignoré depuis 1940, le paravent semble retrouver un rôle à la faveur de la suppression des cloisons, remplacées par des cellules modulées.

   La renaissance du paravent durant les deux dernières décades est due à des peintres — David Hockney, J. Dine (Landscape Screen, 1969), Helen Frankentheler (Gateway, 1988, paravent, bronze à la cire perdue, eau-forte, relief) —, des sculpteurs — Kenneth Armitage (People, 1980, paravent en plexiglas gravé sur une base d'aluminium brossé, tuyaux fluorescents) —, des artistes verriers — Pasty Nowell aux États-Unis —, des designers : Rey Kawakubo au Japon. Le paravent fait à nouveau partie de l'ameublement en cette fin des années 80, traité par exemple en verre sablé par Guillaume Saalburg ou en bois et métal par Olivier Gagnère.

parchemin

Peau d'animal (agneau, mouton ou chèvre) spécialement préparée pour servir de support à l'écriture et aux enluminures.

   On utilise principalement le derme, ou couche interne blanche et résistante de la peau, laquelle, desséchée, blanchie et polie sur les deux faces, est découpée en feuilles et assemblée en cahiers ou en rouleaux.

   Le parchemin vieilli a un aspect jaunâtre ; il est épais et résistant, et sa surface est plus rugueuse du côté du poil. Toutes sortes de peaux ont été utilisées et il est presque impossible de savoir de quel animal provient le parchemin.

   Le vélin est un parchemin de luxe, fait de peau d'animal jeune ou mort-né (poulain, agneau) de qualité plus fine et translucide. De nos jours, on utilise surtout le côté chair de la peau, tendue, débarrassée de son poil, encollée puis poncée.

Historique

Selon Pline, Ptolémée V, Épiphane, roi d'Égypte, ayant arrêté l'exportation du papyrus, les habitants de Pergame inventèrent le parchemin (membrana pergamena). Il est probable que, le papyrus étant trop fragile, on chercha une autre substance, plus solide et plus souple, mais le parchemin, qui n'apparut pas avant le IIe s. av. J.-C., se répandit en Europe dès le IVe s. apr. J.-C. et fut utilisé jusqu'à la découverte du papier.

   Les peintures de manuscrits du Moyen Âge furent exécutées sur parchemin, dont les peintres se servirent également pour isoler la couche picturale des supports de bois de certains panneaux, ou pour recouvrir certains meubles que l'on voulait décorer de peintures. Pour adhérer au support, les couleurs doivent obligatoirement être additionnées d'un liant, sorte de colle à base d'eau et de divers ingrédients, dont les plus courants sont la gomme (technique de la gouache), le pin, la résine ou l'œuf (technique de la tempera).