Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Watteau (Antoine) (suite)

Le " genre de Watteau "

Pater et Lancret ne sont pas de simples suiveurs de l'art de Watteau, car ils ont connu celui-ci, ont travaillé avec lui, sans pour autant être ses élèves : l'artiste n'eut pas d'élèves. Très tôt pourtant, on s'aperçut de l'importance de son œuvre, et Jullienne fit graver ses dessins (1726) et ses peintures (1727-1734). En outre, Watteau, qui reste un phénomène isolé, fut plagié, et peut-être même aidé dans certaines de ses toiles (Vleughels a-t-il collaboré à la nymphe du Louvre ?) ; Ph. Meusnier s'inspire surtout de ses architectures ; S. Leclerc et B. de Bar, de ses scènes champêtres ; son neveu Louis-Joseph imite ses sujets militaires, et le fils de celui-ci (François-Joseph), ses fêtes galantes, tandis que Boucher reprend ses chinoiseries, que J.-F. de Troy publie des planches de fêtes galantes et que le jeune J.-B. Oudry reprend ses sujets théâtraux (les décorations pour Fagon, 1725 : Comédiens italiens dans un parc, coll. part.). À l'étranger, on assiste à la même diffusion de l'art de Watteau avec Mercier en Angleterre (jusque v. 1740), Quillard en Espagne ou Pesne, appelé par Frédéric II parce qu'il imite bien Watteau, sans compter le nombre de faux exécutés à Paris, au milieu du siècle, pour la clientèle de la cour de Prusse. Une rétrospective Watteau a été présentée en 1984 à Washington et en 1984-85 à Paris et à Berlin.

Les dessins

Les trois plus grandes collections des dessins actuellement conservés (Stockholm, British Museum, Louvre) montrent qu'avec une technique très travaillée de sanguine, de pierre noire et de craie, associées le plus souvent sur un papier teinté, Watteau se montre le plus infatigable observateur : l'élaboration d'un type féminin très caractéristique, la variété du répertoire des attitudes, leur vivacité et leur élégance, la maîtrise du trait et l'admirable parti que l'artiste sait tirer de la matière écrasée sur le papier font de cet ensemble plein de fantaisie la partie la plus fascinante de son œuvre.

Watteau (les)

Peintres français.

 
Louis-Joseph, dit Watteau de Lille (Valenciennes 1731  – Lille 1798). Neveu d'Antoine Watteau, il fut élève de Dumont le Romain (av. 1751), s'installa à Lille en 1755, où il allait devenir une sorte de peintre officiel de la ville v. 1770. Il traita des sujets de fêtes galantes (les Quatre Heures du jour, musée de Valenciennes) et d'anecdotes militaires (le Congé absolu, 1785, id.) où l'on perçoit l'influence de Greuze, qui introduisit une note de sentimentalité subtile dans ses sujets, avant tout décoratifs. Peu marqué par l'art de son oncle, il se montre davantage sensible aux influences flamandes (les Divertissements du camp, 1785, palais de justice de Tournai), comme la plupart des suiveurs de Watteau. Il est représenté au musée de Lille, et l'église Saint-Maurice de cette ville conserve de ses toiles religieuses.

 
Son fils François-Louis-Joseph, dit lui aussi Watteau de Lille (Valenciennes 1758 – Lille 1823) , fut son élève, puis celui de Durameau (1775-1777). Il se fixa à Lille en 1785, où il devint directeur de l'Académie (1812). Ses scènes de bataille dérivent de celles du XVIIe s. et des Parrocel (Défense de Lille, 1796, musée de Lille), et ses scènes galantes se situent dans la même tradition que celles de son père (le Menuet sous un chêne, 1787, musée de Valenciennes), avec, peut-être, une influence plus forte des Pays-Bas, qui fait mettre à l'artiste l'accent sur le pittoresque.

Watts (George Frederic)

Peintre et sculpteur britannique (Londres 1817  – Compton, Surrey, 1904).

Fils d'un accordeur de pianos sans grande clientèle, il dut à l'ambition paternelle et à son talent prodigieux d'aspirer ardemment au titre de peintre d'histoire. Il se forma d'abord avec le sculpteur William Behnes (1827), puis suivit les cours de la Royal Academy, en 1835, pendant quelques semaines. Sa première œuvre exposée à la Royal Academy, le Héron blessé (1837, Compton, Watts Gal.), révèle l'influence de Landseer et d'Etty, mais il modela bientôt son art sur celui de la Renaissance italienne et, lauréat du concours organisé en 1843 pour la décoration à fresque du Parlement (Caractatus Led in Triumph Through the Streets of Rome), il reçut un prix et partit pour l'Italie (les Quatre Cavaliers de l'Apocalypse, 1843-1847, Liverpool, Walker Art Gal. ; Roland poursuivant la fée Morgane, 1846-1848, Leicester, Museum and Art Gal.), où ses relations avec l'aristocratie l'aidèrent, comme elles devaient le faire plus tard, lorsque, à son retour en Angleterre en 1847, il se consacra au " grand art ". Il dut renoncer progressivement, faute d'encouragements, à la réalisation d'un projet qui lui était cher : les fresques monumentales d'une " maison de la vie " évoquant l'évolution de l'humanité. Il retourna en Italie en 1853, travailla à Paris pendant l'hiver de 1855-56, visita l'Asie Mineure et Rhodes en 1856. Nommé A. R. A. en 1867 et R. A. la même année, il alla en Égypte en 1886 et en Grèce en 1887. Entre-temps, il exécuta des portraits vigoureux, comme ceux de Swinburne (1865, Londres, N. G.) ou de Thomas Carlyle (1868, Londres, V. A. M.), tandis que son style, en grande partie inspiré par Titien et Tintoret, s'enrichissait. Au lieu de vastes compositions, il exécuta ensuite des allégories (reprenant les thèmes d'une grande composition jamais réalisée qui aurait évoqué l'Histoire du Cosmos) centrées sur quelques personnages ayant entre eux un lien étroit et qui reflétaient son intérêt croissant pour la sculpture. L'Espérance (1885, Londres, Tate Gal.) est l'une de ses œuvres les plus connues et les plus concises, et on peut y déceler le désespoir sous-jacent à sa vision, grandiose et typique de la fin du XIXe s. L'éclectisme et les limites de l'artiste sont une évidence aujourd'hui, mais on ne peut pas négliger le sérieux de ses intentions ni la variété de ses recherches face à l'académisme des peintres de son temps. Watts fut un portraitiste de talent, renommé en son temps, et cette partie de son œuvre est aujourd'hui encore appréciée. Il est principalement représenté à Compton (Surrey) dans la galerie qu'il fit édifier pour conserver ses propres œuvres (Watts Gal.), à Londres (N. P. G., V. A. M. et Tate Gal.), à Bristol (City Art Gal. : l'Amour et la Mort, 1875), à Oxford (Ashmolean Museum : le Petit Chaperon rouge, 1864) et à Orsay (l'Amour et la Vie, 1893).