Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Rosai (Ottone)

Peintre italien (Florence 1895  – Ivrée 1957).

Il fréquenta de façon irrégulière l'Académie de Florence, et sa formation fut surtout artisanale. Il pratiqua la gravure sur bois dans l'atelier de son père. Lié à Soffici, il adhère au Futurisme entre 1913 et 1915 (Décomposition d'une rue, 1914). Mais sa peinture se rattache plus directement à la " poétique de la solitude " issue de la peinture métaphysique et à l'inspiration populaire et antirhétorique du groupe florentin Strapaese, auquel il fut attaché en qualité de collaborateur au journal Il Selvaggio. La simplification formelle et les volumes nets de ses premières œuvres mettent en évidence sa connaissance de Cézanne et des peintres métaphysiques. Mais Rosai est surtout influencé par la culture provinciale des " macchiaioli " du XIXe s. et par la tradition de l'imagerie populaire (dessins ou affiches illustrés des chanteurs de rues). Sa première exposition personnelle (Rome, 1922) mit en lumière la manière accomplie de celui que l'on appelait le " Douanier Rousseau italien ". Ses œuvres décrivent la banlieue florentine, mélancolique et désolée, avec ses routes et ses tavernes où vit, dans une atmosphère immobile et une solitude figée, un petit monde de musiciens ambulants, de retraités et d'ouvriers (les Philosophes, 1919, Milan, Castello Sforzesco).

   À partir de 1928, son expressionnisme s'accentue ; fidèle à certains thèmes d'inspiration locale, l'artiste accepte toutefois des modèles d'une portée plus vaste et qui le mettent en rapport direct avec l'Expressionnisme européen. Sa touche s'assouplit et devient plus dense ; les tons plombés et violets traduisent avec plus d'intensité une atmosphère de désolation et d'accablement et mettent en évidence la situation dramatique des personnages. Mais c'est surtout entre 1919 et 1922 que Rosai donne ses œuvres les plus abouties. En 1933, il décore de grands panneaux muraux de la gare de Florence. D'importantes rétrospectives de son œuvre ont été présentées à la Biennale de Venise en 1952, à Ivrée (centre Olivetti, 1957), à Florence (palais Strozzi, 1960), à Turin (G. A. M., 1963). Les œuvres de l'artiste sont conservées dans les M. A. M. de Rome, Milan, Florence, Moscou.

Rosales (Eduardo)

Peintre espagnol (Madrid 1836  – id. 1873).

Rosales domine, avec Fortuny et un style très différent, le milieu du XIXe siècle et, comme lui, il mourut prématurément. Fils de fonctionnaire, il fut élevé aux Escuelas Pias de Madrid et entra en 1851 à l'Académie des Beaux-Arts de San Fernando où il reçut l'enseignement de Federico Madrazo. Avec le peintre Vicente Palmaroli (1834-1896), il se rendit dans le sud de la France et en Italie du Nord en 1857 (Bordeaux, Marseille, Nîmes, Gênes, Florence, comme l'attestent les impressions de son journal de voyage). Déjà atteint de la phtisie qui allait l'emporter, il rentre en Espagne puis, vers 1860 obtient une bourse pour un nouveau séjour en Italie (Sienne, Rome notamment). Tobie et l'ange (Casón) montre l'influence qu'exercent alors sur lui les Nazaréens. Il partage ensuite sa vie entre Madrid, les Pyrénées ou la région de Murcie où il se soigne et Rome. En 1873, la Première République lui proposa la direction du musée du Prado, mais il préféra prendre en charge l'Académie espagnole de Rome. Il mourut avant d'entrer en fonction.

   Son talent a d'abord été reconnu à travers ses tableaux historiques, le Testament d'Isabelle la Catholique (1864, Casón) — inspiré de la Fille du Tintoret de Cogniet. Présentation de Don Juan d'Autriche à Charles V (1869, Casón) ou la Mort de Lucrèce, (1871, Caśon). Si leurs compositions peuvent s'inspirer d'œuvres françaises du XIXe siècle, la vigueur du traitement, la subtilité des tonalités et l'ampleur du rythme montrent l'influence de Velázquez.

   On lui doit aussi d'intéressants portraits où il sait allier jeu chromatique et recherche d'expression (le Violoniste Pinelli, Caśon ; la Comtesse de Santoverina (Casón), des paysages et le nu de la Jeune Romaine (Casón) qui traduisent la vigueur et la liberté de son trait. Sa mort prématurée a privé l'Espagne d'un de ses plus grands talents.

Rose-Croix

Reprenant une tradition d'occultisme médiéval, Stanislas de Guaita et Joséphin Péladan fondèrent l'église de la Rose-Croix. Mais le Sâr Péladan se détacha très vite du mage pour créer en 1891 une société artistique parallèle, l'ordre de la Rose-Croix catholique, du Temple et du Graal, dont il s'érigea le grand maître. Il organisa alors les Salons, gestes esthétiques de la Rose-Croix, qui groupèrent quelques années, de 1892 à 1897, à la gal. Durand-Ruel, puis au Champ-de-Mars, les principaux peintres symbolistes européens. Les rêveries évanescentes d'Osbert et d'Aman-Jean, les mythes poétiques de Point et de Séon relevaient, en effet, de la même esthétique idéaliste rosicrucienne que les mystères lyriques de Khnopff, de Fabry, de Delville ou de Schwabe. Cette esthétique, définie par Péladan en 1894, refusait le réel et le laid pour exalter le rêve et prôner une conception mystique de l'art. Disciple du Sâr et consul de la Rose-Croix, Delville fut en Belgique, après 1898, le promoteur de l'Art idéaliste.

Rosenquist (James)

Peintre américain (Grand Forks, Dakota du Nord, 1933).

Après des études à l'université du Minnesota, il obtient une bourse de l'Art Students League (1955) et travaille quelques années à la création d'affiches dans un atelier de publicité. Appartenant à la génération d'artistes connue sous le nom de " pop ", Rosenquist saura tirer parti de cette expérience : le montage tient en effet une grande place dans ses premières peintures, telles que Tôt le matin (1963, New York), où les images morcelées s'assemblent " en un surréalisme de panneau d'affichage " (Barbara Rose). En même temps, les objets ou portions d'objets figurés sont tous rapprochés de la surface de la toile : ainsi est conservé, et dénigré à la fois, l'espace illusionniste. De même que Lichtenstein, en réaction contre l'Expressionnisme abstrait, s'inspire de la bande dessinée, Rosenquist opère parfois des transpositions littérales d'affiches sur sa toile (Sans titre [Joan Crawford], 1964). De son observation du quotidien, il passe bientôt à cette sorte de Néo-Réalisme désabusé, jouant sur les pires conventions picturales, qui trouve son aboutissement dans Fruit Salad (1964). Les peintures-environnements (F 111, à New York, 1965 ; Horse Blinders, 1968-69, Cologne, W. R. M.) déroulent leurs images enchevêtrées sur les quatre murs des salles d'exposition. À partir de 1966, il peint les mêmes sujets, empruntés à la publicité, sur des surfaces ou sur des lamelles de matière plastique transparente, suspendues dans l'espace, se croisant parfois, un plan recoupant l'autre (Sliced Bologna, 1968), de sorte que le spectateur peut littéralement traverser la peinture et évoluer dans son espace. Il a plus récemment détourné dans ses œuvres le spectacle offert par la nature (Welcome to the water Planet VI, 1988-89), mais la fantaisie a toujours sa place (Imagine an apple eaten, 1990).

   L'artiste est représenté dans les musées de Cologne (W. R. M.), Stockholm (Moderna Museet), Ottawa (Painting for the American Negro, 1962-63, N. G.), New York (Marilyn Monroe I, 1962, M. O. M.A. ; Whitney Museum), Buffalo (Albright-Knox Art Gal.), Paris (President election, M. N. A. M.), Pasadena (Art Museum). Une rétrospective a été consacrée à l'artiste (Moscou ; Valence [Espagne]) en 1991, et une exposition (San Diego, Museum of Art) en 1996.