Janneck (Franz Christoph)
Peintre autrichien (Graz 1703 – Vienne 1761).
Fils du peintre styrien Martin Janneck, il est l'élève de M. Vangus à Graz. Dans les années 1730, il réside à Vienne et exécute des portraits qui accusent la connaissance de modèles français. Vers 1735, il voyage en Autriche et en Allemagne du Sud, particulièrement à Francfort, où il poursuit ses études avec C. H. Brand chez Josef Orient. En 1740, il est de nouveau mentionné à Vienne. Il devient assesseur du directeur de l'Académie en 1752. Tout comme son ami Platzer, mais avec un coloris moins vif, il peint de petits tableaux de cabinet dans la tradition néerlandaise où l'influence française est aussi présente, ce qui peut conduire l'artiste à une fade imitation de Watteau : Scène galante (Salzbourg, Residenzmuseum), la Danse et la Conversation en plein air (Vienne, Österr. Gal.), le Christ et ses disciples (musée de Karlsruhe), Paysage (musée de Darmstadt). D'une facture brillante, les scènes pittoresques sont surchargées de figures aux riches costumes, minutieusement détaillées et souvent placées sur un fond de paysage comme celles de J. G. Platzer et Norbert Grund. À Vienne, il fut en relation avec C. L. von Hagedorn, à qui il donna des éléments autobiographiques lors de la rédaction de sa Lettre à un amateur (1755).
Janssens (Abraham)
Peintre flamand (Anvers v. 1574 – id. 1632).
Auteur de tableaux religieux, allégoriques e mythologiques, il fut l'un des premiers à introduire le Caravagisme en Flandre. Apprenti en 1584-85 chez le romaniste Jan Snellinck, il est signalé à Rome en 1598. Encore proche des romanistes, il semble alors plus attiré par le Maniérisme des Zuccari, comme en témoigne Diane et les nymphes (coll. part.), œuvre signée et datée de 1601, année de sa maîtrise à Anvers, où il résidera jusqu'à sa mort. La Vieillesse s'appuyant sur la Foi et l'Espérance pour échapper au Temps (1600, Bruxelles, M. R. B. A.) dérive directement d'un tableau de Frans Floris (Ermitage), puis Janssens soumet ces influences à celle de Caravage, ce qui permet d'avancer l'hypothèse d'un deuxième séjour à Rome et l'influence des œuvres de Saint-Louis-des-Français, inaugurant un style vigoureux, aux formes amples et calmes, sculpturales, simplifiées et cernées par de fortes oppositions d'ombre et de lumière (l'Escault et la ville d'Anvers, 1610, musée d'Anvers ; Crucifixion, musée de Valenciennes). Le réalisme des visages et le rendu des chairs sont mis en valeur par des couleurs contrastées et généralement vives : la Joie et la Mélancolie (1623, Espagne, coll. part. ; réplique à Dijon, musée Magnin). Mais, si Rubens a adopté avec aisance certains traits du Classicisme de Janssens, celui-ci, en revanche, subit de plus en plus fortement l'emprise de son rival (la Paix et l'Abondance liant les flèches de la Guerre, 1614, musée de Wolverhampton ; Diane et ses nymphes, musée de Kassel ; l'Abondance, Anvers, maison de Rubens ; ce qui le conduisit à exaspérer les contrastes et à durcir le modelé pour affirmer sa personnalité ; sa brutalité anticipe Jordaens, et parvient malgré tout à concurrencer Rubens (l'Annonciation, musée de Gand). Après 1618, les deux styles pratiqués par l'artiste se côtoient dans son œuvre sans jamais fusionner.
Janssens (Jan)
ou Joannes Janssens
Peintre flamand (Gand 1590 – id. [?] v. 1650).
Fils de Govard Janssens, médecin réputé de Gand, il alla étudier à Rome (après 1612-1620), puis revint dans sa ville natale, où il fut maître en 1621 et doyen de la gilde en 1635 et 1646. La plupart de ses tableaux connus sont conservés à Gand, soit au musée (Annonciation, Grand Couronnement d'épines, Petit Couronnement d'épines), soit dans les églises (Saint-Pierre : Couronnement d'épines, 1627). Marqué par son séjour italien, il peignit des œuvres d'un caravagisme violent, en rapport avec celui de Baburen.
japonisme
Terme utilisé dans le dernier quart du XIXe s. pour désigner la mode, alors croissante, des estampes, recueils de motifs décoratifs et objets d'art japonais.
Pour de nombreuses raisons, liées tant à l'histoire des relations de l'Occident et du Japon qu'à la recherche de solutions neuves pour sortir de l'éclectisme triomphant, le japonisme joue un rôle déterminant dans l'évolution de la peinture, des arts décoratifs et de l'architecture en Europe et aux États-Unis à la fin du XIXe s. et au début du XXe.
Longtemps ignoré du monde occidental, le Japon apparaît, dès sa première mention — sous le nom de Cipangu — dans le Livre des merveilles de Marco Polo, comme une île civilisée, riche (Christophe Colomb crut la reconnaître lorsqu'il aborda Haïti à la fin de 1492) et invincible. Les récits rapportés par les premiers marchands portugais, qu'une tempête jeta sur la côte de Tanegashima en 1542, puis par les missionnaires confirmèrent cette opinion. Lorsqu'en 1639 Iemitsu ferme son pays aux Européens, la rareté des échanges qui en résulte — échanges faits par la seule Compagnie hollandaise des Indes orientales en son modeste comptoir de Deshima face à Nagasaki — rend encore plus admirative l'image que l'on se fait du Japon.
Quelques relations de voyage, celles de Kaempfer (publiée en France en 1732), de Thunberg (1796), de Siebold (qui séjourne au Japon de 1823 à 1829 et peut se rendre à Yeddo), maintiennent une certaine connaissance de la civilisation japonaise, celle que peut avoir un peintre comme Ingres, lorsqu'il note dans le cahier IX (feuillet 48, musée de Montauban) une héroïque " histoire à peindre en plusieurs tableaux " tirée des Annales japonaises.
Après la mission du commodore Perry en 1853, les États-Unis obtiennent en 1854 un premier traité commercial avec le Japon ; ils sont suivis bientôt par la Grande-Bretagne, la Russie, la Hollande, la France (traités de 1858), puis les autres pays européens. En 1868, la chute du 15e shōgun et la politique d'occidentalisation de l'empereur Mitsu-Hito allaient encore favoriser les échanges avec l'Europe et les États-Unis.
La première participation importante du Japon à une exposition universelle eut lieu à Londres en 1862, organisée par les diplomates anglais au Japon, et, parmi le personnel de la firme Farmers et Rogers, chargée de vendre les produits japonais à l'issue de cette manifestation, se trouvait le jeune Arthur Lasenby Liberty (1843-1917), qui devait ouvrir, en 1875, East India House à Regent Street et jouer un rôle considérable dans l'histoire de l'Art nouveau.
À Londres encore, l'architecte Godwin ornait, en 1862, les murs dépouillés — à la manière japonaise — de sa maison avec des gravures japonaises, et le peintre américain Whistler peuplait ses tableaux d'éléments de décor nippons : des paravents (le Paravent doré, le Balcon), des éventails, des poteries bleu et blanc, des costumes en soieries orientales (la Princesse du pays de la porcelaine, Salon de 1865, Washington, Freer Gal.). Plus tard, en 1876-77, lorsqu'il peint le décor bleu et or de la Peacock Room (Washington, Freer Gal.), Whistler utilise des motifs décoratifs d'inspiration japonaise qui annoncent déjà certains aspects japonisants du style 1925. L'artiste, qui voyagea souvent entre Paris et Londres, joua un rôle important dans la diffusion du japonisme en France.
À Paris, les pavillons japonais des expositions universelles, à partir de 1867, obtiennent un immense succès, qui atteint son apogée en 1878. Cette année-là, en même temps que la collection d'œuvres religieuses rapportées par Émile Guimet en 1876, sont exposés les paysages peints au Japon par son compagnon de voyage Félix Régamey. À l'exposition universelle de 1889, par la présentation méthodique d'une centaine de livres et de gravures de la collection Gonse, l'art japonais, qui passait jusqu'alors pour essentiellement décoratif, est enfin admis au rang de grand art.
Mais la vogue grandissante des estampes japonaises — qui devaient être si précieuses pour les peintres — se fit par un cheminement indépendant de ces grandes manifestations officielles.
S'il faut tenir pour légendaires certaines affirmations, d'ailleurs tardives, concernant la découverte de ces estampes, il est certain que ce sont les artistes qui, les premiers, ont perçu l'intérêt d'œuvres que les Japonais considéraient comme de peu de valeur. Ce n'est vraisemblablement pas en 1856 que le peintre Bracquemond a découvert, chez l'imprimeur Delâtre, un volume de la Mangwa d'Hokusai ayant servi à caler des porcelaines expédiées par des Français établis au Japon, mais il faut noter que Delâtre imprima, à partir de 1861, 18 planches inspirées notamment de la Mangwa dans l'ouvrage éclectique de A. de Beaumont et E. Collinot, Recueil de dessins pour l'art et l'industrie, et que Bracquemond ne s'inspira de cette œuvre que dans une série de gravures de 1866 (Paris, B. N., cabinet des Estampes). Et ce n'est pas non plus à la même époque que le jeune Monet aurait trouvé à Zaandam " en dépliant un paquet la première estampe japonaise qu'il lui eût été donné de voir ". Peut-être en a-t-il vu au Havre, port où arrivaient les envois du Japon avant le percement du canal de Suez et où il séjourna jusqu'en 1859 avant d'y retourner en 1862.
Le témoignagne d'Ernest Chesneau, dans son long article " le Japon à Paris " (Gazette des beaux-arts, 1878), est plus important : " C'est un peintre qui, flânant chez un marchand de curiosités venues de l'Extrême-Orient, que l'on confondait alors indistinctement sous le nom commun de chinoiseries, découvrit dans un récent arrivage du Havre des feuilles peintes et des feuilles imprimées en couleur, des albums de croquis au trait rehaussés de teintes plates dont le caractère esthétique — et par la coloration et par le dessin — tranchait nettement avec le caractère des objets chinois. Cela se passait en 1862. " Celui qui eut " cette pénétration du regard de découvrir dans les confusions de la Chine morte les clartés du Japon vivant " n'est pas expressément désigné : Chesneau laisse le choix entre Stevens, Whistler, Diaz, Fortuny ou Alphonse Legros.
Plusieurs boutiques spécialisées dans les produits chinois annoncent, à partir de 1861, des articles japonais, notamment " À la porte chinoise ", maison fondée sous la Restauration et située alors au 36, rue Vivienne (Baudelaire y est client en 1861 ; les Goncourt y auraient acheté un premier album japonais en 1860). Quant à la célèbre boutique de M. et Mme Desoye, au 220, rue de Rivoli, qui allait devenir un lieu de rencontre des amateurs et des artistes, elle n'existe qu'à partir de 1862, puisqu'elle apparaît dans l'Annuaire du commerce Didot-Bottin de 1863.
En 1878, Chesneau cite, parmi les artistes collectionnant des estampes japonaises, Manet, James Tissot, Fantin-Latour (il légua sa collection d'estampes japonaises à la bibl. de Grenoble), Degas, Carolus-Duran, Monet, Félix Régamey, Bracquemond et Jules Jacquemard. Son témoignage est déjà bien tardif ; dès 1863, Millet et Théodore Rousseau possédaient des albums japonais, et l'on sait que Fantin-Latour, en 1865, représentait, au premier rang du Toast à la vérité (tableau détruit), son ami Whistler en kimono.
Après 1867, le goût pour le Japon " descend aux bourgeois ", comme le notent les Goncourt dans leur Journal le 29 octobre 1868, mais il ne perd pas de son actualité dans le groupe d'artistes qui se réunit au café Guerbois et rassemble déjà les principaux des futurs impressionnistes.
L'influence japonaise commence à se faire sentir dans la composition hardie des tableaux (diagonales de l'Absinthe de Degas), dans le goût des lumières franches (Th. Rousseau) et dans l'intérêt nouveau pour les sujets de la vie quotidienne. Des " japonaiseries " sont représentées, par exemple, dans le Portrait de Zola (Orsay) par Manet en 1868, où l'on peut reconnaître un paravent et une estampe moderne de Utagawa Kuniaki II, représentant un lutteur, équivalent japonais du Fifre (Orsay). L'écrivain avait noté (" Édouard Manet, l'homme et l'artiste ", dans Revue du XIXe siècle, 1er janv. 1867) une ressemblance entre la peinture de Manet et l'" élégance étrange " et les " taches magnifiques " des estampes japonaises. James Tissot, qui, dès 1863, situait certaines de ses scènes de genre au " pays des mousmés ", expose au Salon de 1869 des Jeunes Filles regardant des objets japonais. La folie japonisante envahit tout vers 1875 et atteint les grands magasins (cf. Au bonheur des dames de Zola) ; et sont encore témoins de ce goût exotique le Portrait de Nina de Callias de Manet (1874, Orsay) ou Japonnerie de Monet (1876, Boston, M. F. A.).
Si la plupart des voyageurs s'intéressent aux bibelots et céramiques de toutes sortes, ainsi que le faisait déjà, lors de son voyage de 1860, le baron de Chassiron, également amateur de livres illustrés (musée de La Rochelle), il est remarquable de noter que Théodore Duret, futur défenseur des impressionnistes, recherche exclusivement les xylographies et albums japonais qu'il a entrevus à Paris, lorsqu'il part pour l'Extrême-Orient, en 1871, en compagnie de Cernuschi (lui-même amateur de bronzes si importants pour l'art décoratif). Il trouve des œuvres de Hokusai et des artistes contemporains qui vont faire, en 1873, partie de l'exposition organisée au palais de l'Industrie. Des marchands importants apparaissent bientôt : Sichel a voyagé au Japon en 1873-74, Bing vend des objets japonais au South Kensington de Londres (Victoria and Albert Museum) dès 1875, et le Japonais Hayashi reste à Paris après l'Exposition universelle de 1878. Ils contribuent à faire progresser la connaissance de l'art japonais, et certaines des japonaiseries qui avaient enchanté toute une génération commencent à sembler bien vulgaires. En 1883, Louis Gonse organisa une " exposition rétrospective de l'art japonais ", gal. Georges Petit, où l'on put admirer, parmi des milliers d'objets, quelques estampes d'Utamaro et des premiers maîtres de l'ukiyo-e, dont le rôle allait être capital pour le mouvement synthétiste et cloisonniste autour de Gauguin, d'Émile Bernard et d'Anquetin, en 1886-1888. Vincent Van Gogh, qui organisa en 1887, chez la Segatori au Tambourin, avenue de Clichy, la première exposition rassemblant uniquement des estampes, se sent responsable de l'évolution de ces jeunes artistes. Pour sa part, il " préfère les crépons vulgaires, colorés à tons plats ", à son avis plus utiles pour les peintres que les tirages délavés et trop raffinés. Il en représente dans les deux portraits du Père Tanguy et s'inspire directement d'estampes d'Hiroshige (Pont sous la pluie, Pruniers en fleurs, l'Arbre) ou de Kesai Yeisan (Japonaiserie : Oiran), ou indirectement (le thème des iris, repris plusieurs fois à Arles et à Saint-Rémy, est à rapprocher du Paysage aux iris d'Hiroshige).
Bientôt, les expositions d'estampes se succèdent à l'instigation de Bing, fondateur de la luxueuse revue le Japon artistique : en 1888, dans sa galerie, 22, rue de Provence ; en 1890, à l'École des beaux-arts ; en 1893, chez Durand-Ruel.
Hiroshige et Utamaro y sont à l'honneur, et Pissarro, enthousiaste, écrit le 2 février 1893 : " Ces artistes japonais me confirment dans notre parti pris visuel. " En effet, comme dans le domaine des arts décoratifs, après une première approche où le japonisme n'était souvent qu'un des aspects de l'exotisme, les artistes prennent conscience de l'intérêt profond, au point de vue esthétique, d'exemples qui ont servi tour à tour de source d'inspiration ou de justification à leurs partis nouveaux.
Claude Monet, l'un des plus fidèles amateurs, continua à explorer les possibilités de l'art japonais, où il avait dû trouver déjà une confirmation de son goût pour les colorations lumineuses ; c'est certainement de suites comme les Vues du mont Fuji qu'il s'est inspiré pour ses séries des peupliers, des meules, des cathédrales de Rouen ; on ne peut nier la relation entre l'ensemble des Nymphéas (Paris, Orangerie) et le décor intérieur des temples ou châteaux japonais, et particulièrement le pavillon orné de chrysanthèmes du Nishi Honganji à Kyōto, dont la réplique fut exposée à Londres en 1910, puis à Lyon en 1914.
La génération nouvelle était fort intéressée par le côté primitif et pur de l'estampe japonaise, qu'elle se plut à rapprocher de l'imagerie d'Épinal ; Gauguin et ses amis adoptent les traits cernant le motif, les teintes plates et vives, l'absence de perspective, le caractère décoratif des courbes (tiges, vagues) et des grandes diagonales ; Gauguin fait aussi des emprunts directs à Hokusai, par exemple Jacob et l'ange de la Vision après le sermon (1888, Édimbourg, N. G.). On a mis en lumière une source japonaise pour le pointillisme de Seurat, et signalé la présence dans les archives Signac d'un motif décoratif japonais, probablement un modèle de kimono dont l'arrangement de lignes a inspiré le décor du fond du célèbre Portrait de Félix Fénéon de Signac (1890, New York, M. O. M. A.). Cela prouve bien que non seulement les estampes de l'ukiyo-e, mais aussi les peintures, les motifs décoratifs, les pochoirs de papier brun découpé servant à l'impression des tissus (Paris, musée des Arts décoratifs) ont fourni aux artistes un répertoire nouveau.
Bien des aspects de l'Art nouveau ne sauraient s'expliquer sans cette référence aux modèles japonais ; et il faut rappeler que Bing à Paris, Meier-Graefe à Berlin et à Paris, Liberty à Londres, Tiffany à New York se sont tous occupés d'art japonais, avant de se consacrer à la diffusion d'un style qui rompait avec l'Académisme traditionnel et la hiérarchie des genres.
Il faut citer ici les recherches techniques des graveurs, qui cherchent à imiter par l'eau-forte ou la lithographie en couleurs les effets de la xylographie japonaise (Mary Cassatt, Bonnard, Henri Rivière, Orlik), l'illustration des livres (Beardsley, Bradley, Otto Eckmann), le développement de l'art de l'affiche, avec Grasset, De Feure et surtout Toulouse-Lautrec, et enfin, en corrélation avec ces tendances, les préoccupations multiples des artistes qui se mettent au service de l'art industriel (Van de Velde) ou de l'artisanat (les Nabis notamment). Bonnard, surnommé le " Nabi très japonard ", Vuillard furent, avec Breitner peut-être, ceux qui poussèrent le plus loin ces recherches d'une ornementation qui envahit toute la surface du tableau.
La leçon du japonisme — qui apparaît dans des détails comme les monogrammes que, à la suite de Whistler, Toulouse-Lautrec, Steinlen, Maurice Denis imitent des caractères japonais — devient de plus en plus difficile à percevoir, car elle est souvent complètement assimilée.
Mais l'intérêt croissant qu'à leur tour les architectes — de Frank Lloyd Wright à Walter Gropius — eurent pour la construction japonaise et sa signification permit de connaître le Japon sous un aspect fort différent de celui qui était apparu, si merveilleusement parfait et riche d'enseignements, aux yeux des peintres de la seconde moitié du XIXe s. Déjà, on avait parfois perçu, dans la technique rapide de la peinture au pinceau, dans l'irrégularité voulue de certaines poteries traditionnelles liées à la cérémonie du thé, une démarche de l'artiste différente de celle du peintre occidental. Et ce rôle laissé au hasard, à la nature, tel qu'il apparaît, non plus à travers l'étude d'éléments formels, mais à travers une méditation plus ou moins factice sur le zen, trouve ses prolongements dans l'art de Mathieu ou dans celui, infiniment plus raffiné, de Tobey.