Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
B

Braque (Georges) (suite)

Les dernières œuvres, les " Ateliers "

La guerre lui inspire des œuvres plus graves, qui sont comme un reflet de l'austérité des temps (le Pain, 1941, M. N. A. M.). À partir de 1947, le travail de l'artiste est souvent interrompu par la maladie, mais il réalise entre 1949 et 1956 la série des Ateliers, huit toiles remarquables par leur densité un peu funèbre et ésotérique et par l'opiniâtreté avec laquelle l'artiste semble avoir voulu y rassembler tous ses souvenirs, toutes les recherches et les thèmes de son œuvre (Atelier VI, 1950-51, Saint-Paul-de-Vence, fondation Maeght). Dans certaines de ces toiles apparaît un oiseau dont les ailes, déployées dans un espace abstrait, seront le thème de la décoration que Braque exécute en 1952-53 pour le plafond de la salle étrusque du musée du Louvre et constituent le dernier thème de méditation d'un artiste qui semble avoir éprouvé dans ses dernières œuvres le besoin d'échapper au monde clos et inanimé que représente toute sa peinture.

   On lui doit aussi des cartons de vitraux pour la chapelle Saint-Dominique à Varengeville et pour la chapelle Saint-Bernard à la fondation Maeght à Saint-Paul-de-Vence. Il est bien représenté à Paris (M. N. A. M.), ainsi que dans la plupart des grands musées du monde entier. L'œuvre de Braque a peu fait l'objet de grandes rétrospectives (Paris, 1973 ; Munich et New York, 1988 ; Saint-Paul-de-Vence, 1994) mais a bénéficié d'expositions thématiques auditieuses (" les Papiers collés ", Paris et Washington, 1983 ; " l'Invention du Cubisme ", New York et Bâle, 1989-1990.

Brascassat (Jacques-Raymond)

Peintre français (Bordeaux 1804  – Paris 1867).

Charles X lui accorda une pension pour séjourner deux ans à Rome ; il y peignit des paysages qui constituent le meilleur de son œuvre. À son retour en France, le grand succès remporté auprès du public par des peintures d'animaux domestiques imitées des Néerlandais l'incita à se consacrer à ce genre, où il se renouvela peu. On lui doit aussi quelques gravures. Le musée de Reims garde un important ensemble de ses études.

Bray (les de)

Peintres néerlandais.

 
Salomon (Amsterdam 1597  – Haarlem 1664). Peut-être élève de Lastman, il dut se fixer assez tôt à Haarlem, où sa présence est attestée dans la garde civique de cette ville en 1615 et où il a pu, même, recevoir sa formation artistique, sous Goltzius et Cornelis. Marié en 1625 à Haarlem, après un séjour à Copenhague en 1621, il devait déployer une activité très diverse : un livre de ses poésies parut en 1627 et il comptait parmi les membres éminents de l'importante société de rhétorique locale ; il pratiqua l'architecture, dessinant notamment des projets pour l'hôtel de ville de Haarlem en 1629 et dirigeant la construction d'un orphelinat à Nimègue en 1644-45. La peste le frappa en 1664 ainsi que toute sa famille. Bray appartient à l'intéressante génération des peintres d'histoire qui précèdent Rembrandt, issus du Maniérisme et, sous la direction de Lastman, trouvant une voie originale face au Caravagisme utrechtois. Il existe ainsi des affinités entre lui et des artistes tels que Grebber, Bor, César Van Everdingen, et bientôt Knupfer et Jacob Van Loo. À une forte influence de Lastman, Bray ajoute une certaine souplesse, due à l'heureux exemple de Cornelis, et un lyrisme flamand inspiré de Jordaens ; il aboutit ainsi à une peinture d'histoire largement monumentale, aux puissants effets d'éclairage et de modelé et d'un réalisme franc et robuste qui crée un climat assez rembranesque. Comme chez Lastman, les thèmes sont souvent empruntés à l'Ancien Testament, tels le superbe Eliezer et Rebecca du musée de Douai, le Rêve de Jacob du musée épiscopal de Bois-le-Duc, nettement dérivé de Lastman, Suzanne et les Vieillards de 1648, au musée Pouchkine de Moscou, ou l'étrange Jael, Deborah et Barak du musée de Ponce à Porto Rico.

   Parmi les tableaux consacrés au Nouveau Testament, souvent attribués à l'école de Rembrandt, citons la belle Annonciation du musée de Narbonne (dessin daté de 1641, le tableau étant dans le commerce à Rotterdam, avant-guerre), le Christ aux Oliviers (musée de Kassel) ou la Rencontre d'Élisabeth et de Marie (musée d'Emden, Allemagne). En dehors des tableaux d'histoire (contribution au décor de la Huis ten Bosch*), Bray a laissé quelques portraits et surtout de belles figures d'études relevant de la peinture de genre, comme l'étonnante Jeune Fille nue se peignant du Louvre ou la Jeune Femme du musée d'Orléans, ou les pendants de Dessau et de Dresde (un Berger et une Bergère, de 1635, qui appellent la comparaison avec des œuvres de même genre par Honthorst, Bloemaert ou Moreelse). De telles Têtes au modelé luisant ont beaucoup d'affinités avec l'art de Grebber ; d'autres font penser à des élèves de Rembrandt comme Flinck, Bol ou Backer. L'œuvre dessiné de Salomon Bray est riche et permet de mieux étudier ses sujets historiques et mythologiques, tout en confirmant un fondamental éclectisme qui va jusqu'au pastiche pur et simple de Rembrandt (Circoncision, 1654, Albertina).

 
Jan (Haarlem 1627 – id. 1697). Fils de Salomon, il fut son élève pratiqua à la fois la peinture d'histoire académisante dans le goût de son père et le portrait. Plusieurs fois à la tête de la gilde entre 1667 et 1685, trois fois marié (av. 1669, en 1672, en 1678), il devait connaître de graves difficultés financières.

   Fort attachantes, occupant une place à part dans la peinture néerlandaise, les grandes toiles religieuses de Jan de Bray, aux couleurs modérées mais aux formes amples, sont d'un modelé large et souple dérivé de l'art de Salomon : l'Adoration des mages (1674, musée de Bamberg), David à la harpe (id., Brunswick, Herzog Anton Ulrich-Museum) ou les imposantes toiles du musée Frans Hals de Haarlem aux harmonies un peu tristes (Vêtir et nourrir les pauvres, de 1663, Jésus bénissant les enfants). L'artiste a traité avec la même monumentalité noble et grave et le même goût pour les volumes ronds les histoires de l'Ancien Testament (les Filles du Pharaon, 1661, Rotterdam, B. V. B.) ou adapté son style à la mode académique des sujets antiquisants comme dans Antoine et Cléopâtre à Hampton Court (1669) ou Achille et les filles de Lycomède (1664, musée de Varsovie).

   Le portrait constitue toutefois la principale spécialité de Jan de Bray, dont la meilleure période est la décennie 1658-1668. Si l'influence de Hals a joué un rôle, l'artiste demeure pourtant fidèle à ses harmonies de gris, dignes et subtiles, dans la lignée d'un Verspronck ; son sentiment d'une lumière vivante sans être jamais intense reste marqué par la grande leçon rembranesque. L'un des plus anciens portraits datés, l'Orphelin (1654, Mauritshuis), est déjà un chef-d'œuvre, que suivit le solide Portrait d'homme du Louvre (1658). Les délicats portraits de Régents et de Régentes de l'orphelinat et de la léproserie de Haarlem, tous au musée de cette ville et s'échelonnant de 1663 à 1667, constituent l'une des rares tentatives originales réalisées à Haarlem, face à Hals. Citons encore le Portrait d'inconnu du musée Jacquemart-André à Paris, daté de 1660, les effigies de Pieter Van der Wiel au musée d'Osnabrück (1666) et de Kries Van Wiessen au musée d'Emden (R. F. A.) [1672]. Bray ne devait pas échapper à la mode du portrait mondain et devait céder peu à peu à l'influence de Bartholomeus Van der Helst ou de Bol, comme le prouvent déjà l'emphatique Abraham Casteleyn et sa femme (1663, Rijksmuseum), puis les grands portraits en travestissement mythologique tels que la Famille (1677, musée de Haarlem). Les succès de Bray portraitiste ayant été considérables, plusieurs artistes gravèrent d'après lui, tels Cornelis et Jan Visscher, P. Holsteyn, J. Klopper.

 
Jan eut plusieurs frères artistes : Dirck, l'un des plus fameux graveurs sur bois de son temps et dont un tableau de fleurs est conservé au Rijksmuseum (1678) [dernière œuvre connue de l'artiste], Jacob († 1664) , dont on ne connaît pratiquement pas d'œuvres, et Joseph († 1664) , qui a peint une Nature morte très fine (Dresde, Gg).