Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Dorazio (Piero)

Peintre italien (Rome 1927-Pérouse 2005).

Il expose dès 1946 à Rome. Après s'être détaché de la peinture figurative, il crée avec Pietro Consagra, Achille Perelli et Julio Turcato en particulier, le groupe " Forma I " en 1947 qui, très futuriste d'esprit et bien que très engagé politiquement à gauche, va s'opposer au courant du réalisme socialiste illustré par Renato Guttuso. L'année suivante, Piero Dorazio adhère au Movimento Arte Concreta (M. A. C.) qui venait d'être créé en 1948 à Milan. À ce moment, il a déjà effectué des séjours à Paris, rencontrant en particulier Magnelli (qui lui-même a tissé dès 1914 des liens avec Picasso, Léger et le poète Guillaume Apollinaire), qui l'influence, ainsi que Robert Delaunay et le Kandinsky de l'époque du Bauhaus. Il a l'occasion d'effectuer un séjour aux États-Unis en 1953-54 au cours duquel il rencontre les principaux artistes de l'école de New York. Il trouve son style vers 1957-58. Celui-ci est fondé sur l'étude des compénétrations iridescentes significatives de la manière de Balla, à qui d'ailleurs Dorazio a rendu hommage, et sur les recherches du Divisionnisme.

   Dorazio est un peintre de la couleur et de la lumière (Quarantaquindici. 1967), dont il va également essayer de traduire le mouvement. Il a recours pour cela à des répétitions uniformes de trames colorées régulièrement disposées et superposées (Moto cromatico, 1980). Cette répétition uniforme de type " all-over ", qui occupe le champ pictural de manière systématique, a pour effet de supprimer toute composition et tout motif.

   La structure de l'œuvre est créée par ce réseau coloré plus ou moins fin, plus ou moins large, plus ou moins serré (le Fuggenti mura, 1987) ou plus ou moins aéré. Si la facture est impersonnelle, ses lignes et ses réseaux continuent d'être réalisés à la main, le geste continuant à avoir une importance primordiale pour Dorazio. (Marengo 1989). Sa première exposition personnelle a lieu en 1957 à Rome. En 1960, il reçoit le prix de la Biennale de Venise et dès lors effectuera de fréquents séjours aux États-Unis, où il sera nommé professeur à l'université de Pennsylvanie. Ses œuvres sont conservées dans les principaux musées américains et européens. L'artiste vit et travaille à Todi. À certains moments, son œuvre est très proche de l'unisme polonais de Strzeminski, dont il partage les préoccupations.

   Une rétrospective concernant la production de l'artiste a été présentée à Paris au M. N. A. M. en 1979, ainsi qu'une exposition à l'Albright Knox Art Gallery de Buffalo en 1979. Plus récemmment, une nouvelle rétrospective a été consacrée à Dorazio (musée de Grenoble et G. A. M. de Bologne) en 1990-1991.

Doré (Gustave)

Peintre français (Strasbourg 1832  –Paris 1883).

Dès l'enfance, il manifesta des dons de dessinateur et, très tôt, il collabora au Journal pour rire de Philipon. Il fut révélé en 1854 avec l'illustration d'un Rabelais, et l'édition fameuse des Contes drolatiques de Balzac (1855) confirma son autorité. Sa production fut immense. Il donna d'innombrables dessins comiques, illustra une foule d'auteurs anciens et modernes, traita en peinture des sujets religieux et historiques, des scènes de genre, des paysages. Son art, inégal, fut curieusement anachronique et apatride. Indifférent aux nouveautés, Doré prolongea le Romantisme au-delà de l'Impressionnisme, survivance qui, chez lui, doit plus à un penchant esthétique qu'au souci philosophique animant ses imitateurs. En outre, il ne pénétra guère dans les voies tracées par ses compatriotes, mais il ressuscita les premiers romantiques anglais et allemands. Si, illustrateur, il évoqua Dürer (Don Quichotte, 1863), Rembrandt (Sabat des sorcières, étude pour Macbeth, 1863, musée de Strasbourg), il en appela plus souvent aux Anglais. Il fit revivre pour l'Enfer de Dante (1861) le tragique Blake. Dans le Château enchanté (étude pour les Contes de Perrault, 1863, musée de Strasbourg), il transcrivit le médiévisme de Bonington. Les Icebergs (étude pour le Chant du vieux marin, 1875, id.) naquirent des marines hallucinées de Turner, alors que l'Entrée dans l'empire de la Lune (Roland furieux, 1879) démarqua Russel. L'exemple britannique fut aussi déterminant pour son œuvre peint. Ses paysages, qui en constituent la part la plus attachante, témoignent d'une conception très éloignée de celle des écoles de Barbizon et d'Honfleur. Peu soucieux de métaphysique, ne cherchant pas à faire vibrer une atmosphère, Doré transmua une nature vraie en monde imaginaire, lui conférant un aspect lunaire par une lumière décolorée, des tons acides (Paysages aux musées de Carpentras, de Grenoble, de Strasbourg). Il redit ainsi ce qu'un demi-siècle auparavant exprimèrent des Anglais, tels Cozens, Martin, Ward ou Palmer, à qui il emprunta une touche en forme de gouttelettes. De même, il rencontra les Allemands : la Cathédrale dans la montagne de Friedrich (v. 1812, Düsseldorf, K. M.) fut une préfiguration d'un Doré surpassé. Il se voulut artiste universel : il sculpta même. De cette ambition découla son éclectisme et son éparpillement. Peintre incompris du public français, Doré fut adulé par les Anglais, qui édifièrent la " Doré Gallery ", et nombre de ses œuvres demeurent cachées dans les coll. part. d'outre-Manche et d'Amérique. Le Petit Palais à Paris, les musées de Nantes et de Bourg-en-Bresse présentent quelques-uns des immenses tableaux à sujets religieux ou littéraires de Doré, dont le musée de Strasbourg possède un important ensemble de peintures et surtout de dessins et d'aquarelles.

Dorigny (Charles)

Peintre français (†  1551 [?]).

D'après les mentions qui le concernent à Fontainebleau et à Paris (en 1534, en 1536 et en 1548), il apparaît comme un artiste d'une certaine importance. Il donna des projets pour les médaillons sculptés de l'Hôtel de Ville de Paris et fit partie de l'équipe de Rosso à la galerie François-Ier de Fontainebleau. Cité avec Jean Cousin pour l'Entrée de Henri II (1549) et, en 1548, pour des travaux d'urbanisme à La Rochelle et à Paris, il fut chargé de peindre à la chapelle d'Orléans, aux Célestins, un tableau qui est sans doute la Déposition de croix (1548, Paris, église Sainte-Marguerite, autref. attribuée à Salviati), où l'on décèle l'influence de Rosso et d' Andrea del Sarto.