Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Ballets russes

La compagnie des Ballets russes, qui a existé de 1909 à 1929, est née de la rencontre de Michel Fokine et de Serge de Diaghilev. En découvrant l'art d'Isadora Duncan, le chorégraphe Michel Fokine (Saint-Pétersbourg 1880-New York 1942) comprit le bouleversement qu'il pouvait apporter aux ballets classiques. De son côté, Serge de Diaghilev (1872-1929) était un amateur d'art attiré par la nouveauté et Paris. La première représentation des Ballets russes eut lieu le 19 mai 1909 au théâtre du Châtelet avec en particulier les Danses polovtsiennes, tirées du Prince Igor. Ce premier spectacle des Ballets russes révéla un art total dans lequel la danse masculine, remise en honneur par Nijinski, s'intégrait au ballet, conçu comme un cadre pour l'étoile ; le mouvement, grâce au chorégraphe, était adapté à la musique colorée et riche des Russes et, surtout, Diaghilev avait donné aux peintres la place jusqu'alors abandonnée aux fabricants de décors : l'œuvre picturale joue un rôle d'autant plus important qu'elle est conçue par rapport à la musique et à l'acteur.

   Le jugement très sûr de Diaghilev, son goût pour les manifestations d'avant-garde firent des saisons suivantes des spectacles très appréciés. On lui doit en 1910 la révélation d'Igor Stravinski, à qui il avait commandé la partition de l'Oiseau de feu. En 1911, le Petrouchka de Stravinski est encore emprunté à la tradition russe, mais le Spectre de la rose, créé la même année sur un livret de Jean-Louis Vaudoyer, annonce la tendance des Ballets russes à se dénationaliser. En 1912, les Ballets russes deviennent une troupe indépendante, dont le siège est à Monte-Carlo ; la compagnie perd alors son caractère purement national. Diaghilev fait appel aux hommes qu'il juge susceptibles de renouveler à la fois la peinture et l'art chorégraphique. Dans les très beaux décors de Bakst, l'Après-midi d'un faune, créé en 1912 sur le prélude de Debussy, suscite un scandale ; la symphonie chorégraphique de Ravel, Daphnis et Chloé, est mal accueillie. Un scandale éclate encore en 1913, lors de la représentation du Sacre du printemps de Stravinski. Mais le Coq d'or de Rimsky-Korsakov, créé en 1914 avec des décors de Gontcharova, remporte un grand succès. La première période des Ballets russes prend fin avec la guerre. Diaghilev et Fokine se séparent et un nouveau maître de ballet, Léonide Massine, est engagé. Diaghilev provoque un nouveau scandale en présentant, en 1917, dans une atmosphère particulièrement tendue par la guerre, un ballet riche de conséquences pour l'évolution de l'art et qui a révélé au grand public le Cubisme : Parade, dont l'argument revient à Cocteau, la musique à Satie, les décors et les costumes à Picasso, la chorégraphie à Massine. À partir de ce moment, les décors seront tous signés par les grands maîtres de la peinture : Derain, la Boutique fantasque (1919) ; Picasso, le Tricorne, Pulcinella ; Matisse, le Chant du rossignol (1920).

   L'activité des Ballets russes pendant leurs dernières années, de 1924 à 1929, est marquée par l'interprétation des œuvres les plus modernes : dans le domaine de la musique, puisque Darius Milhaud, Francis Poulenc, Erik Satie, Henri Sauguet, Serge Prokofiev, Georges Auric travaillent pour cette compagnie, tout comme les chorégraphes George Balanchine et Bronislava Nijinska (la sœur du danseur) ; pour les décors et les costumes, Giorgio De Chirico, Georges Rouault, André Bauchant, Juan Gris, Georges Yakoulov, Pevsner et Gabo, Juan Miró, Max Ernst, Georges Braque, Maurice Utrillo, André Derain. Diaghilev disparaît en 1929. Sa conception du ballet, synthèse de tous les arts, a bouleversé le monde du spectacle et a connu une grande postérité, dont l'esprit se ressent encore aujourd'hui, par exemple dans l'union du chorégraphe Merce Cunningham avec le peintre Robert Rauschenberg et le musicien John Cage.

Ballets suédois

En 1920, le Suédois Rolf de Maré (1888-1964) et le chorégraphe Jean Börlin (1893-1930) ont engagé les danseurs de l'Opéra royal de Suède et fondé la compagnie des Ballets suédois, renouvelant ainsi l'expérience de Diaghilev onze ans auparavant. Pour son premier spectacle, Maré reprit à la Comédie des Champs-Elysées Jeux de Debussy, créé en 1913 par Diaghilev. Après l'Homme et son désir (1921), poème de Claudel dansé sur une musique de Darius Milhaud, Jean Cocteau, comme il l'avait déjà fait pour Diaghilev avec Parade (1917), fournit à Rolf de Maré un spectacle total qui réunit les grands noms de l'art contemporain : les Mariés de la tour Eiffel, avec une musique de Germaine Tailleferre, Georges Auric, Arthur Honegger, Darius Milhaud, Francis Poulenc ; les costumes et les masques étaient de Jean Hugo, les décors d'Irène Lagut. Dans la Création du monde de Darius Milhaud (1923), Fernand Léger fournit le décor monumental et les costumes, et Blaise Cendrars l'argument. Vient ensuite Within the Quota (1923), où la musique populaire américaine de Cole Porter sert un argument américain dans des décors de Gerald Murphy, qui anticipent sur l'esthétique du pop art et les recherches de Bob Wilson. Maré fera appel aussi à Giorgio De Chirico. L'art des Ballets suédois atteignit son apogée dans Relâche (1924), " ballet instantanéiste en deux actes et un entracte cinématographique et la queue du chien ". L'argument et les décors étaient de Francis Picabia, la musique d'Erik Satie, l'entracte de René Clair, qui avait réalisé pour l'occasion un film d'esprit dadaïste. Relâche fut la dernière création de cette compagnie.

Ballin (Mogens)

Peintre danois (Copenhague 1871  – id. 1914).

Formé dans une académie privée, il découvrit l'art français chez Mette Gauguin. À Paris, en 1891, il prit contact avec les peintres modernes et devint, grâce à Verkade, un fidèle du " temple des Nabis ", pour lesquels il organisa en 1893 une exposition à Copenhague. Il n'a laissé que peu de tableaux, surtout des paysages et des natures mortes dans le style de l'école de Pont-Aven et des Nabis. Après 1900, il abandonna la peinture pour se consacrer à l'art décoratif. Depuis l'exposition " L'éclatement de l'Impressionnisme " (Saint-Germain-en-Laye), le musée du Prieuré a acquis Paysage breton ainsi que des dessins.