Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
M

Medek (Mikuláš)

Peintre tchèque (Prague 1926  – id. 1974).

Fils de l'écrivain Rudolf Medek, il fit ses études à l'Académie des beaux-arts, puis à l'École des arts et métiers de Prague, d'où il fut exclu en 1949. Ses premières œuvres, dessins colorés d'une extrême précision, sont conçues dans l'esprit d'un surréalisme vériste (le Bourdonnement du silence, 1950). Après 1954, Medek exécute une série de tableaux figuratifs dans lesquels les gestes de la vie quotidienne perdent leur sens, où l'espace qui enveloppe les protagonistes est lourd de menaces (Action I, l'œuf, 1955-56 ; le Grand Repas, 1956, musée de Prague). Puis les figures se réduisent à des signes extrêmement simples, faits de rectangles et de cercles (la Vénus bleue, 1958, appartenant à l'artiste). Au début des années 60, le peintre accorde une importance de plus en plus grande à la matière, qui devient le véhicule de l'expérience psychique. Le tableau est, selon lui, dès lors, " une surface sensible sur laquelle l'événement qui s'est déroulé laisse traces et empreintes, témoignages matériels de sa réalité " (Événement imprévu à la frontière d'une aire rose de 16 200 cm², 1962-63 ; Croix de fer I, Hluboká, gal. Aleš ; 21 000 cm² de micro-illusions bleues). On retrouve ici les thèmes auxquels l'artiste revient sans cesse comme menace de destruction, danger d'irruptions inopinées dans des espaces clos. Des figures allusives réapparaissent plus tard dans des espaces intérieurs oppressants, suggérés par les lignes d'intersection de parois (les Deux Inquisiteurs, 1965, musée de Hradec Králové). Vers 1970, l'artiste introduit dans le tableau des éléments empruntés au monde des machines, symboles d'une civilisation hypertechnique, et qui réaffirment l'idée du danger (cycle des Constructeurs de tours).

médium

Terme employé pour désigner le liant d'une peinture.

Mehoffer (Jozef)

Peintre, graveur et écrivain d'art polonais (Ropczyce  1868  – Cracovie  1946).

Il fit ses études à l'École des beaux-arts de Cracovie (1887-1889), à l'Académie de Vienne (1889-90) et à Paris (Académie Colarossi et École des beaux-arts, à l'atelier de Bonnat) de 1891 à 1896. Sa peinture, influencée par Matejko, dont il était l'élève et le collaborateur, et par la Sécession viennoise, est, par excellence, décorative : arabesque souple de la ligne, gamme savoureuse des coloris intenses, goût prononcé pour les dorures, riches ornements et motifs populaires. Mehoffer a souvent recours à l'allégorie et au symbole, associés à des personnages réels (Jardin étrange, 1903, musée de Varsovie). Il est l'auteur de plusieurs paysages (Soleil de mai, 1907, Varsovie, M. N.), de scènes d'intérieur (Bibelots sur une cheminée, 1895, Poznań, M. N.) et d'innombrables portraits. Comme professeur à l'Académie des beaux-arts de Cracovie à partir de 1902, il joua un rôle d'animateur et fut l'un des fondateurs de l'association " Sztuka ", qui organisait des expositions d'art polonais jusqu'à l'étranger. Ses décorations murales occupent une place importante dans son œuvre (Cracovie, église Notre-Dame, en collaboration avec Matejko ; château de Wawel), ainsi que ses vitraux exécutés pour la cathédrale de Wawel et pour celle de Fribourg (ces derniers attirèrent l'attention de Hodler). Il réalisa également le rideau de scène du Théâtre de Cracovie.

Meidner (Ludwig)

Peintre allemand (Bernstadt 1884  – Darmstadt 1966).

Élève de l'Académie de Breslau (1903-1905), il s'installe à Berlin en 1905. Un séjour à Paris (1906-1907) lui révèle Cézanne et surtout Van Gogh. Tempérament d'un lyrisme excessif, il emprunte d'abord au Cubisme certains procédés d'écriture et au Futurisme un accent destructeur, qui se donne libre cours dans une série de " paysages apocalyptiques ", qu'il expose en 1912 à la galerie Der Sturm d'Herwarth Walden, dans une exposition du groupe de peintres Die Pathetiker, qu'il a fondé avec Jacob Steinhardt et Richard Janthen, visions prémonitoires de la guerre (la Ville en flammes, 1913). Ses nombreux portraits (Moi et la ville, 1913) et autoportraits, peints et dessinés, rappellent par leur facture ceux de Kokoschka, mais s'en distinguent par leur agressivité tourmentée (Autoportrait, 1915, musées de Berlin). Vers 1925, Meidner inaugure une manière plus réaliste, où le modelé puissant des ombres et des lumières met en évidence le caractère (Lotte Lenya, 1925, Berlin, Schiller-Theater). Ses dernières œuvres prolongent la tradition de Corinth.

   L'artiste a laissé également des écrits rédigés dans un style violent et heurté semblable à celui de son œuvre peint et graphique (Septemberschrei, 1920, Berlin ; Gang in die Stille, 1929, Berlin). Réfugié en Angleterre pendant la dernière guerre, il vécut ensuite à Francfort, puis dans le Taunus.

Meissonier (Jean-Louis Ernest)

Peintre français (Lyon 1815  – Paris 1891).

Fils d'un négociant en épicerie, il commença à se faire connaître, en 1834, par des vignettes illustrant la réédition d'ouvrages de Bernardin de Saint-Pierre. À cette occasion, il prit le goût des costumes du XVIIIe s., dont il déguisa les personnages animant les scènes de genre qui firent son succès (les Joueurs d'échecs, Hambourg, Kunsthalle ; le Liseur, Louvre, Un poète, id., les Amateurs de peinture, Paris, musée d'Orsay). Ces tableautins, inspirés des intimistes néerlandais du XVIIe s., prolongèrent une mode qui connut une grande faveur à l'époque romantique. D'une production pléthorique, il faut retenir quelques pièces attestant l'extrême habileté du peintre (le Vin du curé, 1860, musée de Reims). Protégé de l'empereur, qu'il accompagna pendant la campagne d'Italie (Solferino, 1863, musée de Compiègne), il entreprit une suite à la gloire de Napoléon (1814, Paris, musée d'Orsay). Oubliant pour quelques-uns de ces tableaux sa précision de maniaque, il leur insuffla une liberté de chose vue (le Général Championnet, musée de Lyon). Il sut parfois traduire une émotion (la Barricade, 1848, Louvre), une luminosité réelle (Promenade à Antibes, 1868, Paris, musée d'Orsay), voire une grandeur épique (le Siège de Paris, 1870, id.). Meissonier jouit de son vivant d'un immense succès, attesté par les prix phénoménaux de certaines de ses œuvres. 1814 (Paris, Orsay) fut acquis par Alfred Chauchard en 1890 pour le prix de 850 000 F. La défaveur qui suivit cet engouement excessif paraît tout aussi excessive. Le Louvre, le musée d'Orsay et la Wallace Coll. de Londres conservent de très importantes séries d'œuvres de cet artiste. Une rétrospective lui a été consacrée (Lyon, M. B. A.) en 1993.