Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
I

impressionnisme (suite)

Degas : les mécanismes de la vie

Après un voyage à la Nouvelle-Orléans, Degas s'installe à Paris, et l'œuvre qu'il entreprend le montre attaché définitivement aux mécanismes de la vie quotidienne, dont il poursuit l'exploration systématique. Ses moyens sont différents de ceux de ses amis. Il se méfie du plein air et revendique les droits de l'imagination. En réalité, il se montre un observateur fidèle, voire maniaque, de la réalité. S'il travaille à l'atelier d'après des dessins ou des esquisses, il est peut-être celui qui donne le mieux l'impression de capter la vie dans ses palpitations et ses fluidités les plus délicates : il tire parti des éclairages de scène violents et dirigés, mais le plus souvent par contraste avec des pénombres, des demi-teintes, des lumières incertaines, créant pour un seul objet des gammes d'intensité très diverses. Les techniques de cadrage et de mise en page empruntées à l'art de l'Extrême-Orient, les vues plongeantes, les diagonales sont pour lui le moyen d'établir pour un même sujet des variations frappantes.

Présence de la ville

La vie urbaine, alors en plein développement, ne pouvait rester étrangère aux impressionnistes, amoureux de toutes les manifestations contemporaines. Monet peint de 1876 à 1878 des paysages urbains à la gare Saint-Lazare, au pont de l'Europe, à la sortie des voies de chemin de fer, paysages où le modernisme du thème est vite dépassé au profit d'une atmosphère. De son côté, Manet réalise une série de scènes parisiennes dont les sujets, marqués par le naturalisme de Zola et de Maupassant, sont transfigurées par la liberté, l'improvisation avec lesquelles elles sont traitées : Nana (1877, Hambourg, Kunsthalle), le Bar des Folies-Bergère (1881, Londres, Courtauld Inst.).

L'éclatement du groupe

Les années 1878-1882 seront très difficiles, et d'abord sur le plan financier. Le chanteur Faure, amateur de peinture, met sa collection en vente : c'est un échec, comme le sera la vente, par décision de justice, des toiles réunies par Hoschedé. Sur le plan moral, les difficultés ne seront pas moindres. De violents tiraillements se produisent au sein du groupe, où Degas ne joue pas toujours le meilleur rôle. Il suffit de rappeler le mot cruel que cet artiste a prononcé à l'encontre de ses amis : " Ils restent inférieurs à l'œuvre qu'ils tentent, ils bégaient sans pouvoir trouver le mot. "

   Cependant, l'idée de l'Impressionnisme continue son chemin. Théodore Duret publie une brochure, les Peintres impressionnistes. Charpentier, qui publie un hebdomadaire artistique et littéraire, offre à certains peintres son local, où l'on peut voir en 1879 les pastels de Renoir, en 1880 les peintures de Manet et de Monet. En 1881, la conjoncture économique est quelque peu meilleure : Durand-Ruel reprend ses achats et commence même à verser de petites mensualités à divers artistes.

   Grâce à ses efforts, le groupe, à l'occasion de l'exposition de 1882, présentera encore une relative cohésion. Mais la volonté d'action commune n'existe plus. Chacun aspire à suivre désormais la voie qu'il s'est tracée. La plupart des artistes se sont éloignés de Paris. Sisley s'est fixé à Saint-Mammès, près du canal du Loing. Monet a découvert Giverny. Pissarro est à Éragny, au cœur du Vexin. Cézanne est revenu en Provence. Renoir vagabonde avant d'adopter la côte méditerranéenne. Les impressionnistes restent pourtant liés les uns aux autres ; ils se fréquentent et continuent à échanger leurs idées et leurs soucis. C'est grâce à l'énergie de Monet que l'Olympia de Manet entrera au musée du Luxembourg (Paris). De même, Renoir, exécuteur testamentaire de Caillebotte, parviendra à vaincre les réserves de l'Administration et à faire accepter 38 tableaux sur les 67 qui avaient été offerts au Louvre.

   Préoccupés d'assurer l'accomplissement de leur œuvre personnelle, les impressionnistes se montrent indifférents aux nouvelles recherches et aux personnalités plus jeunes qui s'affirment à côté d'eux. Seul Pissarro, toujours généreux, garde le contact avec les peintres de la jeune génération. C'est lui qui protège la vocation tardive de Gauguin. Il s'intéresse aussi à Seurat, qui s'applique à formuler scientifiquement les conquêtes empiriques de l'Impressionnisme. Lors de la dernière exposition du groupe en 1886, Monet, Renoir, Caillebotte et Sisley ont préféré se retirer ; dominée par Pissarro et grâce à la présence de Seurat, qui a été accepté sur son insistance, elle est ouverte sur l'avenir. Enfin, la publication en 1886, par Félix Fénéon, d'un texte important, les Impressionnistes, qui annonçait le dépassement de l'Impressionnisme et qui prenait parti pour Seurat, au sujet duquel le critique créait le terme de " néo-impressionnisme ", indiquait qu'une page était définitivement tournée.

imprimatura

Couche de couleur opaque, de ton uni, recouvrant uniformément le premier enduit et destinée à le protéger et à préparer l'effet de la peinture proprement dite.

   L'imprimatura, ou fond teinté, fut très employée à partir de la seconde moitié du XVIe s. ; elle était de préférence rouge, brune ou brun-noir. Titien, Rubens et Velázquez n'appliquaient ces couches de couleur opaque que sur des zones déterminées du support, dans certains cas, selon les effets de profondeur recherchés. La composition de l'imprimatura est variable : elle est tantôt un mélange d'huile, de céruse, de jaune de Naples (composition mentionnée par Vasari), tantôt un simple vernis teinté, tantôt une détrempe de tonalité claire.

Inchbold (John William)

Peintre britannique (Leeds 1830  – Headingley, près de Leeds, 1888).

Il commença par être dessinateur chez un lithographe à Londres, étudia avec Louis Haghe avant de s'adonner à l'aquarelle. Il entra en 1847 à la Royal Academy, où il exposa pour la première fois en 1852. Il voyagea en Europe et en Algérie, visita plusieurs fois la Suisse, où il s'installa les dix dernières années de sa vie. Il y avait d'abord séjourné avec Ruskin, qui s'était intéressé à son œuvre (le Lac de Lucerne, 1857, Londres, V. A. M.). Mais le critique rompit finalement avec lui, comme il devait le faire plus tard avec John Brett (1858). Préoccupé de reproduire fidèlement la nature, il fut considéré en son temps comme un des principaux paysagistes préraphaélites (il était entré en contact avec eux par le biais de Rossetti) [le Début du printemps, Oxford, Ashmolean Museum ; Bolton ou la Biche blanche de Rylstone, 1853, Leeds, City Art Gal.]. En 1877, il publia un recueil de vers, Annus Amoris. Son œuvre est représentée à Londres (Tate Gal. et V. A. M.).