Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Szenes (Arpad)

Peintre français d'origine hongroise (Budapest 1897  – Paris 1985).

Très jeune, il commence à peindre et à dessiner. À partir de 1918, il fréquente l'Académie libre de Budapest, où il a comme professeur Rippl Ronaï, familier des Nabis, qui l'entretient de l'art français. En 1919, il est frappé par les affiches cubistes, futuristes ou constructivistes, qui envahissent la ville. En 1922, il expose ses premières œuvres, abstraites, au musée Ernst. Il voyage en Allemagne (où il s'informe de Klee, de Kandinsky et du Bauhaus) et en Italie (Rome, Florence). En 1925, Szenes se fixe à Paris, exécute des caricatures pour gagner sa vie, et travaille à l'Académie de la Grande-Chaumière, où il rencontre en 1929 Maria Helena Vieira da Silva, qu'il épouse l'année suivante. Il entre en contact avec les surréalistes, Miró, Ernst, Tanguy, mais ne s'associe pas à leur groupe. Ses œuvres relèvent alors d'une figuration subtile et discrète (Harmonium, 1932) ou d'une abstraction symbolique (Course de taureaux, 1935). De 1940 à 1947, Arpad et Maria sont à Rio de Janeiro, où leur atelier devient le lieu de rassemblement de jeunes peintres. De retour à Paris, Szenes évolue progressivement vers l'abstraction, dans une manière d'abord assez construite (Discussion, 1951). Cette discipline s'assouplit ensuite pour exprimer un lyrisme profond, mais retenu, filtré, fixé presque à la dérobée par un coup de pinceau à la fois léger et sûr, dans une gamme où prédominent les ocres et les blancs (Calcaire, 1956 ; Persépolis I, 1964). Cet art d'effusion secrète, en accord avec le monde, s'est aussi pleinement exprimé au moyen de la gouache, dont les premières œuvres exécutées de cette manière ont été exposées en 1960 à la gal. des Cahiers d'art. Szenes, qui s'est manifesté régulièrement chez Jeanne Bucher, a été naturalisé français en 1956. Il est notamment représenté à Paris (M. N. A. M. : le Rubis, 1963), Dijon (donation Granville), Montpellier, Rennes, Rouen, New York (Guggenheim Museum), Rio de Janeiro, Zurich (Kunsthaus). Une importante rétrospective lui a été consacrée en 1971-72, successivement présentée à Rouen, Rennes, Lille, Orléans, Dijon et Lisbonne. Le M. A. M. de la Ville de Paris lui consacra une exposition en 1974, et les galeries Jeanne Bucher et Jacob, à Paris, en 1985.

Szinyei-Merse (Pál)

Peintre hongrois (Szinye-Ujfalu  1845  – Jernye  1920).

Élève du peintre Mezei, il étudia ensuite à Munich sous la direction de Wágner et de Piloty. Échappant à l'emprise académique, son talent s'affirme de bonne heure, notamment dans les portraits réalistes qu'il exécute lors de séjours dans sa famille (Tsigmond Szinyei-Merse, 1867 ; István et Béla, 1868). Deux toiles (le Linge qui sèche, l'Escarpolette, Budapest, G. N. H.), réalisées durant l'été de 1869, alors que Monet et Renoir peignaient la Grenouillère, annoncent les données essentielles de l'Impressionnisme. Seul et sans encouragement à Munich, Szinyei-Merse hésitait cependant à persévérer dans cette voie, mais son tableau capital, le Déjeuner sur l'herbe (1873, Budapest, G. N. H.), constitue une solution aboutie et spécifiquement hongroise des problèmes du plein air, indépendante de l'Impressionnisme français. Un chromatisme diffus et vibrant s'allie à une conception généreuse. Ce chef-d'œuvre souleva l'indignation générale, et Szinyei-Merse, découragé, se retira à Jernye et ne peignit plus que quelques portraits de sa femme (Femme en robe violette, 1874). Vers 1882, l'artiste chercha à rallier les mouvements contemporains. Deux expositions de ses œuvres (Vienne et Budapest) ne reçurent encore qu'un accueil défavorable. Après quelques études de plein air (Rivière, 1883 ; Fonte des neiges, 1884), Szinyei-Merse abandonna la peinture. Il n'en retrouva le goût qu'en 1896, lorsque le meilleur de son œuvre fut exposé lors des fêtes du millénaire hongrois à Budapest. Les jeunes peintres de Nagybánya, connaissant les impressionnistes français, découvrirent alors ces réalisations précoces de l'Impressionnisme hongrois. Les expositions se multiplièrent (Paris, 1900 ; Munich, 1901 ; Berlin, 1910 ; Rome, 1911) et l'artiste connut enfin le succès. Ses derniers tableaux marquent le sommet d'un art parvenu à maturité, au lyrisme paisible non dénué de symbolisme (Paysage d'automne, 1900 ; Thuya, 1912 ; Couleur de l'automne, 1914). La tradition en fut continuée par les peintres de Nagybánya et de Postnagybánya. L'essentiel de la production de Szinyei-Merse se trouve à la G. N. H. de Budapest, à l'exception de quelques toiles conservées dans des collections américaines (Mère avec enfant, 1869 ; Pavillon des bains au lac de Starnberg, 1872).