Gleizes (Albert)
Peintre français (Paris 1881-Saint-Rémy-de-Provence 1953).
Issu d'une famille d'artistes — il est le fils d'un dessinateur sur étoffes et le neveu du peintre néo-symboliste L. Comerre —, séduit par l'œuvre de Renan et d'A. Comte, Gleizes participe à la fondation de l'association E. Renan (1905), puis, avec Duhamel et Vildrac, à celle de l'abbaye de Créteil (1906), phalanstère d'intellectuels dont les idées sont exprimées par l'unanimisme de J. Romains. Gleizes abandonne alors l'Impressionnisme, qu'il pratique depuis 1901, pour un synthétisme (Paysage des Pyrénées, 1908, New York, Guggenheim Museum) bientôt supplanté, sous l'influence du Portrait de Jouve (Paris, M. N. A. M.) de Le Fauconnier et des recherches de Léger, par un Cubisme cézannien dont la Femme au phlox (1910, musée de Houston) sera le manifeste à la salle 40 des Indépendants de 1911. L'immense Dépiquage des moissons (New York, Guggenheim Museum), exposé au Salon de la Section d'or de 1912, témoigne, au-delà du langage cubiste, atténué d'ailleurs par un tempérament classique, de l'expression simultanée des éléments dynamiques de la vie moderne. Influencé par Léger (les Footballeurs, 1912-13) ou par le Cubisme analytique de Picasso (Femmes cousant, 1913, Otterlo, Kröller-Müller), Gleizes est bouleversé dès 1912 par les disques simultanés de Delaunay, et retrouve comme lui des " équivalents plastiques " dans les rythmes circulaires colorés (Portrait de Florent Schmitt, 1915, Paris, M. N. A. M.). Aux États-Unis de 1915 à 1917, Gleizes traverse une crise mystique et se trouve sollicité entre les recherches de Picabia (Brooklyn Bridge, 1915, New York, Guggenheim Museum) et du Blaue Reiter (la Maison du gouverneur, 1917). Revenu en France, il peint des " tableaux objets " rythmés de grands pans géométriques (Peinture pour une gare, 1920, musée de Grenoble), s'installe en 1923 à Serrières, où il rédige la Peinture et ses lois, puis, imprégné de la mystique des Groupes agricoles et artisanaux de Moly-Sabata, fondés en 1927 à Sablons (Isère), recherche un espace animé de spirales et inspiré des formes celtiques, romanes et orientales (les Sept Éléments, 1924-1934, Paris, M. N. A. M.). Il évolue à partir de 1935 vers un lyrisme moins compassé, plastiquement résumé par les illustrations des Pensées de Pascal (1948). Auteur avec Metzinger du premier livre sur le Cubisme (Du Cubisme, 1912), Gleizes a publié de très nombreuses études sur l'art dans ses rapports avec la religion et la société : Art et religion, Art et production, Art et science (Sablons, Moly-Sabata, 1933). Son principal ouvrage reste la Forme et l'histoire (Paris, 1932), où il affirme la prédominance de l'architecture sur les autres arts : c'est le plus organisé spirituellement et socialement, et il dérive directement du mouvement humain. Gleizes s'était retiré en 1939 à Saint-Rémy-de-Provence. Le musée de Lyon conserve un nombre important de ses œuvres.
Mme Juliette Roche-Gleizes a légué en 1982 un grand nombre d'œuvres de Gleizes à la Fondation nationale des arts graphiques et plastiques et créé la Fondation Gleizes afin de favoriser la connaissance et le rayonnement de l'œuvre du peintre et de recevoir artistes et artisans dans ses maisons de Moly-Sabata et de Méjades. Une exposition consacrée à l'art sacré d'Albert Gleizes fut organisée par le musée des Beaux-Arts de Caen en 1985.
Gleyre (Charles)
Peintre suisse (Chevilly, Vaud, 1806 – Paris 1874).
Il s'initie à la peinture dans l'atelier d'Hersent, à Paris, et complète sa formation par un voyage en Italie (1828-1832) et un long séjour en Orient : ses esquisses montrent des compositions très mouvementées aux couleurs saturées (la Reine de Saba, 1839, Lausanne, musée des Beaux-Arts). Le Soir ou les Illusions perdues (Louvre) lui valut un prix au Salon de 1843. En 1838, il s'établit définitivement à Paris. Après des débuts difficiles, il reçoit une commande du duc de Luynes pour le château de Dampierre, puis prend la direction de l'atelier de Delaroche et, professeur tolérant, forme un grand nombre d'artistes comme Gérôme, Émile-François David, Whistler, Renoir, Bazille, Monet et Sisley, les futurs impressionnistes, qui se lient dans son atelier. Outres les toiles d'histoire commandées par la ville de Lausanne (l'Exécution du major Davel, les Romains passant sous le joug, 1853, musée de Lausanne), la peinture de Gleyre est empreinte de mysticisme et d'éléments mythologiques. Sa technique, d'une perfection cristalline, ne fait qu'ajouter au caractère énigmatique de son romantisme. Bien que célèbre, il mène une vie retirée, repoussant les distinctions officielles comme la Légion d'honneur. À la fin de sa vie, son œuvre est marquée par la recherche d'une beauté idéale, suave et pénétrante (le Coucher de Sapho, 1867, Lausanne, musée des Beaux-Arts ; le Bain, 1868, Norfolk, Chrysler Museum).
Gnoli (Domenico)
Peintre italien (Rome 1933 – New York 1970).
Il se forme à Rome dans l'école privée de C.A. Petrucci et expose des dessins dès 1950. Il commence à travailler pour le théâtre en 1953 (Old Vic à Londres), se fait connaître aussi comme illustrateur et dessine pour diverses revues. Ses premières œuvres peintes montrent des bâtiments traités avec un certain archaïsme (Tempio, 1958, Rome, coll. part.), puis des personnages en gros plan (Femme lisant un journal, 1963, Uckfield, coll. part.). À partir de 1964, il s'oriente, parallèlement au pop art, vers une manière originale où les détails très agrandis des corps, des objets, des vêtements donnent à la vision des choses les plus banales une présence surabondante : Coupe au rasoir, 1964 (Paris, coll. part.) ; Fermeture Éclair, 1967 (Genève, coll. part.) ; Nœud de cravate, 1969 (Cologne, coll. part.). La technique très châtiée se distingue par une matière grenue. L'artiste est représenté notamment à Amsterdam (Stedelijk Museum) et à Rotterdam (B. V. B.), où une importante exposition s'est tenue, ainsi qu'au C. N. A. C. de Paris, en 1973-74. Ses œuvres de la période 1963-1969 ont été présentées à Madrid (Fundacíon Caja de Pensiones) en 1990.