Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Camargo (Iberê)

Peintre et graveur brésilien (Restinga Seca, Rio Grande do Sul, 1914-Porto Alegre 1994).

Venu en Europe en 1947, il s'y forme et fréquente les ateliers de Lhote et de De Chirico. Son œuvre, très personnelle, se distingue par des éclaboussures de matière en même temps que par la vigueur des signes. Une figuration dramatique émerge de ses surfaces surchargées. Camargo, qui réside à Rio, où il a été professeur de peinture à l'Instituto de Belas-Arte, est devenu l'un des principaux artistes brésiliens de sa génération. La Biennale de São Paulo lui consacra en 1966 une salle spéciale. Son œuvre est représentée au M. A. C. de cette ville (Expansion, 1964) et dans de nombreuses collections particulières.

Camarón y Boronat (José)

Peintre espagnol (Ségorbe, près de Valence, 1731  – Valence 1803).

Fils d'un sculpteur d'origine aragonaise, Camarón acheva ses études à Madrid (1752) puis se fixa à Valence, où il tint une place considérable pendant un demi-siècle, comme peintre et comme membre fondateur de l'Académie de San Carlos (1768). Virtuose fécond, décorateur habile, il pratiqua tous les genres : peinture religieuse à Valence (Couronnement d'épines, cathédrale ; Martyre, de Sainte Catherine, grand retable de l'église Santa Catalina ; Vierge des affligés, musée de Valence) et à Madrid (participation au décor du cloître de San Francisco el Grande) ; compositions allégoriques (Allégorie des Arts, musée de Valence), portraits (Charles III protecteur de l'Académie, id.). Mais la part la plus caractéristique de son talent s'exprime dans des scènes de genre, sujets champêtres, masques, " majas " aux figures curieusement allongées (Couples dans un parc, Romería, Prado).

 
Ses fils Juan (1760-1819) et Manuel Camarón Melía (1763-1806) furent également de notables peintres.

Cambiaso (Luca)

Peintre italien (Moneglia, près de Gênes 1527  – Escorial 1585).

Initié par son père, Giovanni, à l'art de la décoration, il fut marqué à ses débuts par Perino de Vaga et des artistes lombards ou vénitiens, notamment Pordenone. À Gênes, sa première œuvre importante est la décoration (l'Iliade) du palais Doria-Spinola, exécutée à dix-sept ans, avec l'aide de Lazzaro Calvi ; le souvenir de Michel-Ange y est suffisamment manifeste pour suggérer l'hypothèse d'un voyage à Rome antérieur à 1547. Il collabora avec son ami l'architecte Alessi à S. Matteo, à la villa Imperiale de Campetto et, en 1567, à la chapelle Lercari de la cathédrale de Gênes. Un style décoratif énergique, d'une animation pleine de verve, se dessine dans ces œuvres. Des voyages en Émilie, à Florence, à Rome complétèrent la culture éclectique de Luca, qui devait passer les trois dernières années de sa vie en Espagne, à la cour de Philippe II, et décorer l'Escorial (fresque du Paradis). La période 1568-1580 correspond à l'apogée de son talent ; ses recherches s'orientent d'une part vers une simplification géométrique des formes, qui revêt parfois, surtout dans les dessins, le caractère d'un véritable " cubisme " ; d'autre part vers des effets nocturnes hardis, étranges et savants (Nativité, Brera : Madone à la chandelle, Christ devant Caïphe, Gênes, Gal. du Palazzo Bianco).

   Ses peintures sont encore conservées en grand nombre à Gênes et dans sa région : tableaux dans les églises (S. Lorenzo, S. Francesco di Paola, S. Annunziata di Portoria, S. Chiara, S. Giorgio) et les musées (Gal. du Palazzo Bianco et du Palazzo Rosso ; Accad. Ligustica) ; fresques dans les palais (Doria-Spinola ; ex-Saluzzo ; Pallavicini Pessagno), les villas (del Peschiere ; Imperiale) et les églises (S. Maria del Canneto à Taggia ; S. Maria delle Grazie à Chiavari). Dessinateur infatigable, rapide, mouvementé, son œuvre graphique très abondante est l'une des plus originales de cette période et connut une grande diffusion. La plupart des cabinets de dessins possèdent, parfois en grand nombre, des feuilles de Cambiaso exécutées très souvent à la plume et au lavis.

camera oscura

Terme italien signifiant " chambre noire ".

   La " camera oscura " est un appareil d'optique permettant d'obtenir une image nette d'un objet dont on désire généralement faire le calque. Il s'agit d'une sorte de boîte dans laquelle la lumière pénètre seulement par un petit trou et qui est fermée à l'opposé par un papier blanc peu épais ou un verre dépoli. On peut aussi placer le dépoli horizontalement au-dessus de la boîte. Il faut en ce cas que l'image soit réfléchie à l'intérieur de la boîte par un miroir incliné. On peut encore perfectionner cet instrument en utilisant une lentille convergente au lieu de se contenter d'un simple trou. L'image est d'autant plus lumineuse que la lentille est plus grande. La distance entre cette dernière et la paroi doit alors être sensiblement égale à la distance focale de la lentille.

   On a aussi réalisé des boîtes formées de deux parties coulissantes permettant d'obtenir une image nette quelle que soit la distance de l'objet.

   L'histoire de la photographie est intimement liée à celle de la peinture : elle a été inventée par des peintres, pour des peintres, qui en conçurent l'idée dès le XVe s. pour apporter des solutions toujours plus satisfaisantes aux problèmes posés par la peinture comme représentation du monde réel sur une surface plane, notamment le problème de la perspective. Niepce (1765-1833), Talbot (1800-1877) et Daguerre (1787-1851) n'ont fait que développer chimiquement et fixer l'image projetée par la camera oscura, dont Léonard de Vinci, reprenant un thème platonicien, explique le mécanisme et à laquelle Giovanni Battista della Porta suggère dès 1588 d'ajouter une lentille convexe pour donner plus de luminosité à l'image ainsi projetée. C'est surtout chez les peintres de la vie quotidienne dans la Hollande de la seconde moitié du XVIIe s. (Vermeer de Delft, Hoogstraten) et chez les védutistes italiens des XVIIe et XVIIIe s. (Vanvitelli, Zucarelli, Canaletto et Bellotto) que l'emploi de la camera oscura fut systématique. Cet emploi est mis en évidence par des particularités de style propres à la vision optique : compression de l'espace en profondeur, grossissement exagéré et flou des détails au premier plan dû à la réfraction de la lumière (Vermeer de Delft a su tirer de ce dernier trait un parti esthétique voulu). Déjà Canaletto mettait les artistes en garde contre l'incorrection de la perspective telle que la restitue la camera oscura. Servante du peintre, destinée à lui faciliter l'approche du réel, celle-ci lui impose déjà ses lois et ses déformations et l'en détourne : on retrouvera ce paradoxe dans les rapports photographie-peinture.