Monet (Claude) (suite)
Vétheuil
Manet, en achetant des tableaux à Monet, permet à celui-ci de s'installer en 1878 sur les bords de la Seine, à Vétheuil, où il peindra ce village et ses environs (Buffalo, Albright-Knox Art Gal. ; Boston, M. F. A. ; Paris, musée Marmottan). Plusieurs feront partie de la quatrième exposition impressionniste en 1879. Camille meurt à Vétheuil le 5 septembre 1879.
Sur le conseil de Renoir, il présente 2 toiles au Salon officiel, dont une seule est acceptée. Plus par désir de s'isoler après la mort de Camille que par désir de se désolidariser du groupe (ce que croyait Degas, qui le qualifiait de renégat), il organise en juin 1880 une exposition particulière à la Vie moderne, mais expose de nouveau à la septième exposition impressionniste en 1882, où il montre 30 toiles, paysages et natures mortes, qui reçoivent un avis favorable de la critique.
En 1883, Monet s'installe à Giverny. Durand-Ruel organise des expositions des œuvres du groupe à l'étranger : Boston, Rotterdam, Londres et Berlin. En décembre 1883, il fait en compagnie de Renoir un voyage sur la Côte d'Azur. Enthousiasmé, il décide d'y retourner seul l'année suivante ; il séjourne à Bordighera et à Menton et rapporte des toiles d'une grande intensité de couleur : Bordighera (Chicago, Art Inst.). Il fait entre-temps de brefs séjours en Normandie et en Bretagne : Étretat, Belle-Île (Paris, musée d'Orsay ; Paris, musée Marmottan), la Manne Porte, Étretat (Metropolitan Museum). Il prend part aux quatrième, cinquième et sixième Expositions internationales de peinture.
En 1886, Durand-Ruel présente " trois cents œuvres à l'huile et au pastel des impressionnistes de Paris ". Monet participe aussi à Bruxelles à l'exposition des Vingt. D'un rapide voyage en Hollande, il rapporte quelques toiles représentant les champs de tulipes. À Giverny, il peint des panneaux décoratifs, pour lesquels Suzanne Hoschedé lui sert de modèle (Femme à l'ombrelle, Paris, musée d'Orsay). En 1888, il se lie par contrat avec Théo Van Gogh. Il séjourne au château de la Pinède à Antibes (Saint-Jean-Cap-Ferrat, 1888, Boston, M. F. A.), à Fresselines et Crozant, dans la Creuse, en 1889. À la gal. Georges Petit, il organise avec Rodin une grande rétrospective (65 toiles) qui remporte enfin un vif succès. En 1889, il prend l'initiative d'ouvrir une souscription afin de donner à l'État l'Olympia de Manet. De 1890 à 1894, il retrouve à Paris, au café Riche, ses amis impressionnistes.
Les séries : les " Nymphéas "
Monet, qui résidait depuis sept ans à Giverny, fit l'acquisition de sa maison en 1890. Il remplira son vaste jardin de fleurs et de plantes les plus rares et fera construire un petit pont japonais au-dessus d'un étang où s'étalent des nymphéas. Il trouvera là l'objet de ses recherches sur l'" instantanéité ", ce qui le conduit à entreprendre de grandes séries sur un même sujet. Il expose chez Durand-Ruel, en 1891, 15 toiles des Meules, des Peupliers du bord de l'Epte. En juillet 1892, il épouse Alice Raingo, veuve d'Ernest Hoschedé. Lors du choix des artistes pour décorer l'Hôtel de Ville de Paris, en 1892, Monet recueille quatre voix. En 1894, Cézanne vient s'installer à l'auberge de Giverny, et, en février 1895, Monet part pour la Norvège, où il restera quelques mois près de Christiania : Mont Kolsaas (Paris, musée d'Orsay ; Paris, musée Marmottan).
Du 10 au 31 mai 1895, il expose 49 toiles chez Durand-Ruel, dont 20 Cathédrales et 8 toiles de Norvège. En 1896 et en 1897, il fait plusieurs séjours en Normandie (Pourville, Dieppe, Varengeville, Honfleur) et peint des paysages et des natures mortes.
Chez Georges Petit en 1897, il expose une série d'études sur les Nymphéas. En 1900, Monet se rend à Londres — où il reviendra d'ailleurs à plusieurs reprises — pour peindre une série de toiles sur la Tamise. À son retour, 37 d'entre elles seront exposées chez Durand-Ruel. De son voyage à Venise en 1908, il rapporte 29 toiles, exposées en 1912 chez Bernheim : le Palais ducal (New York, Brooklyn Museum), le Grand Canal (Boston, M. F. A.). Les 48 paysages d'eau aux Nymphéas, peints entre 1904 et 1906 et exposés chez Durand-Ruel du 5 mai au 5 juin 1909, remportèrent un grand succès.
Le 19 mai 1911, sa femme, Alice, meurt à Giverny. Sa belle-fille, Blanche Hoschedé-Monet, épouse de son fils Jean et peintre elle-même, veillera sur le maître et l'entourera d'affection jusqu'à sa mort.
En 1914, Monet fait construire dans son jardin de Giverny un grand atelier lumineux pour y peindre de vastes tableaux sur le thème des Nymphéas (un certain nombre, restés dans cet atelier, se trouvent maintenant au musée Marmottan à Paris). En novembre 1918, à l'instigation de Clemenceau, il décide de remettre à la France plusieurs de ces toiles, formant une grande décoration. L'Orangerie des Tuileries est choisie. Monet désigne l'emplacement des panneaux dans les deux salles du rez-de-chaussée et signe l'acte de donation le 12 avril 1922. Retardé dans l'achèvement de cet immense travail par une opération de la cataracte, il termine cette œuvre magistrale avant de mourir, le 5 décembre 1926. L'inauguration de cet ensemble aura lieu le 17 mai 1927. Monet est un des rares peintres, avec Renoir et Degas, qui put voir ses tableaux exposés au Louvre de son vivant : 14 Monet de la collection Camondo y furent en effet exposés en 1914.
Une grande partie des études des Nymphéas fut présentée chez Katia Granoff en 1956 et 1957. Dès lors, les critiques considérèrent Monet comme l'un des précurseurs de l'Abstraction lyrique et notamment du Paysagisme abstrait. Tous les grands musées du monde possèdent des tableaux de Monet ; parmi les plus importants, citons le musée d'Orsay à Paris (72 toiles), le musée Marmottan (75 toiles léguées par le fils de l'artiste en 1968 ou provenant de la coll. de Bellio), le Metropolitan Museum de New York (30 toiles), le M. F. A. de Boston (près de 30 toiles) et l'Art Inst. de Chicago (plus de 30 toiles). Une rétrospective Monet a été présentée (Chicago, The Art Institute) en 1995.