Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Preissig (Vojtěch)

Peintre et graveur tchèque (Světec, près de Teplice, 1873  – camp de concentration de Dachau  1944).

Il s'est formé à l'École des arts et métiers de Prague. En 1897, il se rend à Paris, où il travaille un moment sous la direction d'Alfons Mucha, puis dans les ateliers de xylogravure d'Auguste Schmid et de A. Delaune. En 1903, il rentre à Prague, où il ouvre son propre atelier de gravure. De 1910 à 1931, il séjourne aux États-Unis ; là il travaille dans la publicité et enseigne les arts graphiques de 1916 à 1924 à Boston. Pendant la Première Guerre mondiale, il participe aux efforts visant à créer une république tchécoslovaque indépendante (c'est dans ses affiches qu'apparaît pour la première fois le mot Tchécoslovaquie). En 1930, il retourne en Tchécoslovaquie. Participant à la Résistance, il est arrêté en 1940 et interné à Dachau. Toute son œuvre est marquée par le Symbolisme et l'Art nouveau. Comme son compatriote Kupka, Preissig fut un pionnier de la peinture abstraite, qui, chez lui, eut pour point de départ l'Art nouveau. Il parvient au seuil de l'Abstraction en 1915, dans ses 3 Études d'arbres, conçues dans l'esprit de la stylisation linéaire du Modern Style. L'année suivante, il réalisa des collages avec des fils, des bouts de papier, de la limaille, des aiguilles de sapin et, dans les années 20, il exécuta des dessins géométriques qui sont une anticipation directe de l'Op'Art.

   Parti du Modern Style, il évolue vers une abstraction qui porte en germe les différents types de peinture non-figurative qui devaient faire leur apparition dans l'après-guerre. Preissig est représenté au musée de Prague (Concentration, Variation, 1922 ; dessins à l'encre de Chine, 1925-1930), au musée de la Littérature nationale de Prague (les Arbres, 1905 ; Variations sur une forme triangulaire, 1915-1930 ; gravures " actives ", 1930-1938) et à la gal. Aleš à Hluboká.

Prendergast (Maurice)

Peintre et aquarelliste américain (Saint-Jean, Terre-Neuve, 1859  – New York 1924).

Il travailla d'abord en Nouvelle-Angleterre comme peintre de cartes-souvenirs. Plus qu'aucun autre membre du groupe des Huit, Prendergast fut attiré par l'Europe. Il y fit 6 voyages (le premier en Angleterre, 1886) et y résida suffisamment longtemps pour comprendre et adopter les canons du Néo-Impressionnisme. Lors de son deuxième séjour, de 1891 à 1894, non seulement il fréquenta l'Académie Julian et l'école Colarossi, où il reçut l'enseignement académique dispensé par Laurens, Blanc, Constant et Courtois, mais encore il peignit en plein air, comme le préconisaient les impressionnistes, à Paris (Seven Sketches of Paris, 1893, Andover, Phillips Academy), ainsi qu'en Bretagne et en Normandie (Dieppe, 1892, New York, Whitney Museum). Whistler et Manet comptaient alors parmi les artistes qui l'influençaient le plus profondément, mais, au cours de sa carrière, ces influences allaient disparaître au profit de celles des Nabis, de Toulouse-Lautrec puis de Seurat. De retour aux États-Unis, Prendergast s'installa à Winchester (Mass.) et obtint en 1896 un certain succès pour ses illustrations de My Lady Nicotine. En même temps, il peignit des scènes de plage de la Nouvelle-Angleterre (Low Tide, Beachmont, 1897, Worcester Art Museum). En 1898, il retourna pour la troisième fois en Europe, où il resta jusqu'en 1900. Il travailla à Saint-Malo, à Paris et surtout à Venise, où, inspiré par Carpaccio, il exécuta des compositions animées, parfois ponctuées par le flottement de bannières colorées (Piazza di San Marco, Metropolitan Museum ; A Bridge in Venice, musée de Cleveland ; The Lagoon, Venice, New York, M. O. M. A.). Dans ses monotypes de 1899 (Orange Market, id.), Prendergast adopta l'espace artificiel de Gauguin et des Nabis et, vers le début du siècle, brisa la surface de ses aquarelles en petites touches parallèles, à la manière des néo-impressionnistes. À la même époque, à New York, il fréquenta Sloan, Glackens, Shinn, Davies (il exposera avec eux lors de l'exposition des Huit en 1908). East River (1901, New York, M. O. M. A.) atteste un intérêt, rare dans son œuvre, pour un sujet similaire à ceux que les peintres de l'Ash-can School traitaient volontiers.

   En 1913, Prendergast participa à l'Armory Show. Lors des séjours qu'il avait accomplis auparavant en Europe (en 1909 à Paris et à Saint-Malo, en 1911-12 en Italie), il avait expérimenté de nouvelles techniques comme le pastel et avait abordé de nouveaux sujets, nus et natures mortes. À partir de 1913, une certaine tendance au Symbolisme apparut dans ses compositions. Des figures nues côtoient des personnages quotidiens dans The Promenade (1914-15, Detroit, Inst. of Arts) ou The Picnic (Ottawa, N. G.). Vers la fin de sa vie, l'artiste adopta dans ses aquarelles une touche plus large et plus libre, souvent proche de celle de Matisse (In the Park, 1918-19, Chicago, Art Inst.). Une rétrospective a été consacrée à l'artiste (Los Angeles, County Museum of Art) en 1991.

préparation

Couche de matière uniforme, possédant un corps ou une épaisseur variable, appliquée sur un support pictural (toile, bois, papier).

   La préparation permet de contrôler le pouvoir absorbant du support et sert de base à la couche picturale tout en assurant son adhésion. Elle permet également de dissimuler les irrégularités du support et contribue à l'aspect esthétique final d'un tableau. Elle peut être colorée ou blanche, et sa texture est lisse ou granuleuse.

   Il est nécessaire d'établir une distinction entre les préparations sur panneaux et les préparations sur toiles. Les préparations diffèrent également selon les époques et les écoles de peinture. Bien que la préparation soit rarement visible à l'œil nu, il est possible d'étudier sa composition en examinant des coupes transversales ou des surfaces laissées à découvert à la suite du détachement de la pellicule picturale. La composition de la préparation, selon le support sur lequel on l'applique (bois ou toile), peut se réduire à une simple couche de colle ou être constituée de 3 couches (ou même davantage) : 1° une couche isolante d'apprêt ou de colle (V. ENCOLLAGE) ; 2° pour boucher les trous, une ou plusieurs couches de plâtre (ou autre matière inerte) délayé dans de la colle, polies par ponçage (ou rendues volontairement rugueuses) : la couche isolante est étendue à la spatule ; 3° une couche d'impression, colorée ou non, qui a pour fonction de réduire le pouvoir absorbant du support et sur laquelle on exécute le dessin et applique les différentes couches picturales.

   Selon les substances entrant dans la composition des préparations on distingue : les préparations maigres (plâtre, craie, calcium, liés par une colle animale ou végétale) ; les préparations grasses (à base d'huile et de céruse, ou de tout autre pigment gras broyé) ; les préparations mixtes (préparations maigres recouvertes d'une grasse). D'autres substances ont été introduites dans les préparations, aux XVe et XVIe s., telles que farine, amidon, miel, sucre, glycérine, cire d'abeille, lait.

   Jusqu'au XVIe s., on employait presque exclusivement des préparations blanches qui accroissaient le pouvoir de réflexion et se composaient soit de plâtre (gypse + anhydride), soit de craie (carbonate de calcium). C'est ainsi que la substance de base de la préparation des écoles hispano-flamandes a été le gypse, et celle des écoles du Nord, la craie liée à de la colle animale. L'épaisseur de ces préparations variait selon la qualité des supports, un support (en bois) de qualité inférieure exigeant jusqu'à 700 ou 900, alors que l'épaisseur courante était de 150 à 200. Ces préparations blanches conféraient une grande luminosité aux peintures à la détrempe et étaient étendues sur la face et parfois sur le revers des panneaux. Elles pouvaient contenir de la filasse (ou bourre) ou des bandes de toile, noyées dans le plâtre et la craie. Les bandes de toile recouvraient soit les joints seuls (sur la face et le revers du tableau), soit toute la surface du panneau. Parfois, une matière fibreuse, telle que le papier, collée sur le support (en bois ou en toile), tenait lieu de préparation. Selon le moine Théophile, on pouvait également utiliser le cuir : il fallait néanmoins y étendre une couche de plâtre fin délayé à la colle de peau. Les peintres peignaient parfois directement sur des supports non préparés (école portugaise du XVe s. ; école de la Loire).

   À partir de la seconde moitié du XVIe s., on a utilisé de préférence des préparations colorées (rouges, brunes, brun-noir) ; ces préparations avaient l'inconvénient de noircir avec le temps, mais elles ont joué un rôle important dans l'harmonie colorée des tableaux (Poussin, par exemple, fit des préparations à l'ocre rouge ; dans de nombreuses toiles du XVIIe s., le rouge transparaît).

   Pour permettre aux toiles de rester flexibles, on y a appliqué, du XVIIe au XIXe s., non plus une préparation compacte, mais une simple couche de colle ainsi que du blanc de craie additionné de plâtre fin. À partir du XVIIIe s., les préparations oléagineuses sont courantes (Boucher utilisait les préparations rosées). Lorsque la structure des toiles est très lâche (XVIIe s. italien), la préparation est travaillée à la spatule, et, à chaque intervalle laissé par le croisement des fils, un empâtement apparaît.

   Certains supports exigent une préparation spéciale : c'est ainsi que l'on préparait le parchemin des manuscrits du XIe et du XIIe s. en étendant, sur les parties des pages destinées à recevoir la dorure, une couche de cinabre délayé au blanc d'œuf. Dans les manuscrits byzantins, le cinabre transparaît à travers les ors usés.

   On protège actuellement les supports de métal en les recouvrant de peinture antirouille présentant une imperméabilité suffisante pour retarder la formation de la rouille. Le carton et le papier sont préparés de la même manière que le bois et la toile. Les préparations fabriquées industriellement sont apparues au XVIIIe s.

   Lorsque l'humidité atmosphérique est excessive, les préparations peuvent s'altérer : Les préparations au plâtre ou à la craie se désagrègent par plaques ou deviennent pulvérulentes, provoquant par contrecoup un soulèvement de la couche picturale.

   Les préparations au plomb des XIXe et XXe s. présentent l'inconvénient de devenir granuleuses, à cause des huiles siccatives qu'elles contiennent.