Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Nauen (Heinrich)

Peintre allemand (Krefeld 1880 –Kalkar 1940).

Il se forme à Düsseldorf, à Munich et à Stuttgart, où il fut le brillant élève de Leopold von Kalchreuth. Après avoir séjourné trois ans en Belgique, à la colonie des futurs expressionnistes belges de Laethem-Saint-Martin, il s'installe en 1911 à Schloss Dilborn, sur le Rhin, où il demeurera pendant près de trente ans. En 1912-13, il exécute, pour Edwin Suermondt, un cycle de 6 peintures murales destinées au château de Drove, près de Düren (auj. à Krefeld, Kaiser Wilhelm Museum) et, en 1925, des mosaïques pour les salles de l'exposition Gesolei à Düsseldorf. Nommé professeur à l'Académie de cette même ville, il y enseigne aux côtés de Klee et de Campendonk. Relevé de ses fonctions en 1937, il se fixa à Kalkar.

   Nauen, qui, influencé d'abord par Van Gogh, avait privilégié l'expression, se rapprocha, au contact de Matisse, d'un fauvisme modéré. En raison de son coloris éclatant, Nauen fut maintes fois qualifié d'" expressionniste rhénan " (le Bois à l'automne, v. 1911, musée de Bonn). Il est en fait un artiste à la recherche du " rapport naturel des choses ", ainsi qu'il le dit lui-même. Les arbres et les fleurs du parc de Dilborn, sa source d'inspiration inépuisable, lui permirent d'étudier à loisir les lois de la composition et l'harmonie des couleurs. Nauen est principalement représenté dans les musées de Düsseldorf, Krefeld (Kaiser Wilhelm Museum), Hagen (Portrait de Rolfs, 1919) et Mönchengladbach.

Nauman (Bruce)

Artiste américain (Fort Wayne, Indiana, 1941).

C'est à l'époque où il termine ses études à l'université de Davis en Californie que Bruce Nauman, parallèlement à des vidéos prenant pour thème les déplacements de son corps dans l'espace, exécute ses premières sculptures en fibres de verre. Pliage ou inclusion d'un matériau légèrement translucide, entre le mauve et le gris, mettent en relation les caractères externes et les structures internes des volumes placés entre mur et sol. Cet intérêt pour la flexibilité des formes et des volumes est éprouvé dans les années suivantes à travers de nombreux matériaux : le néon, permettant de travailler sur les interférences des formes et de la couleur (Neon templates of the left half of my body, taken at ten inches intervals), le caoutchouc, la cire, qui permet de développer des morceaux du corps (From Hand to Mouth, 1967, Washington Hirschorn Museum). Le néon, dans sa relation avec le langage, prit comme signe, constitue l'un des matériaux que Nauman utilisera avec prédilection, depuis des mots souples, déformés (My last name exaggerated fourteen times vertically, 1967, New York, Guggenheim Museum) ou superposés (Eat/Death, 1972) jusqu'aux entrecroisements de mots dans les années 80 (American Violence, 1981-82). En 1969, il s'installe à Pasadena en Californie. À partir de 1970, l'intérêt pour la relation spectateur/environnement amène Nauman à créer des séries de couloirs, jouant sur des espaces ambigus et étroits constituant des véritables pièges perceptifs (Acoustic Corridor, 1973, New York, Guggenheim Museum). Au même moment, il développe les tunnels, juxtaposition de structures géométriques allongées creuses en bois et plâtre formant des figures géométriques simples, en équilibre précaire (Model for trench, shaft and Tunnel, 1978, Schaffhouse, Hallen für neue Kunst). En 1979, Nauman s'installe au milieu des montagnes à Pécos dans le Nouveau-Mexique. De nouveaux travaux accentuent les problèmes d'équilibre dans l'espace : chaises suspendues au centre de cercles, de carrés ou de rectangles (Diamond Africa with chair tuned. Dead, 1981, Chicago, the Art Institute), ou les carrousels, animaux contorsionnés, désarticulés, démembrés, suspendus à des barres de métal tournant en cercle (1988, La Haye, Gemeentemuseum). Parallèlement, Nauman s'intéresse aux rapports humains dans de grands néons sur le sexe et le pouvoir, représentant des personnages schématisés et mobiles répétant mécaniquement le même geste (Sex and death by murder and suicide, 1985, Bâle, M. A. C.) ou dans des vidéos (Good boy, Bad boy, 1985 ; Spinning Head, 1990, vidéo, projecteur, toile, tête en cire). Représenté par d'importants ensembles d'œuvres dans plusieurs grandes collections (New York, Guggenheim Museum, coll. Panza ; Bâle, M. A. C. ; Schaffhouse, Hallen für neue Kunst), son œuvre a fait l'objet d'expositions à Paris, au M. A. M. de la Ville de Paris en 1986, à Madrid (Centro de Arte Reine Sofia) en 1993-93, ou pour les dessins à Bâle (M. A. C.) en 1986. Une nouvelle exposition a été présentée (Zurich, Kunsthaus) en 1995 ; (Rotterdam, B. V. B. ; Paris, centre Pompidou) en 1996-97.

Navarrete (Juan Fernández de) , dit el Mudo

Peintre espagnol (Logroño 1526  – Tolède 1579).

Sourd-muet depuis l'enfance, il fut élevé par les Hiéronymites de l'Étoile, près de sa ville natale, qui lui facilitèrent l'apprentissage de la peinture. Son premier biographe, Fray José de Sigüenza, affirme qu'il étudia en Italie, où il aurait été l'élève de Titien, mais aucun document ne confirme cette tradition très vraisemblable. En 1568, il présenta à Philippe II le Baptême du Christ (Prado), sa première œuvre connue, traitée dans le style maniériste italo-flamand, et il fut aussitôt nommé " pintor de Cámara ". Les tableaux qu'il exécuta pendant dix ans à l'Escorial, où il fut un représentant notoire de l'école espagnole, sont moins froids et moins conventionnels ; Navarrete s'y montre l'adepte fidèle des maîtres vénitiens et l'introducteur en Espagne de leur manière " abrégée ", que Pacheco oppose au style " achevé " des Florentins. La palette de Titien, dont il copia certaines toiles, la somptuosité et l'esprit anecdotique de Véronèse se reflètent dans ses grands tableaux (Abraham et les 3 anges, Dublin, N. G. of Ireland) ; la composition du Martyre de saint Jacques (1571, Escorial) s'inspire de Tintoret, mais le réalisme de la décollation s'inscrit dans la tradition hispanique. Les effets de clair-obscur proches de ceux de Bassano dans cette œuvre sont repris avec maîtrise dans la Nativité de l'Escorial (1575). Pour les autels secondaires du monastère, Navarrete exécuta 8 tableaux consacrés aux évangélistes et aux apôtres, groupés par paires ; la série de 32 toiles, que la maladie l'empêcha de terminer, fut achevée par Sánchez Coello et Carvajal. Ces figures majestueuses révèlent l'éclectisme de Navarrete, admirateur de compositions grandioses, mais également attiré par les détails familiers chers aux Vénitiens et aux Flamands.