Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
A

Arnoult de Nimègue, dit aussi Aert van Oort, Aert Ortkens, Arnoult de la Pointe

Peintre verrier néerlandais (Nimègue av.  1480  – Anvers [ ?] apr.  1538).

Actif à Tournai, où il signe trois vitraux pour la cathédrale (Fuite de Chilpéric, signé Arnt Nimèg [ue]), puis à Rouen de 1502 à 1512, où il exécute pour Saint-Romain le Martyre de saint Étienne (vitrail signé Arnoult de Nimèg [ue]) et pour Saint-Godart un Arbre de Jessé (vitrail signé Arnoult de la Pointe, daté 1506), il devient maître à Anvers en 1513 et travaille pour la cour de Malines. Dürer lui rend visite en 1521. Arnoult de Nimègue est célébré à l'égal de Vellert, autre peintre verrier, par les écrivains Noviomagus (1522) et Giucciardini (1567), qui voit en lui le créateur de la peinture en " apprêt ". Son cas est très caractéristique de la pénétration des artistes des Pays-Bas en France au XVIe s. et explique la diffusion des idées maniéristes anversoises. D'autres vitraux lui ont été attribués par comparaison de style : à Notre-Dame de Louviers (vitrail des Trois Marie, v. 1526), à Sainte-Foy de Conches (vitrail de Saint Adrien et Saint Romain), à Saint-Ouen de Rouen.

   Représentant d'un traditionalisme flamand nuancé de réalisme néerlandais, Arnoult de Nimègue s'ouvrit peu à peu à la Renaissance, d'abord sous l'influence de Dürer et des artistes de Gaillon, puis au contact de Metsys, et finit par adopter un style ouvertement " romaniste ". Il excella dans le portrait comme tant de Hollandais. Beaucoup de ses vitraux, provenant notamment de Malines et de Rouen, ont été vendus et transférés au XIXe s. en Grande-Bretagne.

   Belle résurrection de l'érudition contemporaine, remontant à 1911, le regroupement d'œuvres opéré sous le nom d'Arnoult de Nimègue, alias Aert Ortkens, s'est vu récemment contesté par quelques historiens au profit d'un certain Adrien Van den Houte, originaire de Malines, qui, ayant peut-être été l'élève d'Arnoult de Nimègue, se verrait attribuer certaines œuvres du groupe Arnoult de Nimègue-Ortkens. L'identification d'Aert Ortkens, connu essentiellement par ses dessins, avec le peintre verrier Arnoult de Nimègue — thèse soutenue par l'historien Friedländer — n'est pas acceptée de tous.

Arntz (Gerd)

Peintre allemand (Remscheid 1900-1988).

Gerd Arntz effectue ses études à Düsseldorf. Il se spécialise dans la gravure sur bois et sur linoléum dès 1922. Il est bientôt l'un des principaux représentants de cet art et illustre de façon simple et dans un style géométrique des thèmes à résonance sociale et politique. Il participe en 1920 au groupe Stupid à Cologne. Il s'établit à Vienne en 1929, se rend à Moscou en 1932, puis il s'établit à partir de 1934 à La Haye, où il vit toujours. Si Gerd Arntz a réalisé à partir de 1926 ses premiers tableaux et s'il a eu par ailleurs l'occasion d'exécuter des peintures murales, notamment au nouvel hôtel de ville de Vienne en 1929, l'essentiel de son art est constitué de gravures sur bois. Ainsi la série Douze Maisons de notre époque (Zwölf Häuser der Zeit, 1928) est une suite de gravures toutes composées sur un principe identique, qui superpose trois registres parallèles horizontaux, pour montrer simultanément trois états d'une même situation. Les compositions et les sujets de Gerd Arntz, qui ont d'ailleurs beaucoup à voir avec les principes visuels de la signalétique et le graphisme utilisé dans les statistiques, sont toujours en rapport avec des thèmes politiques et illustrent les antagonismes existant entre les différentes catégories sociales. Gerd Arntz utilise le noir et le blanc dans la tradition de la gravure expressionniste, mais dans un style constructiviste, et ses sujets sont proches de ceux de Peter Alma.

Arp (Hans)
ou Jean Arp

Peintre, sculpteur et poète français (Strasbourg 1887  – Bâle 1966).

En 1904, il est élève de l'Académie de Weimar, où son condisciple Hauptmann fait son portrait (1905, Hambourg, Kunsthalle), puis de l'Académie Julian à Paris en 1908. Il se retire ensuite à Weggis (Suisse) et participe en 1911 à la fondation du Moderner Bund. Il rencontre Kandinsky à Munich, se mêle aux activités du Blaue Reiter et de Der Sturm (1912) et fait la connaissance de Delaunay. Les œuvres de cette période, la seule où il ait vraiment pratiqué la peinture, relèvent d'un cubisme cézannien déjà très économe : Trois Femmes (1912). À Paris, en 1914-15, Arp fréquente notamment Apollinaire et Picasso. De retour en Suisse, à Zurich, il réalise ses premiers collages et des compositions abstraites : Composition statique (1915). Suivent, en 1915, des collages et des tapisseries aux formes rectangulaires, influencés par Sophie Taeuber, qu'il épousera en 1922. En 1916, Arp est l'un des fondateurs à Zurich du mouvement Dada, avec Tzara, dont il illustre 25 Poèmes, et il grave une série de bois abstraits : Études de symétrie. En 1916, il exécute sur bois ses premiers reliefs peints (Fleur-marteau, 1916-1917, Gemeentemuseum, La Haye) et, l'année suivante, des bois gravés et de grands collages géométriques. En 1919-20, il prend part au mouvement dadaïste de Cologne avec Ernst et Baargeld. Il s'installe à Meudon en 1926, collabore, de 1925 à 1930, aux manifestations surréalistes parisiennes (Torse et nombril, 1927) et à la revue hollandaise De Stijl. Bien qu'il s'adonne de plus en plus à la sculpture, à partir de 1931, il continue ses collages et essais graphiques ; il conçoit avec Sophie Taeuber et Van Doesburg le décor de l'Aubette, brasserie de Strasbourg (1926-1928, auj. disparu ; sa reconstitution a été inaugurée en 1994), et, à partir de 1930, inaugure ses " papiers déchirés " qui ont fait l'objet d'une exposition au M. N. A. M., Paris, en 1983. On trouve dans ces œuvres fragiles le fruit de l'expérience dadaïste, qu'il a vécue avec une conscience aiguë et à laquelle il semble devoir sa poétique de l'espace. Pendant la guerre, il travaille à Grasse avec Sonia Delaunay et Magnelli (lithos, 1941). Il voyage en Amérique (1949 et 1950), puis en Grèce (1952, 1954) et partage ensuite son temps entre ses deux résidences de Meudon et de Bâle. Jusqu'à sa mort, il poursuit son œuvre graphique (bois et eaux-fortes). Ses bois, en particulier, sont exemplaires par la franche sobriété de la taille, la sonorité des teintes, l'invention formelle, qui garde une ambiguïté naïve entre abstraction pure et morphologie. Il illustra notamment ses propres textes : le Voilier dans la forêt (1957, bois gravés), 1, rue Gabrielle (1958, 12 eaux-fortes), Vers le blanc infini (1960, eaux-fortes). Arp a également exécuté des cartons de tapisseries (Nadir, 1960). Il est particulièrement bien représenté au musée Kröller-Müller, Otterlo (collection Marguerite Arp-Hagenbach), à la Kunst-halle de Hambourg, au Castello Visconti, Locarno (donation Arp, 1965). Il existe aussi près de Paris, à Clamart, une fondation Arp. Une rétrospective a été présentée aux É.-U. et en Europe en 1986-1988 (Stuttgart, Strasbourg, Paris, Minneapolis, Boston, San Francisco).