Maître du Llussanes
Peintre espagnol (actif en Catalogne dans la première moitié du XIIIe s.).
Un ensemble de peintures provenant en grande partie de la région de Llussa, sur le haut Llobregat, à l'est de Vich, a été attribué par C. R. Post à un même peintre. Il comprend les fresques de Puigreig (Visitation, Annonciation, Vierge en majesté), le Jugement dernier peint dans un enfeu de San Pablo de Casseres (musée diocésain de Solsona), les frontaux de la Vierge de Llussa (musée de Vich) et de Solanllong, une table d'autel provenant d'Eguillar (Navarre), un Crucifix de Llussa et, sans doute, un antependium actuellement conservé à Baltimore (W. A. G.) ainsi qu'un autre, très détérioré, de l'église d'Angoustrine (Pyrénées-Orientales). L'art de ce maître se caractérise par l'adaptation au goût espagnol du style italo-byzantin apporté vers 1200 dans la Catalogne du Nord par l'auteur de l'antependium de Valltarga. Les couleurs intenses — parfois ternies par l'oxydation des fonds d'argent — et les formes " détendues " de ce dernier se retrouvent dans cette série d'œuvres. La simplicité du trait remplace le graphisme complexe des œuvres proprement romanes. Mais le traitement pittoresque des scènes apparaît conforme aux traditions du roman tardif catalan.
Maître du Martyrologe de Gérone
Enlumineur tchèque (actif à Praque v. 1410/1420).
Désigné d'après son chef-d'œuvre, le Martyrologe de Gérone (av. 1410, Gérone), manuscrit orné de 336 médaillons auquel travaillèrent plusieurs collaborateurs, le Maître du Martyrologe, représentant du style international au début du XVe s., était en étroite relation avec le troisième Maître de la Bible de Conrad de Vechto (1402-1403, Anvers, musée Plantin-Moretus), qui connaissait la peinture franco-flamande et la peinture parisienne aux environs de 1400 ; il collabora non seulement au Martyrologe, mais aussi au Graduel de Lucerne (apr. 1410, bibl. de Lucerne) et au Graduel de Prague (apr. 1410, Prague, Institut d'histoire de l'université Charles IV). On estime que le Maître du Martyrologe de Gérone avait connu l'enluminure française de l'époque (Heures du maréchal de Boucicaut, débuts des frères Limbourg) ; d'après les spécialistes, il serait l'auteur des œuvres suivantes : Antiphonaire de Brno (apr. 1410, Brno, Archives d'État) ; parties de l'Antiphonaire de Sedlec (1414, musée de Budapest) ; miniature du Paradis (1410-1420, musée d'Innsbruck) ; Bible d'Olomouc (1417, Olomouc, bibl. de l'université) ; Bible de Boskovice (av. 1420, id.) ; lettre ornée de la Sainte Trinité (v. 1420, Washington, N. G.). On ajoute parfois le Graduel de Bratislava (v. 1420, Bratislava, Archives d'État) et le Missel de Vienne (Vienne, B. N.). Un des collaborateurs du Martyrologe a également illustré le Voyage de John de Mandeville (1410-1420, Londres, British Museum) et exécuté des lettrines du Livre de chœur de Vienne (v. 1420, Vienne, B. N.).
L'art du Maître du Martyrologe est caractérisé par une tendance au réalisme ; à la narration épique l'artiste ajoute une science profonde des formes. Le plus grand progrès réalisé dans ses enluminures réside dans le traitement du paysage, dont il détaille les plans différents.
Maître du Missel de l'Archevêque Zbyněk Zajíc de Hazmburk
Enlumineur tchèque (actif à Prague au début du XVe s.).
Il est désigné d'après son chef-d'œuvre, le missel enluminé de l'archevêque de Prague (1409, Prague, B. N.). Ce missel est daté grâce à une note qui mentionne le nom de Laurent de Klatovy. Certains spécialistes ont cru que ce dernier était l'auteur des enluminures, tandis que d'autres ont identifié hypothétiquement l'artiste avec le copiste Martin Korček ou avec l'enlumineur Řehoř Sekyra, dont le nom se retrouve dans des documents d'archives. Au peintre de ce missel sont attribués : le Missel de Jan Strniště de Jabloné (av. 1409, musée de Prague) ; la Bible de Prague (Bibl. capitulaire) ; la Bible du copiste Korček (à partir de 1400, Vienne, B. N., et Karlsruhe, Landesbibl.) ; la Bible de Gnězdno (1414, Gnězdno, Bibl. capitulaire). D'après la majorité des spécialistes, le frontispice de la Bulle d'or serait une œuvre de jeunesse du peintre. L'art de celui-ci, en relation avec la peinture sur panneaux, semble tirer son origine des dernières enluminures du règne de Venceslas IV, et l'artiste est un représentant important du " beau style " dans l'enluminure du XVe s.
Maître du Parement de Narbonne
Peintre français (actif à Paris dans le dernier tiers du XIVe s.).
L'artiste tire son nom d'un ornement d'autel pour le temps du Carême, peint en grisaille sur soie blanche (v. 1375, Louvre), qui représente des scènes de la Passion avec le Roi Charles V et la reine Jeanne de Bourbon en oraison (ill. p. 209). Le Parement (retrouvé au début du siècle dernier à la cathédrale de Narbonne, à laquelle il avait sans doute été donné par Charles V) est le monument capital de l'école de Paris au XIVe s. Il prolonge la tradition de Jean Pucelle, éprise d'élégance linéaire et de vivacité expressive, en accentuant ces caractères par un souci de stylisation et une subtilité de modelé que souligne l'emploi de la grisaille. On croit retrouver la main du même artiste, passé après la mort de Charles V au service de son frère, le duc de Berry, dans les premières enluminures des Très Belles Heures de Notre-Dame du duc de Berry (Paris, B. N.). Le Parement a été parfois attribué à Jean d'Orléans, peintre de Charles, puis de Jean de Berry.
Maître du Polyptyque de San Severino
Peintre italien (actif vers 1480).
Auteur du polyptyque (Saint Séverin évêque, entouré de Saints et surmonté par la Vierge et l'Enfant, elle-même entourée de Saints) conservé dans l'église SS. Severino e Sossio à Naples, il est la figure la plus haute, avec Colantonio, de la peinture napolitaine du quattrocento. Les 5 panneaux de la prédelle du retable —racontant notamment des épisodes de la vie de saint Séverin — se répartissent aujourd'hui entre le musée Horne (Florence), la coll. du prince Ruprecht de Munich et une coll. part. de Rome. Dans cette unique œuvre, le Maître montre clairement son assimilation des modes d'Antonello de Messine, qu'il substitue aux sources flamandes de la culture locale, comme en témoignent son goût narratif, sa sensibilité à la lumière et son sentiment très fort de la nature. En outre, l'artiste démontre, pour la première fois à Naples, sa compréhension de la manière nouvelle de Piero della Francesca et aussi son attirance pour la culture française de Fouquet et pour l'art des maîtres valenciens. L'œuvre du Maître du Polyptyque de San Severino a nettement influencé la peinture napolitaine, comme le révèlent les rares témoignages de 2 artistes mineurs locaux, Pietro Befulco et Antonello da Capua.