Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Sieverding (Katharina)

Artiste allemande (Prague 1944).

Après des études à l'École des beaux-arts de Hambourg (1962-63), puis à l'Académie de Düsseldorf (1967-1972), où elle est l'élève de Joseph Beuys, Sieverding réalise des photos de très grand format où elle joue sur l'agrandissement des images, les contrastes et les superpositions de tramage. Elle prend pour thème le problème de l'identité à travers la multiplication de l'image ou de son propre portrait dans des séries d'autoportraits retravaillés avec de légères modifications (Transformer I/II, 1973) ou avec la confrontation du portrait et de la figuration de films. À partir de 1975, elle analyse, dans des images monumentales, des modes de représentations et de communications de masses différents, telle perception électronique de la foule ou telle image d'actualité (photographie d'explosion dans Continent atomique II, 1986). L'agrandissement démesuré de l'image fait apparaître les phénomènes de brouillage et de tramage qui mettent en cause l'objectivité des illustrations visuelles de notre temps. Son œuvre a fait l'objet d'expositions au musée de Mönchengladbach en 1984 et aux musées de Karlsruhe et de Kassel en 1987. Elle a été présentée aux Documenta de Kassel en 1972, 1977 et 1982.

Sigalon (Xavier)

Peintre français (Uzès 1787  – Rome 1837).

Il se forma d'abord à Nîmes chez un élève de David, puis à Paris dans l'atelier de Guérin (1817). Peintre de genre, d'histoire et de portraits, il connut le succès lors de son premier Salon (la Jeune Courtisane, 1822, Louvre), avec une œuvre qui unit à une facture traditionnelle un sentiment déjà romantique. Il donna par la suite de vastes compositions historiques : Locuste (1824, musée de Nîmes) et Athalie (1827, musée de Nantes). Ce dernier tableau rencontra un échec, et Sigalon, déçu, se retira à Nîmes. En 1833, la commande par l'État de la copie des peintures de la chapelle Sixtine de Rome le tira de l'oubli, mais Sigalon fut emporté par le choléra avant de terminer sa tâche. Seule la copie du Jugement dernier de Michel-Ange fut achevée (Paris, E. N. B. A.). De nos jours, la part de l'œuvre de l'artiste la plus appréciée est constituée par les esquisses prestement enlevées, dont le musée de Nîmes possède plusieurs exemples.

Signac (Paul)

Peintre français (Paris 1863  – id. 1935).

D'une famille aisée, il se consacre entièrement à la peinture à partir de 1882. À part un très bref passage dans un atelier libre, il se forme seul, sous l'influence des impressionnistes (la Route de Gennevilliers, 1883, Paris, musée d'Orsay). En 1884, il participe activement à la création de la Société des artistes indépendants et à cette occasion rencontre Seurat ; il expose des peintures aux premières manifestations de cette société, dont il sera, jusqu'à sa mort, un des membres les plus fidèles et les plus actifs. Certaines des 18 œuvres présentées à la dernière Exposition impressionniste figurèrent aussi, quelques semaines plus tard, aux Indépendants. Les unes — tels la Berge, Asnières — sont d'un disciple des impressionnistes, les autres — tels l'Embranchement de Bois-Colombes (Leeds, City Art Gal.), les Modistes (1885-86, Zurich, coll. Bührle) — celles d'un novateur ; dans ces dernières, Signac utilise, sous l'impulsion de Seurat, la technique dite " de la division ". Il continue à travailler selon cette méthode, prenant ses motifs sur les bords de la Seine, en Bretagne et sur les côtes méditerranéennes. Dans certaines toiles, il applique les théories de Charles Henry sur " les rythmes et les mesures des lignes et des couleurs ". Passionné par les recherches du savant, il collabore à deux de ses ouvrages (1890-1895) ; en 1890, il fait le portrait de Félix Fénéon " sur l'émail d'un fond rythmique de mesures et d'angles, de tons et de teintes ", au dessin curviligne inspiré d'un kimono (New York, M. O. M. A.).

   Peu après la mort de Seurat, il découvre Saint-Tropez, s'y installe et, jusqu'en 1911 env., y vit une partie de l'année et y attire de nombreux peintres. Excellent navigateur, il fait de nombreuses croisières. Son goût des voyages le mène de Rotterdam à Constantinople, et sa qualité de marin l'aide à traduire la vie des ports. Vers 1896, sa technique évolue : elle devient moins strictement soumise aux règles de la division. Signac élargit tellement ses touches que certaines toiles évoquent des mosaïques. Il s'intéresse vivement aux recherches de ses jeunes camarades, et c'est près de lui, à Saint-Tropez, que Matisse, en 1904, vient se familiariser avec les principes du Néo-Impressionnisme.

   À partir de 1913, Signac fait de longs séjours à Antibes, mais il garde toujours un atelier à Paris. Outre des paysages et des portraits, il a laissé des natures mortes, des scènes d'intimité (le Dimanche parisien, 1890 ; Femme se coiffant, 1892) et quelques compositions décoratives, en particulier les Femmes au puits (1892, Paris, musée d'Orsay) et Au temps d'harmonie (1894, mairie de Montreuil), qui est un véritable manifeste de sa conception d'une société anarchiste idéale. Volontaire et réfléchi dans ses peintures à l'huile, il s'exprime dans ses aquarelles (Louvre ; musées de Besançon et de Saint-Tropez) avec une entière liberté et y dévoile sa sensibilité. Travailleur, doué d'une grande vitalité, il s'est mêlé avec ardeur à la vie de son temps. Le rôle de Signac a été considérable lors de la formation du groupe des néo-impressionnistes : il a servi de lien entre Pissarro, Seurat et les écrivains symbolistes, puis a établi des relations amicales avec des peintres belges qui formèrent un second groupe de néo-impressionnistes. Vice-président, en 1903, des Artistes indépendants, président en 1909, il est accueillant à l'égard du Fauvisme et du Cubisme. Écrivain, il a laissé des œuvres variées, dont un Jongkind (1927), qui contient un Traité de l'aquarelle. Son livre D'Eugène Delacroix au Néo-Impressionnisme (1899) est essentiel à la connaissance de la méthode divisionniste ; de plus, il a eu une importance considérable auprès des générations suivantes : ainsi que l'a défini Françoise Cachin, ce traité " [...] a pu par sa religion de la couleur jouer son rôle auprès des " fauves " ; par son ascétisme, auprès des cubistes ; par son effort d'analyse rationnelle, auprès de Matisse ; par sa volonté de style, son détachement de la nature et son obsession de la peinture pure et de la couleur, auprès de Delaunay, Kandinsky, pères de l'Abstraction ". Signac est représenté aux musées de Baltimore (Quai de Clichy, 1887), de Besançon (la Voile jaune, 1904, et aquarelles), d'Essen, de Grenoble, de La Haye (Gemeentemuseum, Cassis, 1889), de Liège, de Melbourne (N. G., les Gazomètres de Clichy, 1886), de Moscou (musée Pouchkine, Saint-Briac, 1890), de New York (Metropolitan Museum), d'Otterlo (Kröller-Müller, plusieurs toiles, dont le Déjeuner, 1887), de Paris (musée d'Orsay et Petit Palais), de Saint-Tropez (musée qu'il contribua à fonder), de Wuppertal (Von der Heydt Museum, le Port de Saint-Tropez, 1893).