Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
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Maître du Retable de Saint Barthélemy
ou Maître de Saint Barthélemy

Peintre allemand (peut-être originaire d'Utrecht ou d'Arnhem, actif de 1475 env. jusque v. 1510 ; à Cologne depuis 1480 env.).

Principal représentant de la peinture gothique tardive à Cologne, il est désigné, d'après le titre de son œuvre la plus importante, le Retable de saint Barthélemy. La vie de cet artiste inconnu, d'origine néerlandaise, reste jusqu'ici obscure : il se forma dans la partie septentrionale des Pays-Bas (la Gueldre vraisemblablement), puis s'installa v. 1480 à Cologne, où il mourut peut-être.

   Les premières œuvres de l'artiste, parmi lesquelles figurent le Livre d'heures de Sofia Van Bylant (v. 1475, Cologne, W. R. M.), un retable de la Vierge dont les panneaux sont dispersés (Nativité, Paris, Petit Palais ; Adoration des mages, Munich, Alte Pin. ; Mort de la Vierge, détruit, autref. à Berlin ; Rencontre des Rois mages et Assomption, Lulworth Castle, coll. Weld), Sainte Anne, la Vierge et l'Enfant (Munich, Alte Pin.), la Messe de saint Grégoire (Cologne, W. R. M.), sont imprégnées d'influences flamandes et marquées d'emprunts à Dirk Bouts et à Rogier Van der Weyden.

   La Vierge à la noix (Cologne, W. R. M.), œuvre de transition qui entretient la tradition des Madones colonaises, et la Descente de croix (Louvre ; une autre version du même sujet à Londres (N. G.), qui est une libre et géniale interprétation du thème déjà traité par Rogier Van der Weyden (Prado), mènent aux œuvres de maturité, les grands retables de Saint Thomas et de la Crucifixion (exécutés pour la chartreuse de Cologne, 1490-1500, tous deux auj. au W. R. M.), et le Baptême du Christ de la N. G. de Washington. À la fin de sa carrière, v. 1500-1510, le maître réalisa le grandiose Retable de saint Barthélemy, provenant de l'église Sainte-Colombe, d'un coloris splendide (Munich, Alte Pin.) et qui représente sept saints alignés devant une riche tenture de brocart. Au centre, Saint Barthélemy entouré de sainte Agnès et de sainte Cécile avec un chartreux agenouillé à ses pieds ; sur les volets, à droite Sainte Catherine et saint Jacques le Mineur, à gauche Saint Jean l'Évangéliste et sainte Marguerite. Artiste indépendant, fort original, le Maître de Saint Barthélemy n'eut ni élèves ni suiveurs. À une époque où la peinture en Europe témoigne d'un profond changement, il reste attaché aux formes et à l'esprit gothiques. On pense, non sans raison, que son art a été profondément marqué par l'atmosphère spirituelle du couvent des chartreux de Cologne, réputé pour son intense activité spirituelle et artistique et pour lequel il peignit ses œuvres les plus importantes. Peut-être est-ce à cette influence qu'il faut attribuer le raffinement de ses couleurs, son goût du rare et de l'étrange, le caractère symbolique et intense de son œuvre. Formé sans doute aux Pays-Bas et plus précisément à l'exemple des miniaturistes néerlandais (sa première œuvre connue est le Livre d'heures de Sofia Van Bylant), le Maître de Saint Barthélemy a apporté à Cologne la richesse d'une personnalité exceptionnelle, appréciant les formes les plus contournées, les gestes les plus outrés, utilisant un dessin excessivement nerveux et exploitant un goût presque obsessionnel pour la préciosité des matières. Par cette exacerbation graphique et cette abondance décorative, et aussi par l'intensité spirituelle de son inspiration, il est l'un des derniers grands peintres gothiques.

Maître du Retable de Sainte-Barbe, dit aussi Maître de 1447 ou Maître de Sainte-Barbe

Peintre allemand (actif à Breslau à partir de 1440 env. et jusque vers 1470).

Il doit son nom au grand retable à volets, chef-d'œuvre de la peinture silésienne au XVe s., peint en 1447 pour l'église Sainte-Barbe de Breslau. Les volets s'ouvraient sur un panneau présentant 3 grandes figures sur fond d'or : Sainte Barbe tenant la maquette de l'église Saint-Félix et Saint Adauctus. Cette partie centrale (musée de Varsovie), d'une grande majesté avec ses personnages puissants et solennels, était encadrée de 12 scènes illustrant la Légende de sainte Barbe, d'un style différent et expressif, plein de vivacité. Sur les panneaux extérieurs des volets intérieurs sont représentées la Crucifixion et la Descente de croix. Lorsque se refermaient les volets (disparus depuis 1945), on voyait la Vierge en majesté avec le Christ bénissant ; à l'intérieur des volets extérieurs, de petites Scènes de la Passion.

   Outre le Retable de Sainte-Barbe — ouvrage où la personnalité de l'artiste est la plus affirmée —, on est d'accord pour reconnaître comme une œuvre caractéristique du Maître de Sainte-Barbe la Crucifixion de Heidau, peinte v. 1447 (Todz, musée Sztuki), rapprochée d'une Crucifixion de Saint-Sébald à Nuremberg. Le Retable de Wartenberg (v. 1468), également conservé au musée de Varsovie, a aussi été attribué à ce maître.

   Cet anonyme semble avoir été le représentant le plus remarquable du cercle silésien à Breslau au milieu du siècle. Ses origines restent obscures et discutées. Les particularités de son style rappellent également la Bohême, la Bavière, l'Autriche et même les Pays-Bas, et témoignent de voyages à l'étranger. Il n'est pas impossible que le maître soit né à Breslau ; son art, dramatique, chargé d'énergie, d'un réalisme puissant, a rayonné jusqu'en Moravie, Galicie et Pologne. Peut-être est-il identifiable avec Nikolaus Smid, résidant déjà à Breslau en 1440 et qui obtint dans cette ville, en 1450, le droit de bourgeoisie.

Maître du Retable de Staufen

Peintre allemand (actif dans la première moitié du XVe s.).

Il doit son nom à un retable qui provient du presbytère de l'église de Staufen, près de Fribourg-en-Brisgau, et qui semble avoir été le retable majeur de cette église. De cet ensemble, dont manque la partie centrale, subsistent les panneaux de la face interne (dominicale) des volets, où sont peintes des scènes de la vie de la Vierge : l'Annonciation, la Visitation, la Nativité, la Circoncision, l'Adoration des mages, la Présentation au Temple et le Couronnement (Fribourg-en-Brisgau, musée des Augustins). Quant aux volets extérieurs, consacrés à la Passion, 4 d'entre eux (le Christ au mont des Oliviers, le Christ devant Pilate, la Flagellation et le Couronnement d'épines) sont également conservés à Fribourg, alors que 3 autres (l'Arrestation, la Crucifixion et la Mise au tombeau) se trouvent à Karlsruhe (Staatliche Kunsthalle).

   Le retable fut peint dans le deuxième quart du XVe s. Il se rattache au " style doux " tardif du Rhin supérieur. Les couleurs, éclatantes, ont le velouté de l'émail ; les personnages, au modelé arrondi, d'une délicatesse tout enfantine, s'ordonnent avec simplicité dans un cadre où paysage et intérieurs sont esquissés à l'aide de quelques motifs semblables à des décors de théâtre. On attribue l'exécution de ces scènes à deux peintres formés dans l'atelier du Maître du Jardinet du Paradis ; les volets intérieurs sont donnés à un " Maître de l'Adoration " ; les volets extérieurs sont attribués à un Maître de la Passion.

   M. Woolf (1983) a mis en valeur l'influence de cet atelier sur le style du Maître des Cartes à jouer, le premier graveur en taille-douce, dont l'activité a été localisée dans le Rhin supérieur à partir de 1435 env.