imagerie en Europe (suite)
Amérique
Il n'est pas étonnant, vu l'immensité de son territoire et sa diversité, qu'aient subsisté en Amérique deux formes d'imagerie populaire : l'une traditionnelle, de forme européenne, latine surtout ; l'autre aux techniques nouvelles, protéiforme, toujours en évolution.
La population de l'Amérique du Nord est, au XIXe s., une assemblée d'émigrants, qui ont laissé leurs traditions en Europe et n'ont emporté avec eux que leurs habitudes. Les conditions nécessaires à l'implantation d'une imagerie n'existent pas. Ni couvents, ni lieux de pèlerinage, rien qui suscite les motivations ; les religions sont diverses, et les dévotions multiples. Il ne reste que le souvenir sur papier d'un passé relié à une enfance passée sur un autre continent. L'image, venue dans les bagages de l'émigrant, a peu de chances d'être remplacée lorsqu'elle est abîmée. Cependant, il semble qu'on ait vendu des images sur la côte est. Gangel, éditeur d'imagerie de Metz, a un dépositaire à New York, auquel il envoie en 1854 des images lithographiées.
Les imprimeurs qui s'installent utilisent des machines modernes. Pourquoi désireraient-ils se servir de caractères et de bois anciens puisque déjà, en Europe, les techniques sont en voie de renouvellement ? De nouvelles façons de s'exprimer s'offrant à eux, ils s'empressent de s'en servir et d'innover.
Pourtant, au XIXe s., si l'imagerie telle que la conçoivent les Italiens et les Allemands n'existe pas en Amérique du Nord, celle qui vient d'Angleterre, celle des cocks, n'est pas oubliée. Sous la forme de polytypages et de clichages sont illustrés des annonces de vente, des avis de recherche de criminels, des affichettes pour tous les modes de locomotion (bateau sur le Mississippi, train vers l'ouest), des affiches-réclame pour produits manufacturés. L'essor industriel du XXe s. va faire exploser cette survivance. L'image, nécessité absolue pour l'équilibre du psychisme humain, va naître sous une nouvelle forme, faite pour le pays et pour ceux qui l'habitent. La connaître serait connaître les rites inconscients et la magie gestuelle contenus dans la vie quotidienne. Une imagerie nouvelle commence à être comprise par l'étude de ses manifestations : le poster, affiche d'intérieur, les images de pin-up, collées dans les cantines de soldats, les cartes de vœux et les cartes postales, également collées sur les tiroirs des bureaux administratifs, les images filmiques, les mass media.