Dictionnaire de la Peinture 2003Éd. 2003
N

Noël (Jules)

Peintre français (Quimper 1815  – lAlger 1881).

Paysagiste, mariniste, peintre de genre, Jules Noël prolongea l'inspiration des petits maîtres romantiques. Il démarqua, non sans talent, l'art d'Eugène Isabey, aussi bien dans le choix des thèmes que par sa technique. Ses vues de Normandie et de Bretagne sont conservées dans de nombreux musées de province (Angoulême, Besançon, Bordeaux, Brest, Cambrai, Cherbourg, Magnin à Dijon, Douai, Hyères, Lille, Mulhouse, Nancy, Nantes, Pau, Reims, Rennes, Rochefort, Tours, Valence) ainsi qu'au musée Condé de Chantilly.

Nolan (Sidney)

Peintre australien (Melbourne 1917  – Londres 1992).

D'ascendance irlandaise, il se forma à Melbourne, où, de 1945 à 1947, il exécuta une première série de peintures ayant trait à Ned Kelly, un hors-la-loi australien, et qui marquèrent le début de sa réputation internationale. Grand voyageur (Europe, Mexique, Japon), il a surtout résidé à Londres depuis 1953. Nolan a continué à choisir des sujets tirés de l'histoire de l'Australie (Mrs. Fraser, le Débarquement de Gallipoli ), mais il s'est également inspiré de la mythologie classique (suite des Leda en 1960), dans un style pénétré d'éléments surréalistes et plus particulièrement influencé par l'œuvre de Max Ernst (peintures de fleurs rappelant la technique des frottages). Ses personnages, de caractère très expressionniste, errent généralement dans de vastes étendues. L'humour est souvent à l'œuvre dans sa peinture, notamment dans ses Notes for Œdipus exposées à Londres en 1975. Il est représenté à New York (M. O. M. A.), à Liverpool (Walker Art Gal.), à Melbourne (N. G., tableaux de ses débuts). La Tate Gal. de Londres conserve notamment son tableau intitulé Glenrowan.

Noland (Kenneth)

Peintre américain (Asheville, Caroline du Nord, 1924).

Élève d'Albers au Black Mountain College, puis d'Ossip Zadkine à Paris en 1948-49, il enseigne ensuite à l'Institute of Contemporary Art et à la Catholic University de Washington avant de s'installer à New York, en 1961. C'est vers la fin des années 50 que Noland, avec Gottlieb et Morris Louis notamment, en réaction contre l'Expressionnisme abstrait, met l'accent sur le rôle de la couleur pure. À cette fin, il refuse l'espace illusionniste et s'attache surtout à une application rigoureusement égale de la couleur sur la toile : pas de texture apparente, pas de variations d'intensité, seulement l'interaction de la couleur telle que l'élève d'Albers la propose avec ses cercles concentriques (Sans titre, 1960, Cologne, Museum Ludwig ; Provence, 1960, id. ; Prune, Chicago, Art. Inst.). Donnant la préférence aux peintures acryliques et à leur application au rouleau, il cherche à réduire au minimum l'imperfection et surtout la " personnalisation " de ses toiles. Après les bandes de couleurs parallèles, Noland peint en chevrons des bandes de couleurs adjacentes en laissant intacte la majeure partie de la toile (Bend Sinister, 1964). Il marque ainsi le caractère essentiellement optique de la composition, tout en mettant en évidence l'arbitraire que constitue le champ de la toile. Dans le même esprit, il laisse la forme et la taille (souvent considérable) du tableau dicter aux couleurs leur structure : alignement oblique des bandes sur un support en losange (Par transit, 1966 ; Pend, 1975, musée de Grenoble) ou bandes parcourant sur toute sa longueur la toile (New Day, 1967, Chicago, Art Inst.). Ainsi Noland exclut-il la lecture traditionnelle figure-fond en même temps qu'il affirme la dépendance de la peinture à l'égard de son support. Kenneth Noland, tout en s'en tenant à l'usage de tracés géométriques, a transformé sa technique, notamment par le travail de la matière en épaisseur. Il est représenté dans les musées américains (Buffalo, Albright-Knox Art Gal. : Yellow Half, 1963 ; Wild Indigo, 1967 ; Cambridge, Mass., Fogg Art Museum ; Detroit, Inst. of Art ; New York, Whitney Museum : Song, 1958) et européens (Paris, M. N. A. M. : First, 1958 ; Bâle, K. M. : Winter Sun, 1962).

Nolde (Emil Hansen, dit Emil)

Peintre allemand (Nolde 1867  – Seebüll 1956).

Il adopta le nom de sa ville natale en 1902. De 1884 à 1889, il apprit la sculpture sur bois à Flensburg, travailla ensuite à Munich, à Karlsruhe et à Berlin, et enseigna le dessin à l'école d'art industriel de Saint-Gall, en Suisse, où il exécuta des aquarelles (1894-1896) pour des cartes postales représentant les montagnes sur un mode burlesque et expressif ainsi que des dessins de masques puissamment caricaturaux (Seebüll, fondation Nolde). Il retourne à Munich, est l'élève de Hölzel à Dachau, commence à graver à l'eau-forte (1898-99) et réalise de très belles aquarelles, technique dans laquelle il excellera toujours (Portrait de jeune fille, 1898, Seebüll, fondation Nolde). À Paris en 1899-1900, il est frappé par Rembrandt, chez les anciens, et Manet, et Van Gogh, chez les modernes, et travaille à l'Académie Julian. Il séjourne ensuite à Berlin, à Copenhague, puis s'installe en 1903 dans l'île d'Alsen. Il expose à Dresde en janvier 1906 et entre en contact avec Die Brücke, dont il se sépare dès l'année suivante. Kirchner, notamment, appréciait ses eaux-fortes, et il commence à graver sur bois en 1906, à lithographier en 1907.

   Ses tableaux, alors surtout des paysages, enlevés dans une pâte drue et très colorée, témoignent encore d'un impressionnisme revu par Van Gogh (Roses rouges et jaunes, 1907, Cologne, musée Ludwig). La facture se diversifie à partir de 1909-10, quand Nolde entreprend la suite célèbre de tableaux sur des thèmes religieux et bibliques, œuvres dans lesquelles la ferveur extatique côtoie la sensualité brutale (la Pentecôte, 1909, Seebüll, fondation Nolde ; la Danse autour du veau d'or, 1910, Munich, Staatsgalerie moderner Kunst ; le Christ et les enfants, 1910, New York, M. O. M. A. ; Légende de Marie l'Égyptienne, triptyque, 1912, Hambourg, Kunsthalle, Vie du Christ, 1912, en 9 tableaux, Neukirchen über Niebüll ; Siméon et les femmes, 1915). Le thème de la danse intervient dans un sens religieux et profane (Danse sauvage d'enfants, 1909, musée de Kiel), où l'accent est mis sur le transport frénétique, la morphologie de la danseuse, membres grêles et seins aux énormes bouts rouges (Danseuses aux chandelles, 1912, Seebüll, fondation Nolde ; gravé sur bois en 1917 ; Danseuse, 1913, litho en coul.) D'autres peintures sont consacrées à des scènes urbaines (Au café, 1911, Essen, Folkwang Museum) ; en 1910 prend place une très belle suite de gravures, eaux-fortes et bois, inspirés par le port de Hambourg, ses remorqueurs trapus ; en 1910-11, une série de tableaux sur le thème de la mer, qu'il reprendra régulièrement. Il rend visite à Ensor à Ostende en 1911. Après avoir étudié à partir de 1911 l'art des peuples primitifs au musée d'Anthropologie de Berlin, il accompagne (1913) la mission anthropologique Külz-Deber en Nouvelle-Guinée, d'où il rapporte dessins, aquarelles et peintures enrichis par cette expérience (Soleil des tropiques, 1914, Seebüll, fondation Nolde).

   De retour en 1914, il réside alternativement à Alsen (jusqu'en 1917) et à Berlin. Le style de Nolde, désormais fixé, évoluera peu ; mais il utilise maintenant avec plus de hardiesse la couleur, en contrastes de bleus et de jaunes, d'oranges et de violets, aux riches résonances, suit parfois d'assez près le motif (Frères et sœur, 1918, Seebüll, fondation Nolde), revient ailleurs à la stylisation (la Pécheresse, 1926). À partir de 1929, il pratique beaucoup l'aquarelle (études de fleurs, paysages souvent avec figures) et conserve sa vigueur incisive dans ses dernières gravures (Danseuse du feu, 1921), où il admet aussi une certaine grâce (Baigneuse, 1925). En 1926, Nolde passe l'été à Seebüll, près de la frontière danoise, où il séjournera régulièrement et où il s'installera en 1941.

   Particulièrement malmené, avec Kirchner, par les nazis, il lui fut interdit de peindre en 1941. Pendant cette période néfaste, il peut pourtant créer maintes petites aquarelles, paysages et figures, " tableaux non peints ", dit-il, où l'imagination de l'artiste se donne libre cours (Couple dans une lumière jaune, Seebüll, fondation Nolde). Les meilleures toiles postérieures à 1930 sont consacrées à des études de fleurs d'une couleur exubérante, des marines amplement composées et d'une vision sereine dénotant une compréhension intime du phénomène naturel (Tournesols, 1932, Detroit, Inst. of. Arts ; Coquelicots, 1942, Seebüll, fondation Nolde ; Marine claire, 1948, id.).

   L'œuvre peint comprend, entre 1896 et 1951, 1 112 tableaux ; l'œuvre gravé, pratiquement achevé en 1926 (4 derniers bois en 1937), 231 eaux-fortes, 197 bois et 83 lithographies. La maison de Seebüll, transformée en musée (1957), est le lieu privilégié pour connaître l'œuvre d'Emil Nolde, qui est également représentée dans les grands musées allemands, européens (Bâle, Crépuscule, 1916 ; Paris, M. N. A. M., Nature morte aux danseuses, 1914) et américains. Une exposition rétrospective de son œuvre a eu lieu à Cologne, W. R. M., en 1973. Ses œuvres ont aussi été présentées à Copenhague (M. A. M. Arken) en 1996.